POLYGON WINDOW ou la première métamorphose Warpienne de Richard D. JAMES. A l’orée de 1993, Surfing On Sine Waves avait déjà brisé pas mal de crânes gonflés d’Acid-House. Partie intégrante de la légendaire série Artificial Intelligence, ce second L.P du plus loufoque des Cornouaillais donna un sérieux coup de fouet au label de Sheffield, déjà bien lancé par sa première compilation : Artificial Intelligence Volume 1. Puis, parce qu’un pseudo de Richard D. JAMES ne serait pas un pseudo de Richard D. JAMES sans l’inévitable E.P mystère qui change de tracklist d’une version à l’autre, Quoth vit le jour deux mois à peine après son illustre aîné.

Quoth, c’est d’abord un titre éponyme qui détonnait parmi les compositions apaisantes de Surfing On Sine Waves. Constitué uniquement de beats claquants et hypnotiques, véritable travail d’orfèvrerie rythmique, Quoth s’applique à rester dans le champ de la Techno pure.
Son remix, le "Wooden Thump mix", envisage assez bien ce que serait la Techno si les DJ n’étaient équipés que de simples battoirs. On imagine un régiment de petits soldats en bois (l’uniforme est jaune fluo, un sourire béat illumine leur face de chêne verni) battant la mesure sur leur petit tambour, tandis qu’un Dinosaure, l’air dinosauresque, s’avance en soufflant sa sale haleine de Dinosaure factice repu de PVC, prêt à bondir sur notre vaillante troupe. Bien sûr, le "Wooden Thump Mix" évoque principalement un ahuri s’agitant avec un wood block, mais pour une fois qu’on me donnait un budget pour des effets spéciaux, je n’allais pas cracher dessus.

Au rayon des titres vraiment inédits, POLYGON WINDOW sert aussi de la bonne tambouille. "Iketa" d’abord, qui n’a rien à voir avec le marchand de meubles suédois, incorpore un motif Trance dans ses boucles synthétiques et ses nappes de synthés, le tout entrecoupé du souffle rauque du lézard préhistorique cité précédemment (faut bien rentabiliser).
"Bike Pump Meets Bucket", quant à lui, oscille entre breakbeat et IDM naissant, dans un style assez nonchalant qui rappelle les deux Ventolin (voir APHEX TWIN) et l’album Expert Knob Twiddlers (voir MIKE & RICH). Ce dernier titre, évocateur lui aussi, s’accorde parfaitement avec l’image floue de Richard D. JAMES descendant les escaliers du Métro de Londres qui orne la pochette.
A noter que, comme tout E.P mystère qui se respecte, Quoth possède son lot d’éditions et de rééditions plus ou moins complètes. Passons sous silence les vinyles sans pochettes et autres joyeusetés et abordons directement le nerf de la guerre : les pistes cachées. Quoth, dans sa version CD originale, en possède une, que l’on nomme parfois "Hidden Mix". Celui-ci reprend le Quoth original à la sauce grésillements et pales d’hélicoptère, assorti d’un beat encore plus basique.

Au final, Quoth est un excellent compagnon de Surfing On Sine Waves, dans un registre assez différent toutefois. Œuvre atypique, c'est peut-être l’un des E.P de Richard D. JAMES qui rend compte le plus de l’aspect Techno de ses travaux, à côté d’autres formats courts antérieurs comme Digeridoo et Xylem Tube.