Alors que Bobby Womack fait un come-back très attendu en juin avec la sortie d’un nouveau disque déjà porté au pinacle par certaines critiques, il paraît opportun de revenir sur les origines de cette légende de la soul, formidable songwriter et superbe interprète.

Il était une fois un jeune garçon noir né à Cleveland dans l’Ohio en 1944. Elevé dans l’amour de Dieu par un père pasteur et musicien, Bobby montre très tôt un talent inné pour la guitare. Avec ses frères et ses parents, il part en tournée chanter le gospel. Repéré par le populaire Sam Cooke en 1956, le groupe signe un contrat avec le label de l’ex-leader des Soul Stirrers quelques années plus tard. Sam Cooke qui est devenu une star de la soul encourage les frères à quitter l’univers du gospel, ce qui n’est pas pour plaire au père Womack. Et le succès commence à pointer le bout de son nez. « It’s All Over Now » co-écrit par Bobby devient un hit des Rolling Stones en 1964. A la mort de Sam Cooke, alors que les frères Womack sont bouleversés, Bobby décide de poursuivre seul la route vers la gloire. Sa carrière commence alors dans l’ombre des géants : certaines de ses compositions sont reprises par Wilson Pickett, tandis qu’il participe à certains albums d’Aretha Franklin, Sly and the Family Stone et Janis Joplin.

Après quelques albums solo sortis sur le label Minit, il signe pour United Artists et enregistre Communication, qui marque son ascension vers des cieux auréolés de célébrité et de réussite artistique. Le disque ne comprend que huit morceaux ou plutôt huit diamants, polis avec soin par Bobby Womack qui n’a pas lésiné sur la qualité des arrangements. Album éclectique qui brasse funk, soul et pop, Communication propose un programme varié apte à séduire un large public. A noter la présence dans le chœur des Womack Brothers.

Il frappe dur d’entrée de jeu avec un morceau de funk poisseux qui lorgne presque vers le rock. Rythme lourd, guitares rugueuses, cuivres incisifs, ligne de chant musclée, tous les éléments sont réunis pour annoncer la couleur d’un album influencé par James Brown. Eh bien non, Bobby Womack aime les contrastes et enchaîne avec la douceur sucrée « Come L’amore » aux mélodies charmantes et lyriques. Les cordes et les chœurs féminins, dont fait partie l’actrice Pam Grier se joignent à un Bobby Womack fougueux qui propose une interprétation très sensible. Dans la même veine, la reprise de « Fire and Rain », teintée de pop, se prête parfaitement au timbre très émouvant de Bobby. Il met également du cœur à l’ouvrage sur « (If You Don’t Want My Love) Give It Back », chanson qu’il appréciait tout particulièrement. Sur l’ensemble du disque, Bobby Womack dévoile un goût prononcé pour les refrains irrésistibles, à l’image de celui de « Everything is Beautiful ».

Le monologue central qui précède la reprise intense de « (They Long To Be) Close To You » permet au chanteur de changer une fois encore de registre. Isaac Hayes avait popularisé à la fin des années soixante la pratique du parlé/chanté que Bobby Womack exécute ici avec une certaine grâce. Il réutilise en partie cette technique avec le grand succès « That’s The Way I Feel About Cha », ballade finement écrite qui a cartonné dans les Charts. En conclusion, Bobby Womack reprend un morceau qu’il avait déjà enregistré avec ses frères quelques années auparavant, « Yield Not To Temptation », qui enveloppe la fin du disque d’un parfum de gospel.

Superbe album, Communication annonce une carrière riche pour le jeune Bobby Womack qui confirme ce succès dès l’album suivant, Understanding, autre grande réussite.