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AMERICANA  |  STUDIO

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2017 A Deeper Understanding

The WAR ON DRUGS - A Deeper Understanding (2017)
Par AIGLE BLANC le 30 Octobre 2017          Consultée 3655 fois

Entre sa naissance et sa consécration, chaque groupe traverse un sas de compression, sorte de zone nébuleuse liée à sa gestation et au cours de laquelle, comme le foetus indifféremment mâle ou femelle, il contient à la fois les aléas et les promesses d'une carrière potentielle, ses succès futurs comme sa mort prématurée. Pouvait-on pressentir le grand talent de DEPECHE MODE, anticiper le tournant artistique que négocierait la carrière de Chris REA à l'époque de leur album inaugural?
Cette proto-histoire inhérente à chacun s'étend sur une période d'une longueur variable. Il arrive que la chrysalide s'ouvre et libère un cygne magnifique après une période d'essais et de tatonnements, soit souvent après le 3ème ou 4ème album. Mais il peut arriver aussi, comme cela a été le cas pour le regretté Alain BASHUNG, que le succès éclate sur le tard alors que l'artiste lui-même aurait pu se décourager et abandonner toute vélléité de carrière. Etant donné la frénésie créative des artistes sommés par leur maison de disques de sortir un album par an, il n'est pas rare que la consécration éclate le plus souvent après une gestation de deux à trois ans en moyenne.

THE WAR ON DRUGS justement nous livre avec A deeper understanding son 4ème opus qui, n'échappant pas à la règle sus-citée, impose son aura, nous aveugle de sa beauté séminale. L'évidence éclate : nous assistons à la consécration d'un grand groupe ou plutôt à celle d'un seul homme, j'ai nommé Adam Granduciel, membre fondateur d'une entité philadelphienne qu'il a façonnée depuis ses débuts en 2005 jusqu'à lui trouver, si l'on en croit ses entretiens accordés à la presse spécialisée, le visage idéal dont voici la teneur : Adam Granduciel (chant, guitare, harmonica, claviers, samplers), David Hartley (basse, guitare), Robbie bennett (claviers, piano, guitare), Charlie Hall (batterie, orgue), Jon Natchez (saxophone, claviers), Anthony LaMarca (guitare, claviers).
Ce qui fait la particularité de THE WAR ON DRUGS, c'est son rythme de croissance et de créativité. Si A deeper understanding est bien son 4ème effort studio, le groupe existe déjà depuis 12 ans, période au cours de laquelle il a produit un album exactement tous les 3 ans, ce qui selon les normes actuelles demeure une créativité assez faible en terme de quantité.
Il n'est pas bien difficile de comprendre ce rythme lent de production dès que l'on s'intéresse un peu à la tête pensante du groupe.

Adam Granduciel, comme la Kate BUSH des grandes années, est un maniaque des enregistrements studio, moment de solitude face à ses boutons où il façonne le son qu'il souhaite pour son entité jusqu'à attacher une importance inouïe aux détails les plus infimes. C'est ce qui justifie à posteriori les nombreux départs des membres originels de 2005 dont celui de Mike Zanghi (ex batteur et sampleur) qui ne correspondait pas au son qu'avait dans la tête Adam Granduciel pour son groupe. Un tel perfectionnisme détonne à notre époque peu encline à polir la musique comme une véritable oeuvre d'art.
Du point de vue des références qui l'habitent, la musique d'Adam Granduciel se veut la petite soeur de Bruce SPRINGSTEEN et Neil YOUNG, soit des artistes à l'univers singulier et à la forte personnalité, des artistes au plus près des infimes élans du coeur, dans la rage comme dans la douleur, des artistes qui engagent leur âme dans leurs textes et musiques.
Sa signature singulière est plutôt à chercher du côté de l'arrière-plan atmosphérique qui imprime à chaque titre une couleur onirique enveloppante à laquelle les claviers bien sûr ne sont pas étrangers. Notons au passage leur utilisation fort habile et parcimonieuse qui souligne les moments forts de chaque titre sans jamais accaparer l'espace sonore. Ils contribuent aussi, couplés aux magnifiques interventions de la guitare lead d'Adam Granduciel, à conférer aux compositions une ampleur appréciable.

Les dix titres de l'album s'enchaînent avec une aisance, une fluidité rares. Toujours bâtis sur des structures simples autour desquelles se superposent plusieurs couches sonores leur conférant une charge onirique, ils agissent comme une invitation au voyage en sublimant le sentiment d'urgence qui pousse à larguer les amarres et à se libérer de ses mauvaises humeurs. Plutôt que transmettre seulement un enthousiasme débordant, les chansons ne se départissent jamais d'une humeur mélancolique qui contrebalance et enrichit l'émotion du départ.
Toujours relié à ses humeurs, à la résonnance que le monde fouille en lui, Adam Granduciel livre l'album d'americana parfait, introspectif et empathique à la fois.
Sa voix délicatement voilée, qui peut faire songer à celle de Bryan Adams, se coule à merveille dans le tissu sonore déployé avec une superbe ampleur cinématographique. Si les claviers offrent leur écrin incomparable aux compositions, ces dernières se voient transcendées lors des interventions sporadiques et minutieuses de la guitare électrique qu'Adam Granduciel manie avec un feeling magnifique tandis qu'Anthony LaMarca brille de son côté à la slide guitar. C'est cette science de la superposition des instruments qui impressionne le plus dans cet album exceptionnel auquel l'adhésion semble inévitable dès la première écoute qui nous donne le sentiment de nous trouver devant un classique instantané.

Il paraît difficile de résister à la charge émotionnelle de ces dix ballades rock, toutes aussi sublimes les unes que les autres, tant elles transpirent la sincérité et une inspiration absolument renversante d'authenticité.
Le seul bémol toutefois, et encore vraiment négligeable, est à dénicher dans l'uniformité des titres, tant sur le plan mélodique, harmonique qu'atmosphérique. Prises séparément, ces ballades étincellent de sensibilité, de feeling, de poésie et de lyrisme introspectif. Leur cohérence interne, indéniable, en fait leur force, mais il manque peut-être le titre sortant du lot, celui que mettent si bien d'habitude en valeur les compositions moyennes et qui contribuent à notre plaisir d'écoute répétée. Mais s'il n'y a pas de titre survolant l'ensemble par sa classe et sa beauté, en revanche il n'y a pas non plus de titre faible. Ici, les plages ne connaissent que l'excellent et le sublime, ce qui vous donne une idée du caractère exceptionnel de cette sortie, sans doute l'album rock de l'année.
Si vous tenez maintenant à découvrir coûte que coûte les deux pics de ce disque, peut-être gagnerez-vous à vous rendre directement aux pistes 4 ("Strangest Thing") et 7 ("Thinking of a Place") qui concentrent avec incandescence les qualités déjà bien exploitées ailleurs.

L'album idéal à écouter la nuit, à la sortie d'un bar américain, sur les coups de 2 heures du matin, au volant d'une décapotable alors que vous sillonnez l'une des portions de la mythique route 66 et que vous laissez l'air nocturne déposer sous vos paupières ses larmes de solitude à la douceur obsédante.

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   AIGLE BLANC

 
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- Adam Granduciel (chant, guitare acoustique et électrique, harmonica)
- Anthony Lamarca (guitare acoustique et électrique, guitare slide, c)
- Dave Hartley (basse fretless)
- Charlie Halls (batteries, percussions, chœurs)
- Jon Natchez (saxophone baryton)
- Michael Johnson (arp odyssee)
- Robbie Bennett (prophet 12, piano, céleste, orgue hammond)


1. Up All Night
2. Pain
3. Holding On
4. Strangest Thing
5. Knocked Down
6. Nothing To Find
7. Thinking Of A Place
8. In Chains
9. Clean Living
10. You Don't Have To Go



             



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