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Willie DIXON - Willie's Blues (1960)
Par LE KINGBEE le 11 Février 2018          Consultée 1387 fois

Chers lecteurs, le nom de WILLIE DIXON devrait interpeller aussi bien les amateurs de Blues que les fans de Rock, de Hard Rock et de Pop. On retrouve son nom en accréditation d’innombrables chansons. Maillon essentiel du Chicago Blues et du Revival, ce personnage influent mérite largement les lignes qui vont suivre.

Willie Dixon voit le jour en 1915 à Vicksburg, ville jadis minée par de violents combats lors de la Guerre de Sécession située à un jet de pierre du Mississippi. Issu d’une famille privilégiée (ses parents ne sont pas de pauvres fermiers ou ramasseurs de coton mais commerçants), il débute dans la musique en chantant dans sa paroisse dès quatre ans puis étudie la guitare et la contrebasse. Que du bonheur pour un gamin noir dans cette région du Mississippi.
Mais toute bonne chose a une fin. A 12 ans, le gamin est condamné aux travaux forcés au pénitencier de Ball Ground pour une histoire de chapardage. Le parallèle avec Jean Valjean, personnage central des Misérables, ne paraît pas si outrancier. Ce passage ne sera pas anodin dans le quotidien de Dixon et on peut comprendre aisément le sentiment d’injustice que le garçon ressentait vis-à-vis du Sud ségrégationniste.
En 1936, Willie quitte le Mississippi et rejoint Chicago où il devient boxeur. Sa carrière pouvait être toute tracée, s’il n’avait pas rencontré le pianiste Leonard Caston qui l’encourage à mettre les gants au placard pour devenir musicien. Willie intègre les Five Breezes en compagnie de Caston et enregistre une poignée de 78 tours pour la firme Bluebird. En 1940, appelé sous les drapeaux pour aller jouer au petit soldat, l’ancien boxeur refuse d’être incorporé et est reformé pour déficience mentale. A la fin de la Seconde Guerre, il intègre le Four Jumps of Jive puis le Big Three Trio, en compagnie de Caston et du guitariste Ollie Crawford enregistrant ainsi pour la Columbia.
Songwriter aussi prolifique qu’efficace, l’ancien objecteur de conscience devient brièvement directeur artistique et arrangeur pour le compte de Lester Melrose, l’un des pères fondateurs du Chicago Blues, avant d’atterrir dans l’écurie du label Chess que viennent de fonder les frangins Leonard et Phil Chess. Dès 1951, Willie Dixon devient la cheville ouvrière de la firme chicagoanne, endossant les rôles d’arrangeur, d’auteur compositeur, de directeur artistique, de talent-scout, de producteur et de musicien de session. Si Willie Dixon n’a à cette époque que rarement enregistré sous son nom, il peut se targuer d’être à l’origine des grands succès du label. Pour résumer, Muddy WATERS, HOWLIN’ WOLF, Sonny Boy WILLIAMSON II, Chuck BERRY, Bo DIDDLEY, Little WALTER ou Buddy GUY (pour ne citer que les principaux) lui doivent une partie de leur réussite.

La suite devrait figurer dans un second épisode, une sorte de saison 2 comme la télévision se complait tant à nous en refourguer depuis quelques années, si le pilote a bien marché.

En préambule, nous évoquions les nombreuses compositions du contrebassiste, morceaux repris par le monde du Rock et du Blues. Voici une quinzaine d’exemples mettant en lumière son influence et ses talents de créateur :

- Back Door Man » (The Doors, The Shadows Of Knight, The Blues Band)
- Bring It On Home » (Led Zep, Ace Frehley, Joan Osborne)
- Diddy Wah Diddy » (The Remains, Captain Beefheart, Bruce Springsteen)
- Evil » (Derek & the Dominos, Cactus, Gary Moore)
- Help Me » (Ten Years After, Canned Heat, Johnny Winter)
- Hootchie Coochie Man » (Allman Brothers Band, Motorhead, New York Dolls)
- I Ain’t Superstitious » (The Yardbirds, Grateful Dead, The White Stripes)
- I Can’t Quit You Baby » (Led Zep, John Mayall, Nine Below Zero)
- I Just Want To Make Love To You » ( Rolling Stones, The Kinks, The Animals, Foghat)
- I’m Ready » (Humble Pie, Aerosmith, George Thorogood)
- Little Red Rooster » (Rolling Stones, Tom Petty, Jesus and Mary Chain)
- Mellow Down Easy » (Cactus, Black Crowes, ZZ Top)
- My Babe » (Elvis Presley, Everly Brothers, Spencer Davis Group)
- Spoonful» (Cream, Shadows Of Knight, The Who, Dion)
- Talk To My Baby  » (Fleetwood Mac, Clapton, Foghat)
- Wang Dang Doodle » ( Savoy Brown, Pointer Sisters, Warren Zevon)
- You Can’t Judge a Book By The Cover » (The Yardbirds, The Monkees, Rolling Stones)


Nous sommes en décembre 1959. Après avoir œuvré pour Chess et Cobra Records, Willie Dixon n’a enregistré sous son nom qu’une poignée de 45 tours pour Checker, filiale de Chess. Mais curieusement, l’orée des sixties s’annonce captivante pour l’homme à tout faire de Chess. Le label Folkways publie coup sur coup deux albums : le premier en compagnie du pianiste Memphis Slim, le second provient d’un concert en trio avec Pete Seeger capté au Village Gate. Willie Dixon n’est pas seulement un artiste multitâche, il a du nez et sera parmi les premiers à percevoir les prémices d’un genre nouveau : le Folk Blues Revival.
Le label Bluesville rattaché à Prestige Records entame une nouvelle série orientée non plus sur le Jazz mais sur le Blues. La maison de disques, qui vient d’éditer ses deux premiers 33 tours avec Al Smith et le duo Brownie McGhee/Sonny Terry, est à la recherche de nouveaux musiciens. La firme porte son choix sur Willie Dixon et Memphis Slim. Les deux hommes sont amis, ont le même âge et jouent ensemble dans les clubs de Chicago. Si le pianiste a connu une grosse popularité, la fin des fifties s’annonce pénible, il n’a plus de groupe et sa côte chute progressivement. Memphis Slim, auteur de plusieurs gros succès (« Every Day I Have The Blues », « Blue And Lonesome », « Messin’ Around ») a toujours la niaque.
Outre Memphis Slim, Dixon est envoyé au Rudy Van Gelder Studio à Englewood Cliffs au nord de New-York, un studio qui n’allait pas tarder à devenir légendaire. Après avoir longtemps travaillé comme ingénieur du son pour Blue Note tout en officiant comme ophtalmologiste la journée, Van Gelder vient de monter son propre studio. Dixon et Slim sont épaulés d’une solide brochette : le guitariste Wally Richardson (futur Buddy Tate, Illinois Jacquet, Wilson Pickett), le batteur Gus Johnson (ex Count Basie, Zoot Sims) et du saxophoniste Al Ashby, un quasi débutant ayant officié auprès de Ben Webster et Jimmy Witherspoon.

Avec une telle line-up et la participation de Van Gelder au son et à l’enregistrement, Dixon gomme une grosse partie de ses influences issues du Delta. Le disque fait la part belle au talent de songwriter du contrebassiste. Dixon est l’auteur de dix titres tandis que Memphis Slim contribue à deux morceaux.
L’album s’ouvre sur « Nervous », l’un des deux titres qui aura les honneurs de figurer sur l’unique single dédié à cette session. Là, le morceau nous renvoie vers le West Side et le Jazz de Chicago via la guitare cristalline de Richardson, le piano et la contrebasse se contentant d’un rôle de gardiens du temple. Les instruments semblent en symbiose. Les lignes mélodiques faites de petites touches nous renvoient vers un répertoire subtil n’ayant rien à voir avec les tavernes de Chicago ni ses sordides ghettos. La majorité des pistes nous expédient dans l’ambiance des clubs de Jazz de la Cité des Vents.
Le rythme s’accélère sur « Don’t You Tell Nobody » qui prend des allures de boogie. « Youth To You » se rapproche par son inflexion de « I Just Want To Make Love To You ». Autre bonne pioche avec le plaintif « Sittin’ And Cryin’ The Blues », titre que Dixon reprendra avec Johnny Winter et figurant à la bande son du film « Hitman Bodygards ». Les délicates touches de sax et d’ivoires permettent à « Built For Comfort » de prendre son envolée pour l’une des meilleures interprétations du morceau avec celle d’Howlin’ Wolf. Dixon nous offre une démonstration de contrebasse métronome sur « I Got A Rasor », tandis que le piano prend le relai sur « Go Easy ». Enfin, signalons que le jeu de contrebasse terriblement expressif sur « Slim’s Thing » renvoie carrément à celui du jazzman Slam Stewart.

En mariant les schémas du Jazz et du West Side Blues, les deux complices délivraient un disque haut en couleur qui n’a guère pris de rides 58 ans après sa sortie. Un disque annonciateur des futures tournées de l’American Folk Blues Festival.

*Cette chronique provient des écoutes du LP Prestige 1003 -68414 pressage français de 1984 distribué par Carrere et du LP Prestige Bluesville Records (BV 1003) pressage anglais édité en mono.

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- Willie Dixon (chant, contrebasse)
- Memphis Slim (piano)
- Wally Richardson (guitare)
- Gus Johnson (batterie)
- Al Ashby (saxophone)


1. Nervous.
2. Good Understanding.
3. That's My Baby.
4. Slim's Thing.
5. That's All I Want Baby.
6. Don't You Tell Nobody.
7. Youth To You.
8. Sittin' And Cryin' The Blues.
9. Built For Comfort.
10. I Got A Razor.
11. Go Easy.
12. Move Me.



             



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