En Australie, il n'y a pas que MIDNIGHT OIL, INXS ou THE CHURCH. Il y avait aussi BAT NOUVEAU. Je plaisante naturellement car vous vous doutez bien que le groupe qui nous concerne ici ne joue pas dans la même cour. Il n'avait sans doute pas d'ailleurs vocation à dépasser les limites de Brisbane, sa ville d'origine. Et pourtant à l'heure d'internet et de la profusion d'informations, on peut tomber au gré de ses écoutes nomades et le hasard aidant encore plus, sur des projets qui méritent vraiment que l'on s'y attarde. BAT NOUVEAU, c'est de l'underground à l'état pur. Une micro édition en CD pour le Japon, puis un vinyle tiré à quelques exemplaires, une poignée de concerts donnés par le duo dans les bars de sa ville, puis c'est tout.

C'est évidemment ce qui fait pourtant, encore et toujours, le charme de cette scène. La passion est d'autant plus récompensée lorsqu'on a le plaisir de découvrir un album de cette qualité. Metamorphoses se présente en effet comme une pertinente synthèse de ce qui se faisait de mieux en 2015 en matière de musique sombre. Il est évident que les Australiens apprécient la vague froide qui a sévi en Angleterre dans les années 80, BAUHAUS, THE CURE et THE CHAMELEONS en tête, mais pas seulement. BAT NOUVEAU semble également désireux d'épouser les ambiances poisseuses chères aux Américains de CHRISTIAN DEATH et c'est forcément un bon point pour les corbeaux que nous sommes. Ce name-dropping pourrait avec crainte faire croire néanmoins à un projet ersatz.

A tort, car le duo n'est pas pour autant un Tribute Band. Il insuffle en effet à ses compositions une fraîcheur et une attraction immédiates. Le jeu de guitare mélancolique à la pâle luminosité sur "Funeral Eyes" ou "Ghosteps" emmène l'auditeur quelques secondes Manchester ou Crawley, mais c'est bien à Brisbane que tout se joue en définitive. Les Australiens se présentent à nous comme de véritables JANUS. C'est un peu déstabilisant à vrai dire au début car on a l'impression d'avoir à faire à plusieurs projets. BAT NOUVEAU alterne donc sans difficulté majeure pop froide et moments développant une tension plus prononcée. Todd Manion avec sa voix grave insuffle ce qu'il faut d'orthodoxie gothique à l'image de l'excellent "The Cry" tout en guitare tranchante.

Cette volonté de diversifier les ambiances pourrait créer encore une fois un sentiment de confusion pour le public mais la qualité mélodique rassure car elle se présente à nous comme un fil conducteur. BAT NOUVEAU s'aventure ainsi sans complexe sur des terres gelées ("Lillies II") où les claviers distillent des ambiances de givre. Un tout petit pas de côté et nous voici en Californie coincés entre les palmiers et les crucifix. La guitare typiquement death-rock du plus bel effet qui enveloppe "Our Black Day" ou la rythmique enlevée de "Dust" insufflent une sombre énergie à ces morceaux trempés dans l'urgence et la sueur. Le théâtre de la douleur, même en Australie, c'est bien aussi ("Slowburn").

Même si globalement les musiques sombres ont connu des jours plus cléments, certains albums nous apparaissent comme de belles éclaircies. Metamorphoses à travers son approche variée et solide en est un très pertinent exemple.