En 20 ans d'une carrière bien remplie, NOIR SILENCE a à peu près tout vécu : le succès commercial au Québec, le départ puis le retour de son chanteur, le changement de sexe de son claviériste Michel, devenue Michelle. Autant d'événements qui ont participé à forger la personnalité du groupe québécois, dont le retour discographique en 2008 par le biais d'un album rageur et hargneux, Immortellement Célèbre, n'avait laissé personne indifférent. Cinq années plus tard, impossible donc pour le groupe de ne pas célébrer ses vingt années d'existence avec un nouvel album. Plus de Mal que de Peur, officiellement la 7ème réalisation des Québécois, offre un condensé de toutes les facettes du groupe, pour un rendu rock qui frappe fort, très fort.

Ce nouvel album de NOIR SILENCE est, bien entendu, toujours fait d'un rock mordant ou plus mélodique, parfois agrémenté de discrètes touches country porteuses d'une richesse ainsi que d'une variété musicale. Les choeurs travaillés, le chant râpeux de Jean-François Dubé, les guitares omniprésentes et les claviers de Michelle Lambert tissent, mis ensemble, une toile porteuse d'un large éventail d'émotions. La force du groupe réside ainsi dans sa capacité à se faire tantôt accessible, tantôt plus alambiqué. A classer dans la première de ces catégories, le titre introductif « Je rêve », déjà présenté au public en 2012, le single « T'es tellement belle », la tendre ballade folk-rock « Johnny is alive » et ses paroles que l'on soupçonne uchroniques, ou encore l'entraînante « De part chez nous » renvoient directement au passé le plus lointain d'un groupe. Néanmoins, la maturité aidant, NOIR SILENCE parvient à sonner à la fois juste et sincère, et se fait l'auteur de mélodies et de textes qui résonnent fort et longtemps. L'amour, bien sûr, est au centre des débats, mais le groupe traite également de la séparation, de la solidarité en temps de crise, du besoin de se créer des rêves... en résumé, de la vie.

La facette la plus moderne du groupe, que l'on retrouvait sur l'intégralité de l'album précédent du combo, se fait donc ici légèrement plus discrète. C'est néanmoins elle qui se fait porteuse des titres les plus réussis, et donne naissance à de délectables perles, à commencer par la power-ballad « Tout ce qu'il nous reste », interprétée sous la forme d'un magnifique trio vocal dont les harmonies font merveille. Plus énergiques, « J'veux pas l'savoir », « Plus de mal que de peur », « Mens-moi » et ou « Ma belle » sont à la limite du hard rock, et témoignent d'une force de frappe intacte de la part des Québécois. Un véritable travail d'orfèvres, au faîte de leurs capacités créatrices. Allez, s'il fallait dégager une seule pièce de cet ensemble très réussi, ce serait sans doute « Parle-moi », qui tant au niveau des paroles touchantes que de son pont à la progression travaillée ou de son refrain intense donne une impression de transcendance de la part d'un groupe qui ne cesse de surprendre malgré une prise de risque mesurée.

Varié, mélancolique et colérique, délicat et brutal, Plus de Mal Que de Peur est très probablement l'album rock francophone de l'année. Porté par un groupe à nouveau uni et sûr de son propos, cet opus témoigne de l'immense talent des NOIR SILENCE qui, tant dans l'écriture que l'interprétation, livrent quelques unes de leurs meilleures réalisations. Du grand art, made in Québec.

J'reste avec toi : http://www.youtube.com/watch?v=YuAH_jXDHP0