Parfois, à bien y réfléchir, il suffit de pas grand-chose pour basculer encore un peu plus du côté obscur. Quelques lignes d'un site web américain spécialisé en musique sombre sur un trio romain qui vous est totalement inconnu mais qui suscite immédiatement votre curiosité. Le hasard essayant même généralement de faire plutôt bien les choses, il s'avère qu'à l'écoute des morceaux proposés, vous tombez instantanément sous le charme de ce premier album sorti à la fin de l'année 2019. Ceci ne faisant qui plus est que confirmer une idée qui vous est chère et qui consiste à penser que l'Italie pour ce style musical entre autres demeure d'une importance primordiale tant les groupes de qualité sont légions (romaines). 3 + DEAD ne déroge pas à cette règle et ne fera pas mentir ce fait musical solidement établi.

Le trio nous expose donc une pop froide, mélancolique et rêveuse aux influences facilement palpables mais qui n'en demeure pas moins intéressante. Les Romains dès "Snake Of June", leur titre d'ouverture, pose avec intelligence les contours de leur univers qui sera décliné subtilement en différentes teintes orangées. Ici, avec ces cinq premières minutes, 3 + DEAD délivre une petite perle post-punk qui allie basse soutenue, guitare nerveusement cristalline et voix qui rappelle par moments celle en moins hantée de SIOUXSIE. Comme entrée en matière, il y a naturellement plus désagréable. Cette apparente économie de moyens dans les atmosphères (post-punk oblige me diriez-vous) qui distille volontiers un attractif minimalisme ne diminue en rien les émotions, loin de là.

Un morceau comme le direct "The Thing That You Call Love" est à ce titre assez parlant. On est certes en terrain balisé, mais il y a à l'évidence la petite chose qui fait la différence et qui vous touche quasiment instantanément. La puissance mélodique des arpèges de la guitare typée années froide de Roberto Ruggeri, l'expressivité dosée de la voix d'Elisa Pambianchi ou la basse liquide de Giuseppe Marino n'y sont pas naturellement étrangères. Au petit jeu des influences, certaines ombres se détachent plus que d'autres.On pense par exemple à COCTEAU TWINS et à sa pop estampillée tête dans les nuages, comme sur le très beau "Shine" qui avec grâce fait flotter l'auditeur dans un autre monde ou à Steven SEVERIN, le bassiste des BANSHEES pour cette basse ronde le plus souvent intelligemment mise en avant (le serein et réussi "Ocean Drift").

3 + DEAD, s'il paye sa dette aux pointures du genre, n'est pas pour autant un ersatz premier prix. A cette immédiateté appréciable et à ses estimables échos, se conjugue aussi pour les Italiens cette volonté de proposer des ambiances un peu moins attendues et entendues. Même si c'est une reprise, la palme revient sans conteste à "Kebabtraume" des Allemands de DAF où le trio fait de ce titre proto-electro de 1980 une petite pièce mélancolique et légère en lui offrant un nouveau visage plutôt sympa. Le groupe en profite, lorsqu'il ne propose pas certaines textures plus rêches (le tendu "November" et son intraitable boite à rythme), pour tisser de belles toiles atmosphériques. A l'image de ce son frissons de guitare sur "Rabit Hole" ou sur le sautillant "Angitia", les notes s’avèrent savoureuses et réussissent surtout à imprimer une identité plus singulière.

Voici une belle découverte. De celles qui comblera les amoureux de pop froide à haute teneur mélodique et émotionnelle. Merci à l'Italie, encore une fois, et à 3+ DEAD pour ces débuts plus que prometteurs, promesse qui crée ainsi cette envie d'effectuer un bout de chemin ensemble.

Note réelle : 4,5/5