Le punk celtique est un style musical en souffrance. Le ressasser et le déplorer en ces colonnes est devenu une triste habitude de la part de votre serviteur. Asphyxié par l'apparition d'un nombre incalculable de groupes aux idées aussi courtes que leur kilt, le genre n'en finit plus de se discréditer, son foisonnement n'étant malheureusement pas proportionnel à sa qualité. Dans ce contexte, l'apparition d'un nouveau groupe un tant soit peu intéressant est un petit exploit en soi. Certes, l'auditeur n'est jamais à l'abri d'une bonne surprise (Sir Reg, Lexington Field et Paddy and The Rats notamment ces dernières années), mais le constat est sans appel : pour survivre, les artistes pratiquant le punk celtique doivent évoluer d'une manière ou d'une autre, en radicalisant leur propos ou en évoluant vers un univers plus rock.

C'est la première de ces deux options qu'a choisi DRINK HUNTERS, jeune groupe espagnol originaire de la Catalogne. Après la parution d'une démo 4 titres en 2009, le groupe propose fin 2011 un premier album riche d'une ferveur punk totalement débridée. Qualifié de « Real McKenzies sans les cornemuses », le groupe tire son influence principale de la scène punk californienne, et se rapproche bien plus du son de NOFX et de Offspring que de celui des Pogues. Un banjo, un violon et un accordéon viennent enrichir l'énergie électrique du groupe, dont les thèmes de prédilection tiennent autant de l'hédonisme assumé que de la satire sociale et de la boutade humoristique (« She was 56 », ou l'histoire d'amour improbable entre un jeune homme et une « cougar », sur fond d'accordéon sautillant et de chœurs fédérateurs).

Pied au plancher, DRINK HUNTERS déploie son arsenal punk survitaminé. Si les morceaux suivent tous plus ou moins une structure identique (intro « folklorique » lancinante, puis déploiement de la guitare électrique et d'une section rythmique endiablée), les 13 titres de With My Crew se font suffisamment convaincants et accrocheurs pour ne pas paraître redondants. Chacun des morceaux ici présenté pourrait servir de titre d'ouverture... Mais si, vous savez, ce titre imparable que les groupes placent en début d'album pour donner l'impression d'un talent sans bornes). Car si « Welcome to happiness » frappe fort d'entrée, avec ses riffs agressifs et ses mélodies imparables, ce morceau façon « Offspring et son accordéon » n'est pas le seul argument de l'album : « It's in your head », rageur et débridé, « All night drunk », festif avec son banjo rappelant « Ring of fire » (Johnny Cash), « In my head », agressif et sans concessions, sont autant de réussites qui, disséminées dans l'album, tirent celui-ci vers le haut et en font une indéniable réussite.

Sans réel point faible, With My Crew parvient à faire souffler un vent de fraîcheur bienvenu dans une scène punk celtique qui a bien besoin de ce renouveau salvateur. A apprécier entre amis autour d'une bonne mousse, en se disant que si c'était mieux avant, l'avenir nous réserve peut-être de belles choses. Pourvu que les DRINK HUNTERS en fassent partie !

"It's in your hands" sur Youtube : http://www.youtube.com/watch?v=1h6s8t1b6NI&list=UUWuHqYvutv2x5vT4h_Mf8Mg&index=7&feature=plcp