Si NIRVANA est un groupe qui divise le public, qui oppose ceux qui voient dans le groupe du Seattle les sauveurs du Rock ‘n Roll et ceux qui pointent l’apparente pauvreté technique de la bande à Cobain, il y a un des disques du trio qui parvient même à diviser les fans du groupe... Ce disque, c’est Incesticide. Cet album qui fait suite au classieux et incontournable Nevermind n’est autre qu’une compilation de démos et de face B dont l’origine serait à trouver à la fois dans la volonté du groupe de couper l’herbe sous le pied de la multitude de Bootlegs qui ont vu le jour dans le sillage de leur succès. Mais également dans le projet de leur première maison de disque, Sub Pop, de profiter de l’engouement pour Nirvana en commercialisant les raretés dont elle détient les droits.

De fait, nous avons là un fourre-tout dans lequel se côtoient des titres d’origine et de qualité très diverses avec notamment une première partie assez lumineuse et presque enjouée qui voit le groupe s’adonner à plusieurs reprises que sont le peu convaincant "Turnaround" des illuminés de DEVO, puis "Molly's Lips" et "Son Of A Gun" qui sont tirés des 2 premiers EP des Ecossais de The VASELINES dont NIRVANA reprendra plus tard "Jesus Wants Me For A Sunbeam". S'ajoutent à cela les deux petits bijoux qui ouvrent le bal avec le très pêchu et Rock, "Dive", mais surtout "Sliver" qui présente le groupe sous une facette assez inhabituelle. On peut également noter une version survitaminée du hit "Polly", malheureusement bien moins intéressante que l’original.

La seconde partie du disque est plus sombre, plus rêche et plus pesante. Les titres sont majoritairement issus des sessions de Bleach. Or ce disque n’est déjà pas l’album le plus accessible de NIRVANA. Ainsi, bon nombre de morceaux s’avèrent assez dispensables lorsqu’ils ne sont pas tout simplement rébarbatifs, à l’image de "Beeswax" ou de "Mexican Sea food". Peu de titres valent réellement le détour à l'exception de "Hairspray Queen", un hommage au groupe de Punk britannique GANG OF FOUR, dont la ligne de basse et le final explosif demeurent assez savoureux.

L’intérêt de cette compilation est au final très limité, surtout si l’on aborde ce disque en espérant écouter un album à part entière, l’homogénéité et l’équilibre n’étant pas au rendez-vous. NIRVANA aurait largement gagné à consacrer un peu plus de temps à la réalisation de ce recueil de morceaux disparates ou alors à communiquer de manière plus claire sur le fait qu’"Incesticide" n’était qu’une compilation de démos. Et si certains verront dans ce disque l’expression même de l’essence du groupe : simplicité et spontanéité, il y a tout de même lieu de reconnaitre qu’il manque cruellement de cette rondeur qui fait le charme de Nevermind.
Mais il y a fort à parier que le groupe, alors en prise avec une notoriété aussi phénoménale que soudaine, ai eu à cœur de prendre à contre-pied l’industrie musicale en sortant ce disque le plus spontanément possible.
Comme quoi l’enfer, est pavé de bonnes intentions.