Mike PATTON aime les années en « 8 ». Né en 1968, sa carrière débute en 1988 et inaugure une première période passionnante. En 1998 le bonhomme décide de voler de ses propres ailes, co-fonde le label Ipecac (sa meilleure idée depuis 10 ans) et lance une série de projets. Dix ans plus tard le bilan est mitigé. Si certaines expériences ont enthousiasmé, d'autres ont déçu.

Plusieurs raisons peuvent être invoquées. Mike PATTON est d’abord reconnu pour son travail vocal exceptionnel, or celui-ci s’est peu renouvelé et a fini par lasser. Ensuite, l’artiste n’est jamais aussi bon que quand il met ses compétences au service d’un collectif. Son désir de tout contrôler a révélé ses limites dans certains domaines. Enfin, l’homme a choisi de mener sa carrière sur le modèle John ZORN – à savoir être un artiste à projets – privilégiant parfois la quantité sur la qualité et rendant peu lisible sa démarche artistique.

Parmi ces projets on trouve PEEPING TOM, auquel je n’ai su trouver d’équivalent zornien. Il semble que cette entité soit le projet commercial de l’artiste. Soft, simple, accrocheur et une brochette d’invités prestigieux à la clé : MASSIVE ATTACK, AMON TOBIN, COOL KEITH ou Norah JONES. PEEPING TOM accueille de nombreux artistes dans le but de créer une musique riche et variée. Ceux-ci viennent toutefois majoritairement du hip-hop et du trip hop que le disque vide de leurs aspects revendicatifs pour ne garder que les éléments musicaux. Drumline, DJ-ing et MCing sont ainsi intégrés à une écriture pop. On sait les accointances patonniennes avec le genre, on sait aussi qu’Ipecac a pris sous son aile quelques belles cylindrées comme DÄLEK, dont l’ombre plane sur « Gataway ». De ce point de vue, le disque propose une fusion pop/hip-hop qui pourra séduire ceux que le genre a toujours horripilés.
PATTON compose quasiment tout. Quelques passages rappellent FAITH NO MORE (Mojo) et si l’on ferme les yeux sur quelques détails, on y trouvera des compositions au dessus de la moyenne et des arrangements sans faute de goût. C’est bien ficelé, maîtrisé et excellemment produit mais pas transcendant pour un sou. Si son consensualisme déplaira à certains, ce disque manque justement d’immédiateté au regard de ses objectifs et s'adresse à un public déjà conquis. Ce projet à pour l'instant le cul entre deux chaises, à l'image de ma note qui lorgne vers le 3 mais restera à 2.

« Peeping Tom » s’écoute avec plaisir, se prête volontiers aux réécoutes régulières mais ne laisse aucune trace. Reste à savoir si le projet qui lui donne son nom saura évoluer ou s’il tombera dans l'oubli. Gageons que l’année 2008 marque pour Mike PATTON le début d’une nouvelle ère moins dispersée et surtout plus personnelle.