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2020 Mixing Colours
 

- Style : Harold Budd & Brian Eno, Robin Guthrie & Harold Budd
- Style + Membre : Roger Eno , Brian Eno

ROGER ENO & BRIAN ENO - Mixing Colours (2020)
Par AIGLE BLANC le 1er Novembre 2021          Consultée 691 fois

Roger ENO a contribué à des albums de Brian, son frère aîné, aussi bien comme musicien et/ou co-compositeur de certains titres que comme producteur et/ou ingénieur du son. C'est ainsi qu'il est intervenu aux claviers et mixage de Thursday Afternoon (1986) ou qu'il a officié au piano à l'occasion d'un titre de Nerve Net (1992). Son nom figure également aux crédits de la trilogie Music For Films (1976-83) dont il a co-composé quelques titres.
En dépit de cela, Mixing Colours (2020) innove sur un point : il semble en effet que ce soit la première fois que Brian et Roger co-signent l'intégralité d'un album, en atteste la pochette frontale sur laquelle coexistent leurs deux patronymes. On peut légitimement se demander pourquoi les deux frères, dont la musique semble si proche quelquefois, n'avaient jamais collaboré de manière si étroite auparavant.
L'année 2020 pourrait d'autant plus marquer le début d'une collaboration suivie des deux hommes qu'ils nous offrent en prime un mini-album (E.P), Luminous, constitué de sept titres supplémentaires dont un ("Pewter") figurant comme bonus de l'édition japonaise de Mixing Colours. Tout porte à penser que cette addition à Mixing Colours provient des mêmes sessions d'enregistrement, les oeuvres picturales que reproduisent les deux pochettes comme le livret étant signées du peintre Dom Theobald, et les deux disques étant édités, à seulement deux ou trois mois d'intervalle, par l'illustre label allemand Deutsche Grammophon, spécialiste du répertoire classique, mais ne dédaignant pas à l'occasion de s'aventurer dans les territoires plus expérimentaux de la musique électronique, comme cela avait été le cas à l'époque du surprenant Invisible Connections (1985), l'opus avant-gardiste de VANGELIS. Il est à déplorer cependant que ce label ait fait paraître en octobre 2020 une version augmentée de Mixing Colours qui n'est ni plus ni moins que la réunion de l'album proprement nommé et de l'E.P Luminous, ce qui rend caduque l'acquisition de l'E.P en question. Les fans et collectionneurs devraient donc mettre deux fois la main à leur porte-feuilles.

L'ordre des patronymes sur la pochette semble toutefois indiquer la légère prédominance de Roger ENO en terme de composition, ce que confirmerait, pour une oreille familiarisée avec les oeuvres du frère cadet, l'écoute des 18 titres de l'opus qui portent véritablement son empreinte. Plutôt que dans l'ambient proprement dite, la musique déployée ici penche davantage du côté du minimalisme cher à Philip GLASS ou John ADAMS, voire à Arvo PART, sur lesquels plane l'ombre tutélaire d'Eric SATIE.
Roger ENO en effet compose toujours à partir du piano, instrument central des 18 miniatures de Mixing Colours, toutes livrées dans une relative nudité, en l'absence des fioritures électroniques, Brian ENO se montrant particulièrement sobre dans ses habituels traitements sonores, laissant ainsi toute leur place aux claviers de son frère parmi lesquels on reconnaît le fameux Fender Rhodes, si magnifiquement employé par VANGELIS dès L'Apocalypse des Animaux (1973), et qui enveloppe certaines compositions ("Spring Frost", "Burnt Umber", "Celeste", "Verdigris", "Rose Quartz") de ce son si doux et caressant. Par ailleurs, d'autres claviers électroniques enrichissent la palette sonore d'une touche cristalline convenue certes, mais assez plaisante, comme en bénéficient "Wintergreen" et "Cerulean Blue", tandis que "Burnt Umber", titre envoûtant, se signale également par ses sons de cloches (tubulaires ?) très réussis évoquant les rituels tibétains. La plupart des autres titres privilégient des arrangements plus classiques au piano, souvent interprétés touche à touche ("Blonde", "Dark Sienna") dans la pure tradition minimaliste, c'est-à-dire sans démonstration de virtuosité aucune.
La mélodie initiale ("Spring Frost") se voit étrangement déclinée selon plusieurs arrangements aux claviers, devenant "Verdigris" lors de la piste 8, puis "Cerulean Blue"en presque fin de parcours. On peut s'interroger sur cette triple déclinaison, une hypothèse demeurant que la réitération de ce motif agit sur l'auditeur comme un leitmotiv renforçant la cohérence de l'ensemble. Nous sommes pour ainsi dire invités à considérer ces trois titres comme le thème central du disque.
Les traitements électroniques de Brian ENO ne dépassent pas le cadre du titre "Desert Sand" aux sonorités rétro rappelant l'époque de Music For Films, ni celui d'une réverbération familière ajoutée aux claviers, touche éno-esque typique.
A cause de la dimension mélodique de chaque pièce, l'album n'évolue pas dans le territoire ambient le plus strict, même s'il se caractérise par l'absence totale de rythme percussif et par des mélodies assez discrètes. Mais si vous êtes adepte de la série Music For Films, Mixing Colours ne devrait pas vous décevoir, à condition d'accepter la moindre variété de ses climats traversés, défaut du disque sur lequel nous allons revenir dans un instant.

C'est à Brian ENO sans doute que cet opus doit son concept éminemment poétique, chacun de ses titres désignant une couleur ou un dégradé de couleurs, idée aussi évidente qu'inédite semble-t-il en musique, du moins à l'échelle d'un album intégral. Mixing Colours explore donc le monde si riche de la synesthésie*, chaque piste traduisant les impressions musicales induites par la couleur représentée, programme riche malheureusement amoindri par l'absence de variété tonale des pistes qui s'enchaînent dans une relative monotonie, ce qui ne constituerait pas en soi un défaut en dehors du concept exploré. Comment expliquer en effet que les couleurs traduites en musique ne débouchent pas sur des impressions différentes ? L'album ne se départit jamais d'une certaine mélancolie, comme si les diverses couleurs abordées ne généraient chez les musiciens qu'une seule humeur, alors que ces mêmes couleurs auraient pu leur inspirer parfois des sentiments plus solaires ou joyeux, d'autres fois plus sombres et ténébreux.

Mixing Colours demeure un bien bel album à défaut d'un grand opus. Sa petite musique distillée avec parcimonie et sensibilité est propre à caresser vos songes poétiques. Une musique simplement humaine, ça ne saurait se refuser en cette période troublée de pandémie.

*synesthésie : correspondance poétique établie entre deux éléments qui sollicitent pourtant deux sens bien distincts. Mettre en musique une couleur particulière, c'est établir une passerelle entre les sens visuel et auditif.

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   AIGLE BLANC

 
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- Roger Eno (claviers)
- Brian Eno (programmations, design sonore)


1. Spring Frost
2. Burnt Umber
3. Celeste
4. Wintergreen
5. Obsidian
6. Blonde
7. Dark Sienna
8. Verdigris
9. Snow
10. Rose Quartz
11. Quicksilver
12. Ultramarine
13. Iris
14. Cinnabar
15. Desert Sand
16. Deep Saffron
17. Cerulean Blue
18. Slow Movement Sand



             



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