Pas facile de dénicher de jeunes talents, surtout depuis l’arrivée d’Internet qui a tout perturbé en noyant les pauvres auditeurs que nous sommes sous une avalanche de groupes plus ou moins talentueux. Heureusement, les chroniqueurs que nous sommes, trient à votre place et exposent leur avis éclairés sur ce qui est ancien et nouveau.

D’accord je me jette des fleurs, mais quand je réussis à découvrir une jeune pousse attachante grâce au webzine le plus antipathique qui soit (Pitchfork), cela mérite d’être célébré. Pourtant, je me dois d’aiguiser mon sens critique malgré tout. Car si CHARLI XCX est une jeune fille prometteuse, elle n’échappe pas au syndrome récurent des groupes encensés par l’autre site concurrent.

True Romance est sympathique, mais il démontre aussi que cette chère Charli (Charlotte Aitchison de son vrai nom) est surtout une chanteuse à singles. Il n’y a pas de quoi se flinguer sur cette rondelle en plastique (sauf si on n’adhère pas du tout à la musique), mais elle se révèle inégale avec beaucoup de chansons sympathiques mais anodines et du médiocre (« What I Like », dont le choix en tant que single m’étonnera toujours).

Passé cette première déception, il ne reste plus qu’à se plonger dans la musique et là, il va falloir que je fasse un tri dans mes lecteurs tant ce True Romance risque de ne pas faire l’unanimité. Comme CRYSTAL CASTLES, on se retrouve devant une tentative de faire un lien entre le mainstream le plus putassier qui soit et l’indé dans ce qu’il a de plus original. Un mélange évidemment hideux sur le papier, mais qui peut devenir savoureux quand un talent et un caractère sont présents. Charli joue les divas mais celle de deux mondes différents : la musique gothique et le R&B contemporain. Pour être plus clair, CHARLI XCX c’est RIHANNA pour ceux qui n’assumeraient pas d’écouter du FM.

Certes, la comparaison fait peur. Va-t-on survivre à cette avalanche de mauvais goût et surtout, survivre socialement quand on annonce ses affinités pour cette musique (ce qui est en vérité, le véritable problème de beaucoup de personnes) ? Contre toutes attentes, oui, on peut avouer qu’on aime CHARLI XCX. Car à travers cet emballage clinquant, un charisme se dégage (la voix de Charli étant bien plus séduisante que bon nombre de chanteuses qu’on nous inflige quotidiennement) et bien entendu, les chansons sont bonnes.

Dream pop spatial (« Lock You Up »), darkwave étouffante (« Stay Away » et « How Can I ») R&B mutant (« You're the One ») ou hit dance pop gothique (« Nuclear Seasons »), il y a en décidément pour tous les goûts. Que ce soit pour les goths qui entretiennent leur mèche ou les amateurs de pop pour dancefloor.

De ce mélange entre mauvais goût assumé et influences prestigieuses, résulte un cocktail curieux mais diablement excitant sur certaines pistes (le meilleur moyen de s’en convaincre étant de débuter le disque via cette ouverture tubesque qu’est « Nuclear Seasons »). Surtout que nonobstant l’avalanche d’effets dénaturant la voix de la miss, l’effet autotune est évité et épargne nos oreilles de la plus diabolique des inventions de nos producteurs d’aujourd’hui.

Et si le disque est très inégal, il se révèle pourtant sacrément attachant grâce à sa poignée de tubes en puissance. Un potentiel se dessinant clairement dans cette version popisée de SALEM (et qu’on appelle witch house dans les milieux autorisés). Cela fera râler les plus consensuels et réjouira les plus dégénérés d’entre nous. Voilà une raison suffisante pour ne pas bouder True Romance.