En matière de folk celtique, l'innovation est limitée. Limitée par les instruments bien entendu, puisque le style reste fidèle aux éléments majeurs qui ont permis au style de s'établir dans le courant des années 60 : la guitare acoustique, le violon, la flûte, éventuellement le bouzouki, la cornemuse ou le bodhran. L'éventail est large, mais ne se renouvelle guère. Les pionniers qui ont tenté d'intégrer des éléments électroniques, une once de modernité, à l'image des Levellers, ont eu fort à faire pour s'imposer. C'est ainsi, le style se doit, pour convaincre, de répondre à un certains nombres de codes et d'exigences qui n'incitent pas à la remise en question.

Que reste-t-il donc pour donner au folk celtique un nouveau souffle ? Il reste la vigueur et l'enthousiasme de groupes tels que CARBON LEAF, qui parviennent à se transcender pour proposer des compositions rafraîchissantes et travaillées. Après 20 années de carrières, tout d'abord consacrées au folk-rock celtique avant que le groupe n'évolue, au début des années 2000, vers une country-folk plus commerciale, le quartet revient cette année vers ses premières amours par le biais d'un album exceptionnel, et le plus riches en ambiances celtisantes depuis Echo Echo en 2001. Doté d'un titre est d'un visuel plutôt originaux, Ghost Dragon Attacks Castle est tout simplement un condensé parfaitement dosé et exécuté de folk-rock celtique.

Avec juste ce qu'il faut d'électricité (les guitares électriques apportent un côté mordant à l'ensemble), CARBON LEAF livre un album marqué par la variété mais surtout par une inspiration sans faille. Si l'opus est composé uniquement de morceaux originaux, on se prend à croire que certains titres sont tirés de traditionnels, alors que ce n'est pas le cas. « The Donnybrook Affair », le faussement enjoué « She's gone » ou le superbe « The Fox and the Hare », de véritables pépites folk celtiques. Mélodies évidentes, refrains suscitant la participation immédiate de l'auditeur et ambiances travaillées côtoient des instrumentations variées et complexes sur ces trois titres qui, pour le coup, semblent destinés à devenir des classiques dans le répertoire live des Américains. Quelle pêche, quelle envie, quelle maîtrise ! CARBON LEAF frappe très fort, bien plus que sur ses précédents opus, et bénéficie de sa longue expérience pour balancer des ces tubes imparables.

Le groupe aurait pu se contenter de balancer ses quelques pépites et proposer du remplissage sans que l'on crie au scandale. Sauf que CARBON LEAF a affûté et travaillé chacune des compositions qui font cet album, et qui lui confèrent une homogénéité certaine dans la qualité. Tout ici est appréciable, des instruments « Februaery Detailles » et « Amhran Damhsa » aux morceaux chantés : « Oi ! », son violon et sa mélodies génialissimes, « Sad and alone », ballade taillée pour les pubs, où encore « The road is breaking my heart », dont le chant, qui donne l'impression d'avoir été enregistré sur un dictaphone de mauvaise qualité, renforce l'impact thématique. Il est tout bonnement impossible de déceler une quelconque faiblesse sur cet album majoritairement acoustique, qui fait se côtoyer des sentiments divers et variés.

Impeccable de bout en bout, « Ghost Dragon Attacks Castle » est sans aucun doute l'oeuvre la plus aboutie de CARBON LEAF, qui propose un folk-rock celtique rejuvenant et sans faille. Sans aucun doute l'album de l'année dans le style. Une excellente surprise !