A l’heure qu’il est, Reid DUNN, alias WISP, doit être un musicien heureux. En effet, après avoir traîné ses guêtres sur le réseau des petits labels pendant cinq ans, le label Rephlex, qu’on ne présente plus, a enfin daigné porter son regard verdâtre sur les compositions mélodiques de l’artiste tout droit venu des chutes du Niagara (si, si, je vous jure !). L’homme, bien connu des internautes pour avoir permis la publication gratuite de ses premières œuvres sur Internet, fait donc son entrée dans la cour des grands, au côté de… au côté de… Jodey KENDRICK, l’autre recrue 2008 du label, complètement inconnu celui-ci, au point que certains l’ont soupçonné de n’être qu’un énième pseudonyme de Richard D. JAMES (ce qui est faux, bien entendu).

Revenons à WISP : le rouquin américain, déjà soutenu par de nombreux fans d’IDM, peut se permettre d’arriver l’esprit tranquille sur le prestigieux label. Mieux encore, il peut se payer le luxe de sortir un EP en série limitée, comme les grands. La chose a pour nom Katabatic et sort le 12 décembre 2008 sur Rephlex. Le site du label annonce également un album pour le printemps 2009 : The Shimmering Hour. Tout cela est fort bien rodé.

Ô joie transcendante ! Ce nouvel EP apparaît plutôt bon, alors même que je n’attendais rien de WISP, qui a le tort, selon moi, d’offrir une IDM franchement aseptisée et du coup, terriblement facile. Mais voilà, sa musique mélodieuse passe-partout, Reid DUNN la produit d’une main de maître. Cet EP possède sans doute l’un des meilleurs sons, ou plutôt, l’un des sons les plus « propres » qu’il m’ait été donné d’entendre sur le label. Ça coule de sources, les synthés ne dérapent jamais, les pseudo cordes sont utilisées à bon escient et la boîte à rythme, bien que discrète, s’intègre parfaitement au reste. Les deux premiers titres de chaque face, « Hexenringe » et « Katabatic », illustrent parfaitement cette recette minutieusement appliquée, pour un résultat assez entraînant, mais tellement conventionnel.

Cependant, il ne s’agit pas d’intenter un faux procès à WISP. Celui-ci n’a jamais prétendu à l’originalité ni au bouleversement du genre, ce qui est un peu dommage quand on prétend faire de la musique un tant soit peu expérimentale. Mais bon, il faut bien avouer qu’une large frange de la scène IDM se contente de plaquer des mélodies rêveuses sur des rythmes qui n’ont plus grand-chose d’abrasif, pour un résultat certes efficace, mais qui manque cruellement d’inventivité. WISP est juste le fer de lance de cette mouvance un peu frileuse, et il faut quand même lui reconnaître un certain talent quand il s’agit d’élaborer des mélodies qui font mouche. Ainsi, « Cultus Klatawa » et « Summoner’s Hollow » bénéficient chacun d’une mélodie imparable, exécutée au synthé ou aux pseudo cordes. Enfin « exécutée », le terme est impropre, puisque la musique de WISP a sans doute été composée sur un logiciel, à partir d’une banque de sons… A moins qu’il n’ait branché son propre synthé sur son ordinateur… Je réclame l’intervention d’Hercule Poirot pour éclaircir ce mystère !

Bon, on ne va pas reprocher à WISP de proposer une rythmique aussi pauvre (ah ! les miracles de la prétérition !), puisque de toute évidence, il a fait le choix de se concentrer sur la mélodie, pour proposer une musique aérienne et contemplative, genre dans lequel il excelle. Pari réussi de ce côté-là. Par contre, si appâter le fan avec un EP en nombre limité me paraît de bonne guerre, je trouve quand même inouï de proposer quatre titres qui vont se retrouver six mois plus tard sur l’album. Du coup, l’intérêt de cette première sortie apparaît trèèèès limité.