Formé en 2016 aux Etats-Unis par la chanteuse María Zardoya et le batteur/producteur Josh Conway, The MARÍAS peut faire penser par bien des aspects à notre fleuron français L'IMPERATRICE. Que ce soit par le parcours, avec deux E.P prometteurs et un premier album légèrement en-deçà, mais surtout par le style : une pop sophistiquée dominée par une voix féminine ajoutant une touche de sensualité et marquée par l’alternance entre anglais et langue maternelle. Si tous les autres musiciens du groupe sont américains, María d’origine portoricaine n’hésite pas à hispaniser aussi bien les textes que la musique, apportant une part d’originalité bienvenue.

Je n’avais pas beaucoup d’attente à la sortie de ce deuxième album, mais j’ai été petit à petit agréablement surpris par sa richesse. Il réussit à remplir le critère le plus essentiel d'un bon album de pop : être marquant, et c’est précisément là que son prédécesseur avait échoué. En fin de compte, c’est au nombre de mélodies qui nous ont trotté dans la tête que l’on juge ce type d’album, et c’est la grande force de Submarine qui arrive avec une flopée de morceaux percutants, à commencer par ”Run Your Mouth” avec sa basse endiablée et son refrain imparable, moderne mais sans trop tomber dans la soupe.

De ce point de vue néanmoins, le groupe fait un léger retour en arrière : s’il avait tenté une certaine modernisation/épuration de son style lors des premiers titres de Cinema, le reste de Submarine suit un style plus proche de celui des E.P, et on ne peut que s’en réjouir. On peut cependant déplorer sur ces deux albums la quasi absence de trompette, alors qu’elle donnait une coloration particulière et très sympathique aux E.P. du groupe.

Mais le plus important est là : l’inspiration. “Echo”, “Run Your Mouth” et “Love You Anyway” sont de vrais tubes qui dynamisent efficacement l’album, notamment ce dernier avec son refrain tout simple mais tellement satisfaisant (le genre de morceau qui fait se sentir supérieur dans la rue sans aucune raison). Celui de “Real Life” lui ressemble d’ailleurs assez mais finit plus délicatement dans une sorte de bégaiement délicat de María, dont l’omniprésence indique clairement l’importance qu’elle a dans la direction artistique du groupe à l’instar d’une Dolores O’Riordan des CRANBERRIES.

Les morceaux moins marquants sont loin d’être inintéressants : “Ride”, “Hamptons” et “Vicious Sensitive Robot” développent des ambiances plus électroniques avec notamment l’utilisation de la boîte à rythmes et d’effets sur les voix, tandis que María rappelle ses racines portoricaines sur “Lejos De Ti” et “Ay No Puedo”.

Et nous voilà maintenant au clou du spectacle, ce qui en fait réellement un excellent album : “No One Noticed” est le single ayant rencontré le plus de succès et on le comprend facilement : une ballade simple en apparence où la voix douce et mélancolique de María se pose sur une instrumentation éthérée avant de se mêler à ses propres chœurs dans un final non moins délicat. Enfin, “Paranoia” est clairement le chef-d’œuvre sous-estimé de l’album. Son refrain est un pur ovni qui obsédera systématiquement quiconque aura la présence d’esprit d’aller y jeter une oreille. La mélodie la plus recherchée de l’album est aussi la meilleure, comme quoi une bonne progression d’accords peut toujours faire la différence !

L’album se conclut sur une belle inspiration, “Sienna”, avec sa mélodie envoûtante que l’on a l’impression d’avoir déjà entendue quelque part mais qui fonctionne à merveille.

Ainsi, les MARÍAS prouvent avec cet album abouti qu’ils ont tout à fait leur place au sein de la nouvelle génération de pop rêveuse aux côtés des MEN I TRUST, VANSIRE et même BILLIE EILISH dont ils assurent d’ailleurs les premières parties de sa dernière tournée (en espérant que le public parvienne à distinguer la voix des deux chanteuses). Reste que ces groupes semblent présenter à peu près tous le même défaut, et les MARÍAS ne font pas exception. On peut en effet reprocher à leur musique ce côté monolithique qui a tendance à noyer l’auditeur dans une masse trop uniforme pouvant facilement rendre l’écoute ennuyeuse. Heureusement, cet aspect-là est largement compensé par la qualité des mélodies et la cohérence de la production qui plonge dans des ambiances aussi aquatiques que la pochette énigmatique de l’album. Mais pour la prochaine fois, le groupe devrait vraiment diversifier son style pour rendre sa musique plus marquante. Un retour de la trompette peut-être ?