Ouvrez la bouche, tirez la langue. Mouais, ce n'est pas bien joli tout ça. Respirez fort par la bouche. Et ces réflexes, qu'est-ce que ça donne ? Mais vous êtes bon pour la casse mon vieux ! Je ne vois pas bien ce que je vais pouvoir faire pour vous... A moins que... attendez, que je regarde au fond de mon étagère... Entre mes vieux exemplaires du Vidal... Oui, il me reste bien un peu de ce remède miracle, mais... je n'ose pas vous le prescrire, je n'ose plus... il a causé bien trop de dommages, aux cervicales surtout. Enfin, vous m'avez l'air bien mal en point. Une nouvelle tentative, peut-être que... Allez, prenez donc quelques gouttes du TRAITEMENT.

Ou, dit dans la langue du pays d'origine du groupe, The TREATMENT. Depuis 2008, les Anglais font résonner les vieux murs de leur cité de Cambridge au son d'un hard rock qui a connu son âge d'or avant la naissance des musiciens qui composent le groupe. Portée par une vision, celle de faire revivre le classic-rock de ses parents dans sa gloire et sa majesté, la formation n'a pas chômé, luttant contre les aléas et les changements de musiciens et de chanteurs, et s'est construit une belle discographie riche de six albums autour des deux membres fondateurs restants, le guitariste Tagore Grey et le batteur Dhani Mansworth.

Lorsque le groupe publie en 2024 sa sixième réalisation, Wake Up The Neighbourhood, il jouit alors d'une période de stabilité inédite qui lui a permis de se reposer sur un line-up solide, à partir duquel la musique de The TREATMENT a pu évoluer pour prendre une ampleur inédite. Riche de ses tournées avec KISS, MÖTLEY CRÜE ou encore SLASH, le groupe propose ici un album qui fleure bon la nostalgie, tout en évitant le passéisme. "Nous voulions créer un album qui rende hommage à l'âge d'or du rock'n'roll tout en y ajoutant une once de modernité", déclarent alors les musiciens. Et pour le coup, ils n'ont pas menti. S'éloignant légèrement de ses influences de jeunesse, qui portent essentiellement comme nom AC/DC, The TREATMENT poursuit l'élargissement de son spectre musical pour, tout en restant irrémédiablement sur des bases blues.

Wake Up The Neighbourhood est le témoignage d'un hard rock décomplexé, dépourvu d'arrangements complexes. Les Anglais, avec désormais un beau bagage derrière eux, ne se font pas prier pour balancer quelques riffs bien sentis, portés par une production volontairement un peu "crade", qui apporte à la musique du groupe une belle authenticité. Pouvant rappeler la démarche de leurs compatriotes The WAYWARD SONS, les musiciens de The TREATMENT balancent des morceaux portant en leur sein cet ADN issu des années 70 et 80. Ainsi tandis que "Back to the 1970's", hommage à cette décennie bénie pour la création musicale, est très proche des ambiances de "Sweet Home Alabama" de LYNYRD SKYNYRD, le refrain de "Fire Me Up" rappelle pour sa part celui de "Bad Medicine". Ce sont à ces clins d'œil savamment placés que l'on doit cette impression de connaître le groupe depuis longtemps, d'avoir l'impression qu'il fait partie de notre spectre musical depuis toujours. "Man on the Highwire", sans doute le titre le plus percutant de l'album avec son riff gras et sa rythmique pachydermique, vient nous poser la main sur l'épaule comme un rassure un ami, tandis que "Don't Make No Difference", gros rock'n'roll pouvant rappeler BONFIRE et porté par un refrain émulant les frères Young, est du miel pour nos oreilles.

Le TRAITEMENT est universel, ne requiert aucune posologie, et se fait finalement un placebo qui nous laisse croire que le "classic rock", comme on l'appelle désormais, n'est pas encore un vestige du passé. Avec conviction et talent, et une bonne dose de savoir-faire dans l'écriture de cette douzaine de titres hard rock imparables, cinq rockers anglais viennent de nous l'administrer pour notre plus grand plaisir.