Troisième géant du Neo-Folk, SOL INVICTUS est pourtant plus jeune que ses deux grands frères, Death In June et Current 93. Fondé par Tony Wakeford, cette entité s’est formée autour de cet unique membre permanent – comme les deux autres grands groupes cités plus haut – et a crée une sensibilité personnelle à ce mouvement, le Neo-Folk, aussi provocateur que fascinant.

Après le Peaceful Snow de Death in June, entièrement au piano, et le Honeysuckle Aeons de Current 93, album assez insaisissable, on peut de demander si le Neo-Folk (ou Dark Folk) ne s’est pas trop assagi. Mais c’est sans compter sur SOL INVICTUS et sa nouvelle offrande.
On retrouve les ambiances lourdes, flirtant avec le gothique, chers au mouvement. Rythmiques martiales, guitares folks épurées mais touchant toujours la corde sensible, claviers ambient glaçants, et chants incantatoires sont bien au menu. Mais il faut aussi noter la présence de guitares électriques, de violons et de flûtes qui donnent à l’ensemble une touche médiévale ou celtique très prononcée.

Ce « Mois le plus Cruel » semble être Avril, un Avril pluvieux, comme le suggère le premier titre, sombre à souhait, violent même. On comprend pourquoi le Neo-Folk est aussi appelé « Apocalyptic Folk » ! Et tout l’album se construit de cette manière, alternant douceur menaçante et explosions quasi-religieuses. Comme toujours chez SOL INVICTUS, l’ensemble est très homogène. Il est frappant de voir comme cette musique est simple de construction, mais richissime par ses arrangements, opérant un savant croisement entre minimalisme et complexité.

Bien plus qu’avec DIJ ou C93, les albums de SI sont des blocs d’où il est difficile de sortir une chanson du lot. On écoute du début à la fin, sans jamais zapper, au risque de briser la cohérence et l’esthétique de l’ensemble. Ici le deal est simple, si on aime, on aime tout. Si on n’aime pas, ce n’est pas la peine d’insister.

Cependant en s’imprégnant longuement de ce long disque (presque une heure au compteur), on réussit à trouver des titres qui se démarquent légèrement du reste, comme l’introduction « Raining in April », redoutable entrée en matière, ou « April Rain », morceau le plus celtique du disque et unique instrumental. « Cruel Lincoln » est la pièce maîtresse de l’album avec ses 8 minutes et sa première partie délicate aux vocalises moyenâgeuses, et sa deuxième partie plus sombre et rageuse, où les violons se déchaînent tandis qu’une voix terrifiante hurle « Blood !! » par instants. Le morceau-titre se distingue par une superbe intro à la flûte et une rythmique plus entraînante. Quand au final « The Blackleg Miner », il renoue avec l’apocalypse de « Raining in April », de façon grandiose et angoissante.

The Cruellest Month est un album qui définit a merveille le Neo-Folk, de par ses climats sombres, gothiques, aux influences celtiques. Et la pochette, superbe, reflète elle aussi très bien l’ambiance du disque, avec cette créature mi-homme mi-corbeau ... Là où Death in June et Current 93 semblent s’assagir, la troupe de Tony Wakeford n’a rien perdu de sa noirceur originelle. SOL INVICTUS ne signifie pas « Soleil Invaincu » pour rien …