Le bon accueil fait à leur premier album Handsworth Revolution (1978) a permis à STEEL PULSE de bénéficier d’une large exposition médiatique, le groupe allant jusqu’à assurer la première partie de Bob MARLEY en Angleterre.
Et si le succès commercial n’est pas encore au rendez-vous, le groupe fait partie, avec leurs concitoyens d’UB40, d’une nouvelle vague de groupes britanniques mettant en avant Reggae et discours social virulent.
Cela permet au groupe de faire également les premières parties de XTC, des CLASH et de POLICE.

Une année plus tard, STEEL PULSE revient avec Tribute To The Martyr qui conserve cet ancrage Reggae, mais se montre un peu plus Pop que le précédent. Cette évolution est peut-être à mettre en parallèle avec le départ de Mykaell Riley qui assurait une partie du chant sur Handsworth Revolution et qui quitte STEEL PULSE pour 'divergences musicales'.
Clairement, Tribute To The Martyr représente une évolution vers plus de rondeurs et de mélodies. Les rythmiques sont moins marquées et, de ce fait, l’album est assez homogène avec des morceaux qui ne se démarquent pas énormément les uns des autres.
On peut y voir une évolution positive en considérant que, tout comme UB40, STEEL PUSLE se rend plus accessible et contribue à tisser des liens entre Rock et Reggae. Ou bien considérer que le groupe perd en singularité et évolue vers une musique moins typique et marquante.
Il est clair que le son très clair, les compositions mélodieuses et le chant plus consensuel de David Hinds contribuent à faciliter la diffusion de la musique de STEEL PULSE au-delà de la communauté Reggae.
Pour autant, contrairement à UB40, le groupe n’atténue pas son discours et, comme le suggère son titre, Tribute To The Martyr, contient des morceaux véhéments et engagés. La lutte contre les injustices et les inégalités est chére au cœur du groupe, et cela se reflète dans leurs textes.
Ainsi "Jah Pickney R.A.R." est un plaidoyer pour l’usage de l’art comme moyen de lutte, RAR signifiant Rock Against Racism. Alors que "Uncle Georges" évoque George Lester Jackson, un militant afro-américain membre du Black Panther Party et que "Biko’s kindred Lament" est un hommage à Steve Biko, une des figures de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud qui était décédé en prison deux années plus tôt. Il en va de même du morceau titre, un appel à la résistance et dont le final égrène les actions et les figures de la lutte pour la reconnaissance des droits de la population noire.
Mais ce mordant idéologique ne se retrouvant pas tout le temps au niveau musical, certains morceaux manquent d’un peu de relief et les surprises sont rares. Ainsi, le final de "Babylon Makes The Rules" tourne en rond en répétant le même texte et les mêmes phrases musicales de manière un peu indigeste. Il en va de même de l’introduction de "Uncle Georges" qui peine à décoller.
De manière générale, si les titres sont plaisants et entraînant, ils manquent un peu de piquant et de variété. Et mériteraient de bénéficier d’une rythmique un peu plus lourde et présente.
De ce fait, si pour beaucoup Tribute To The Martyr fait figure d’album marquant du groupe (sa pochette iconique y est peut-être pour quelque chose), notamment car il lui a permis de toucher un public plus large, je considère qu’il ne possède pas la puissance brute de Handsworth Revolution ni le côté dansant et entraînant que le groupe développera par la suite.