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FOLK CELTIQUE RAFFINé  |  STUDIO

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1976 Marc'H Gouez

Kristen NOGUèS - Marc'h Gouez (1976)
Par MARCO STIVELL le 6 Septembre 2017          Consultée 1507 fois

Denise Mégevand était un professeur parmi les plus respectés dans le domaine de la harpe. Classique, certainement, mais avec cette particularité de l'avoir également été en celtique. Son premier élève s'appelait Alan Stivell. Un garçon, alors que la harpe est connue pour être un instrument féminin. Dans le sillage de Stivell qui remet son instrument en avant au cours des années 50, des filles s'y mettent, et Mme Mégevand enseigne à une toute jeune Kristen NOGUÈS.

Elle est bretonne, issue d'une famille de la diaspora, habitant à Paris mais qui se rapproche elle aussi peu à peu de sa chère Breizh-Izel. Après avoir reçu des cours de Denise Mégevand puis de la toute aussi grande Lily Laskine à la Sorbonne, Kristen NOGUÈS se forme au chant traditionnel breton, tout en jouant dans un trio de harpes féminin. Au milieu des années 70, elle est membre de la coopérative Névénoé (collectif d'artistes bretons) et publie deux 45 tours.

Marc'h Gouez est son premier LP, publié avec l'aide de Névénoé, et déjà son antépénultième album. La carrière discographique très courte de Kristen NOGUÈS trouvera ses prochains échos en 1990 et en 2000, des moments où elle s'est mieux imprégnée de musique jazz. À 25 ans, la demoiselle est déjà un petit génie, pour parler simplement. Beaucoup la reconnaissent comme l'une des meilleures compositrices de Bretagne.

Ajoutez donc une voix de soprano qui s'accorde à la finesse de la harpe et une réalisation "maison", car Marc'h Gouez est enregistré entre copains, au studio Kerwern (Gwimilio). Parmi ceux-ci, des membres de Névénoé, le chanteur Melaine Favennec en accompagnateur. Dès le départ puis entre deux morceaux, on entend les craquements du vinyle certes (jamais édité en CD), des bruits de pas, des raclements de chaise sur le carrelage...

L'introduction est à la harpe, pendant quelques secondes, puis la guitare acoustique prend le relais, avec un ensemble de cordes, un piano Fender Rhodes, et Kristen NOGUÈS commence à chanter. Telle la Dame du Lac, elle semble sortie de l'eau, avec sa voix enfantine, gracieuse et légère. Et elle commence à nous raconter ses songes, les îles rouges, la trompette de cire...

Ce disque est magique, il n'y a pas d'autre mot. Ce ne sont pas que des ballades, les compositions s'inspirent aussi de danses bretonnes ("Huñvre"), garnies de quelques percussions africaines et une touche d'Orient dans les mélodies ("Pinvidik Eo Va C'hemener"), souvent dissonantes avec des notes impropres aux musiques celtiques. Les arrangements sont parfois bizarres : doublements de timbres, enchevêtrements, guitare électrique en fond, basson qui joue sur un autre mode. "Ar Bugel Koar" a je-ne-sais-quoi d'étrange, porté par son rythme lancinant. Tous ces morceaux sont d'un grand raffinement.

Quel enchantement ! La voix de Kristen NOGUÈS fait joliment swinguer le breton sur "Huñvre" aux influences jazzy (ah, ces petites réponses de synthétiseur aux refrains, comme un lutin farceur, Alice au Pays des Merveilles de Brocéliande) et se pose comme une caresse ailleurs. "Ar Gemenerez", "Enez Rouz" et peut-être plus encore, "Hirness an Devezhioù", du fait de sa mélancolie intégrée aux paroles, viennent nous hanter comme des chants de fileuses.

Et puis, si certaines chansons enchaînent slows et danses, on n'espérait pas tant des morceaux de harpe solistes comme le final d'"Ar Bugel Koar" et le non-moins sublime "Marc'h Gouez". Il y a des thèmes merveilleux, et sur le second, un discours musical qui n'est guère éloigné de ce qu'Alan Stivell faisait cinq ans plus tôt sur son album Renaissance de la Harpe Celtique.

Non contente de relier les mélodies, Kristen NOGUÈS fait durer les silences et revient aussitôt, comme si elle ne pouvait s'arrêter de jouer, tenant à occuper encore l'espace un peu après que les musiciens sont partis et à nous raconter encore une ou deux histoires avant d'aller se coucher. C'est généreux, c'est du grand art, et pourtant c'est très court. L'album a presque un format d'EP, moins de 30 minutes. Il est très précieux, de quoi donner envie de le remettre en boucle.

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   MARCO STIVELL

 
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- Kristen Noguès (harpe celtique, chant)
- Gildas Beauvir (guitare, claviers)
- Pierre Datry (basse, claviers)
- Bertrand Floc'h (guitare, psaltérion)
- Gérard Delahaye (violon, flûte)
- Christian Desbordes (piano, violons)
- Melaine Favennec (violon, flûte)
- Jean Denis (flûte)
- Fañch Tassiniek (violoncelle)
- Andre Marzuk (zarb)
- Bernard Puichard (basson)


1. Enez Rouz
2. Huñvre
3. Ar Gemenerez
4. Marc'h Gouez
5. Pinvidik Eo Va C'hemener
6. Hirness An Devezhioù
7. Ar Bugel Koar



             



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