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B.O FILMS/SERIES

1982 Tenebre
 

- Membre : Bande Originale De Film
- Style + Membre : Goblin

SIMONETTI / PIGNATELLI / MORANTE - Tenebre (1982)
Par STREETCLEANER le 19 Novembre 2024          Consultée 114 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Il est toujours étonnant que certaines femmes s’entichent de serial killers, les visitent en prison, leur fassent des déclarations d’amour, cherchent à obtenir d’eux des relations sexuelles, alors que celles-là sont statistiquement les premières victimes de ces psychopathes. L’inverse est plus rare. Il faut dire que les femmes tueuses en série œuvrent plutôt dans le registre de la veuve noire et qu’elles ne fascinent pas autant les hommes ; et puis leurs armes sont généralement le poison, il faut avouer que c’est moins spectaculaire qu’une lame, le mobile est souvent celui de l’argent c’est-à-dire bassement matériel, tout ceci est bien moins sensationnel que la terreur, l’enlèvement, le viol, la nécrophilie, l’étranglement ou le meurtre à l’arme blanche. Bref, les femmes ne sont pas au niveau de l’exubérance meurtrière des hommes. La signature criminelle de ces derniers est d’ailleurs toujours plus captivante, comme leur vantardise, en témoigne par exemple l’affaire du tueur du Zodiaque à la fin des années 60.

L’arme blanche justement, plus précisément le rasoir, c’est l’arme fétiche du tueur ganté de Tenebre, film du cinéaste italien Dario Argento. Après Suspiria (1977) et Inferno (1980), le réalisateur met de côté le surnaturel et l’abstrait pour revenir en 1982 au ’giallo’ plus classique, mettant en scène un tueur détraqué qui voit dans le féminicide sa réponse pour purifier le monde de ces êtres pervers.
Tenebre est pour certains le dernier grand film d’Argento et je partage globalement cet avis, même si j’éprouve une certaine tendresse pour Phenomena (avec la séduisante Jennifer Connelly) et Le Sang des Innocents, très honorable giallo. Baigné dans une lumière froide et une architecture proche du brutalisme, Argento délaisse les couleurs vives et saturées de ses deux films précédents ; la réalité est crue, même la nuit est blanche.

Le tueur s’en prend toujours aux femmes et s’il arrive que des hommes meurent également c’est que, sans spoiler, l’affaire est plus complexe qu’il n’y paraît. Evidemment, le cinéaste nous place aux premières loges, le spectateur devient le tueur d’un instant, celui du meurtre, quand la caméra prend place en position subjective. Le giallo c’est ça, c’est pour les spectateurs pervers et voyeurs, parce qu’il faut le dire le tueur tombe pile-poil au moment où les femmes sont nues. Ben oui, le sexe, c’est mal. On appréciera ou pas cette forme de sexisme (avec laquelle le réalisateur joue quand, dans une interview, le personnage principal, l’écrivain Peter Neal, est accusé de mettre en scène le meurtre de femmes). Comme dans - presque - tout giallo qui se respecte, les troubles du meurtrier remontent à l’enfance (ici en tant qu’adolescent) et dans Tenebre on n’y échappe pas avec un tueur qui, par réaction, lave ses humiliations (à connotation sexuelle) subies pendant sa jeunesse en faisant couler le sang dans des accès de pulsion meurtrière. Le ’finale’ s’avère comme souvent dans les gialli le grand moment de révélation ; celui de Tenebre, fait de rebondissements successifs, est particulièrement choquant et sanguinolant, il s’agit d’une des meilleures scènes en la matière.

Pour la musique du film, c’est le groupe italien GOBLIN qui s’y colla, enfin plus précisément le cœur de son personnel, mais ses membres agirent sous leurs propres noms car le groupe s’était séparé en 1978 ; pour le film, les membres fondateurs décidèrent à nouveau de collaborer, mais de manière éphémère. Cette collaboration fait de Tenebre un film presque complètement italien (il a été tourné en Italie, en Italien, avec une équipe et des acteurs majoritairement italiens). En l’absence de batteur, ce sont uniquement des synthés, boîte à rythme et des samples qui furent utilisés.

La talent du groupe n’était plus à démontrer suite à ses partitions pour Suspiria et Zombie qui resteront dans l’histoire des musiques de films d’horreur. Pour Tenebre la reconnaissance fut moindre (à tort) et c’est le groupe JUSTICE qui remettra les pendules à l’heure, en 2007, avec la reprise du thème copieusement samplé ("Phantom part1/2").

La musique du thème "Tenebre", à base de 4 notes successives, est en grande partie infusée dans le disco, lui assurant une énergie et un côté dansant tout bonnement incroyables. Le groupe italien concentre en un seul titre ce qui a fait souvent la caractéristique des musiques des gialli et autres poliziotteschi, c’est-à-dire ’una combinazione’ d’instants d’insouciance et de moments de terreurs éruptifs qui surgissent sans crier gare. Mais là tout s’entremêle habilement dans un seul et même titre. Les claviers qui lancent la dynamique, la basse qui danse du feu de Dieu, collent excellemment au mouvement de la scène d’ouverture du pont de New-York, les percussions et des synthés crissants instillent la tension avant que les synthés ne reviennent sous forme d’orgue, question de dire qu’on n’est pas là pour le fun. De surcroît, si on y prête bien attention, on peut entendre le mot ’paura’ (peur en Italien) dès le début de "Tenebre" et qui vient d’un vocoder mutant en son de synthétiseur et se répétant par la suite ; le message est clair, c’est la peur qui nous attend. Le morceau "Waiting Death" en fin de face B n’est, quant à lui, rien d’autre qu’une reprise du thème auquel on adjoint un orgue et où on laisse s’exprimer un peu plus la basse, ce qui est une bonne idée tant sa ligne est dansante.

"Gemini" pourrait être qualifié de typique musique de film noir, angoissante, surtout dans sa première partie, avec une prédominance de l’électronique. Notons cependant que certaines sonorités ont un peu vieilli, ce qui est souvent le cas avec l’électronique de cette époque, d’autant plus quand on utilisait une boîte à rythmes.

"Slow Circus" a des allures de ritournelle issue d’une boîte à musique et cette façon de faire n’a d’autre but que de plonger le spectateur dans le passé, dans la jeunesse du tueur et les méandres de ses tourments.

"Lesbo" avec le thème repris à la guitare, façon arpèges, est étrangement ressemblant à celui que composeront plus tard CARPENTER et LANG pour le film sorti en 1995 In the Mouth Of Madness (ou L’Antre de la Folie en Français). Difficile d’imaginer que cette musique ne soit pas un emprunt tant elles sont ressemblantes. Là également, on ressent dans les moments les plus dansants du titre des influences disco. Mais comme sur "Gemini", certaines sonorités ont un peu jauni.

Le début de "Flashing" avec ses synthés crissants file le frisson et colle parfaitement avec l’univers mental torturé du maniaque, ses visions et déchirements qui altèrent sa santé mentale, c’est vraiment réussi ; lorsque le titre s’élance ensuite sur la base d’un séquenceur, il s’ensuit une jouissive combinaison de moments de mouvement (la poursuite avec une hache de la victime dans le film) et de frissons, la fin explosive étant digne de la folie d’un Suspiria.

La B.O de Tenebre est assez courte, environ 32 minutes (62 minutes au total pour certaines versions avec des bonus). Mais il est rare d'entendre des musiques aussi marquantes, cette B.O est un délicieux concentré de ce qui fonctionne : un thème haut en couleur et inoubliable, des moments angoissants qui se mêlent à d’autres moments carrément insouciants ou dansants, le tout sans que rien ne détonne. Et ce n’est pas facile. Beaucoup d’autres groupes, comme TANGERINE DREAM, ont aligné dans les années 80 de nombreuses B.O de films d’horreur ou d’action sans arriver à égaler le génie des Italiens. Cerise sur le gâteau, cette musique a la chance d’accompagner le dernier grand film d’Argento, Tenebre étant devenu la quintessence de ce genre cinématographique tombé en désuétude, le giallo.

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- Fabio Pignatelli (basse)
- Massimo Morante (guitares)
- Claudio Simonetti (claviers, vocoder, boîte à rythmes, piano, électro)


1. Tenebre
2. Gemini
3. Slow Circus
4. Lesbo
5. Flashing
6. Tenebre (reprise)
7. Waiting Death
8. Jane Mirror Theme



             



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