Nous sommes en 2010, voilà une bonne dizaine d’années que Ariel PINK compose de chez lui et produit des albums sans que sa musique soit réellement comprise et appréciée par la critique. En écoutant Before Today, on pourrait penser que l’artiste a décidé d’opérer un virage décisif pour (enfin) obtenir l’approbation des amateurs de la scène indé. Alors peut-on dire que cet album est moins audacieux car plus accessible que ses prédécesseurs ? En réalité, sa musique reste tout aussi dérangeante et décalée que ce qu’il a pu faire auparavant à la différence que ses moyens de production ont quelque peu évolué. Surtout, Ariel s’est entouré de véritables musiciens et ça, ça fait toute la différence.

Les instruments se distinguent plus nettement et les quelques digressions instrumentales en sont ainsi beaucoup plus appréciables. De manière générale, les morceaux de l’album se suivent en parfaite cohérence. De plus, l’artiste semble presque avoir délaissé l’aspect bruyant et défiguré de ses premiers enregistrements. Sur ce point, il est évident que le côté dissonant de ses précédents morceaux – qui pouvaient déranger comme faire le génie de sa musique – n’est plus aussi présent. Il n’en demeure pas moins que Ariel PINK est resté fidèle à son esthétique de départ. La dissonance est toujours au rendez-vous et je dirais même qu’il est désormais plus simple de l’apprécier.

Dans l’ensemble, Before Today est un album efficace qui alterne entre étrangetés et refrains puissants et accrocheurs. La preuve en est avec Bright Lit Blue Skies, une très bonne reprise du groupe ROCKIN’ RAMROD et accessoirement un superbe hommage au surf rock des années 60. L’artiste se l’est parfaitement réapproprié en y apportant un nouveau souffle. On bascule ensuite dans une tout autre dimension avec L’Estat rythmé par un synthé planant. Ce morceau se démarque du reste de l’album puisqu’il a des accents psychédéliques beaucoup plus prononcés. On y retrouve toute sa folie créatrice, c’est sans doute la piste la plus intéressante de l’album.

Vient ensuite Round and Round, le morceau phare à l’origine du succès de l’album. Le refrain résonne comme un hymne ! Pourtant, je ne peux pas m’empêcher de le trouver un peu répétitif et longuet. Globalement, la recette reste la même, Ariel PINK est capable de nous faire voyager dans d’autres décennies tout en produisant une musique innovante : Butt-House Blondies est un super clin d’œil au grunge des années 90 tandis que la superbe ligne de basse de Revolution’s a Lie nous rappelle JOY DIVISION. Sans oublier Hot Body Rub qui évoque curieusement le titre Little Red Riding Hood Hit the Road de Robert WYATT. Il subsiste néanmoins quelques morceaux moins marquants qui coupent un peu la dynamique de l’album. Menopause Man en est un exemple.

Before Today a cependant permis à Ariel d’acquérir une certaine légitimité : le fait qu’il se soit entouré de musiciens lui ouvre de nouvelles perspectives. On apprécie toujours autant sa capacité à rendre hommage à différents artistes et genres musicaux tout en gardant son empreinte musicale. Au final, c’est ce qui rend sa musique si singulière.

Alors, peut-on considérer que cet album rend hommage aux précédents tout en ouvrant la voie à une nouvelle ère. Jusqu’ici, il était considéré comme incapable de se détacher de sa configuration d’enregistrement jugée dépassée. Il avait pourtant de jolies choses à nous faire découvrir. C’est peut-être grâce à cet album que ses détracteurs pourront jeter un regard nouveau sur ses premiers enregistrements !