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MUSIQUE ÉLECTRONIQUE  |  COMPILATION

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1995 Psy Music - Reincarnation

Ian AYWON - Psy Music - Reincarnation (1995)
Par NANAR le 26 Décembre 2024          Consultée 160 fois

Avertissement
Cette chronique parle d’un gourou de secte ayant tenu des propos irrationnels, été incarcéré et potentiellement manipulé des adeptes. 'potentiellement' car au vu du peu d’informations disponibles sur cet individu, il est impossible de décrire exhaustivement son activité.

Contexte
Jean Arduin est né à Paris le 13 mai 1957 et décédé à Ayencourt le 26 novembre 2019. Sous le pseudonyme Ian AYWON, il était le 'gourou'* d’une secte messianique et prétendait être la réincarnation du Christ, sur la base de la révélation dite des Secrets de Fátima, que la Vierge Marie aurait annoncé à trois enfants de la ville portugaise de Fátima le 13 juillet 1917 (le 13 mai selon le site de Ian AYWON, si déjà il arrange les dates à sa sauce, on est mal barrés). Ian AYWON est selon lui-même (sur son site Internet personnel non sourcé) la preuve vivante de la réincarnation, et par là même l’incarnation de l’être que tous les fidèles de tous les cultes monothéistes ou polythéistes attendraient (donc pêle-mêle Jésus Christ, le messie judaïque, etc), qui apporterait la synthèse de la science et de la métaphysique. Est citée dans sa brève biographie une milliardaire japonaise, Masako Ohya, qui effectivement possédait de 1980 à son décès en janvier 1999 un château à Monchy-Humières dans l’Oise**, département où résidait Ian AYWON, et qui l’aurait présenté à la télévision japonaise comme le Wagner du XXème siècle. Il cite également l’un de ses amis, la plasticien Juan Ramirez, qui serait la réincarnation de Rembrandt – on voit l’un de ses dessins en couverture d’un des singles de Ian AYWON et euh… on est loin du compte.

Ian AYWON a été interpelé à son domicile par la police le 14 octobre 1994, mais aucune information supplémentaire sur cette arrestation ne semble être disponible. Par la suite, il a créé des comptes sur quelques sites : MySpace, Twitter, et Instagram sur lequel il a posté jusqu’à très peu de temps avant sa mort. En commentaire de sa fiche artiste et de la fiche d’un de ses morceaux "Cosmic Power 4" sur Bide Et Musique (ça ne trompe pas), Ian AYWON justifiait son statut d’artiste révolutionnaire par un bête sophisme : Richard WAGNER était un grand artiste, il a été conspué en France avant d’être reconnu, Ian AYWON serait un grand artiste et serait conspué en France (enfin surtout par la police), donc il serait reconnu à sa juste valeur dans le futur. Il allait même plus loin, en avançant que l’humiliation de Richard WAGNER (proche des milieux franc-maçons allemands*** mais grand maître de toutes les sociétés secrètes du XIXème siècle selon notre autoproclamé prophète) en France aurait été la cause indirecte des trois guerres entre la France et l’Allemagne. Ça fait peur.

Ian AYWON se prétendait donc être le meilleur musicien de tous les temps, de par l’expérience qu’il aurait accumulée au cours de ses incarnations successives – ainsi disait-il qu’un prince de la famille allemande Vun Thurn Und Taxis (ou La Tour et Tassis) adorait sa musique (donc celle d’une précédente réincarnation). Il affirmait [jouer] à très haut niveau de plus de quarante instruments et [chanter] en plus de trente langues. Alors, ce dernier point est manifestement un énorme bobard, le monsieur étant manifestement incapable d’aligner deux phrases syntaxiquement correctes en anglais; il suffit de voir son site personnel dont la version anglophone est totalement torchée avec le cul. Quant aux quarante instruments… ben on n’en verra pas le bout, puisque sur les 16 morceaux de sa compilation ainsi que les quelques autres issus de ses 45-tours en partie rendus disponibles sur YouTube – je n’ai malheureusement pas pu mettre la main sur les trois premiers "Cosmic Power" – , on entend surtout des synthétiseurs et des boîtes à rythmes, rarement du piano, voire de la guitare électrique le temps d’un seul morceau (ça fait deux instruments, c’est déjà ça) – nous y reviendrons.

Ian AYWON a égrené, entre 1984 et 1992, une douzaine de 45-tours aux éditions Katinis, tous sous la dénomination Psy Music, qui était supposée amener l’auditeur à un état de transe et que l’auteur distribuait plausiblement à ses adeptes. Vingt-quatre morceaux dont la moitié ont été compilés sur un album au format CD, avec quatre inédits; l’autre moitié étant disponible via YouTube ou Bide Et Musique (hélas sans toujours une qualité sonore convenable), il en sera également question dans cette chronique. Le bougre prétend avoir enregistré 2500 morceaux, mais seuls 28 ont été gravés sur disque, dont six qu’il a publiés sur son compte MySpace en 2007. Les titres de certains morceaux ("Vision 125", "Prélude 285", "Ritual Dance N°15") suggèrent effectivement une production importante, quoique avec ce genre de personnage, il faut se méfier. Bon, à défaut de diversité instrumentale, on peut toujours espérer une composition de qualité. Alors, Ian AYWON, Wagner du XXème siècle? meilleur que DEBUSSY et RAVEL réunis? Eh bien chiche!!!

Analyse
On peut diviser l’'œuvre' d’Ian AYWON en trois parties. Premièrement, les morceaux électroniques de 1984 à 1988, constitués de nappes planantes de type Juno avec plus ou moins de vibrato et de rythmiques électroniques obtenues avec des boîtes à rythme Roland (TR-909 ou TR-505 selon les morceaux). On dénombre six premiers morceaux publiés en 1984: "Universe 666", "Reincarnation" (le seul des six qui ait été réédité sur la présente compilation), "Vision 125", "Vision 91", "Apocalypse" et "Ritual Dance N°15". Tous sont improvisés. Ian AYWON y aligne des plans très stéréotypés : les mêmes tonalités, les mêmes suites d’accords, les mêmes montées chromatiques. L’intérêt mélodique est quasiment inexistant. Même constat pour "Galaxy 1" publié en 1988 en face B de "Cosmic Power 2". "Apocalypse" et "Ritual Dance N°15" commencent même de manière identique. Seul "XW 47" (face B de "Cosmic Power 1" en 1986 puis réédité) casse cette routine en proposant un thème plus sobre qu’à l’accoutumée.

Deuxièmement, changement de registre avec un lot de pièces ouvertement néo-classiques. Quelques-unes sont interprétées au piano solo : "Offrande N°2" est un succédané d’Erik SATIE sans intérêt aucun, tandis que les trois premiers "Préludes" (n°29, 52, 53 et 203) sont relativement convaincants, démarrant chacun sur un thème de style romantique avant d’évoluer vers des développements grandiloquents mais qui ont le mérite d’être maîtrisés, au contraire de la plupart des morceaux électroniques. Deux autres sont interprétées sur synthétiseur avec des sons émulant des instruments classiques. "Prélude 281" est un thème d’inspiration baroque avec un son de cuivres pas très crédible. Je lui préfère le plus expressif "Prélude 285" où Ian AYWON pousse le développement néo-romantique de ses précédents "Préludes" à son paroxysme.

Troisièmement, d’autres morceaux électroniques publiés à partir de 1989, où aux nappes de Juno s’ajoutent un synthétiseur Roland D-50 et une boîte à rythme Roland R-8. Les cinq "Cosmic Power" (3 à 7) se veulent rythmés et percutants, tandis que les six "Classic" (1 à 5 puis A1) sont plus planants. Hélas, on retombe dans la déroulade la plus complète : de l’improvisation totalement dévertébrée, qui ne mène nulle part. L’inspiration néo-classique des "Classic" est nettement plus diluée et moins sérieuse que celle des "Préludes". Toujours ces tierces, ces accords, ces montées et descentes incessantes, dans une combinaison hasardeuse de prises directes et de séquences programmées. C’est non seulement peu inspiré mais aussi grossièrement pompeux. Pas grand-chose à sauver à l’exception peut-être de "Cosmic Power" 5 et 7, et "Classic A1", même si ce dernier n’est qu’une version améliorée de "Classic 2". Au pire du problème, "Cosmic Power 6" est une véritable catastrophe sonore, au mixage dégueulasse et aux soli de guitare électrique sans queue ni tête. C’est la seule fois que l’on entend Ian AYWON jouer de la guitare et c’est bien dommage.

Cette musique est somme toute à l’image de son auteur : en totale roue libre, sans aucune direction artistique, répétant inlassablement des stéréotypes musicaux éculés. Ian AYWON est pourtant doué aux claviers, faisant parfois montre d’une excellente technique, et se révèle étonnamment beaucoup plus inspiré dans le néo-classique (un registre pourtant casse-gueule, cf. Sofiane Pamart) que dans l’électronique (hormis les "Préludes" 281 et 285). Autre chose étrange, alors que Ian AYWON semblait être habité d’une ambition démesurée, tous ses morceaux, du moins ceux qu’il nous a donnés d’entendre, ne durent qu’entre trois et cinq minutes. Ajoutons qu’il n’a pas particulièrement soigné la présentation de sa musique : outre la partialité de cette réédition, on note une playlist d’un désordre total. En conclusion, l’arrogance d’Ian AYWON et sa prétention à vouloir révolutionner la Musique prêteraient à rire s’il n’était pas autant enfoncé dans un délire mystique potentiellement dangereux pour ses fidèles.

* Ce terme hindi désigne les maîtres spirituels hindous mais est souvent mésusé, surtout dans les médias, pour désigner n’importe quel chef de communauté considérée comme douteuse.
**https://business-et-finances.com/les-milliardaires-excentriques-en-voie-dextinction/
***https://richard-wagner-web-museum.com/publications/wagner-et-la-franc-maconnerie/

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- Jean Arduin (je suis ton père)


1. Classic 4
2. Cosmic Power 5
3. Classic 3
4. Offrande N°2
5. Prélude 29
6. Classic A1
7. Classic 5
8. Cosmic Power 7
9. Xw 47
10. Classic 2
11. Classic 1
12. Prélude 281
13. Prélude 285
14. Prélude 203
15. Cosmic Power 6
16. Reincarnation



             



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