Z'embêté. Z'embêté z'embêté z'embêté, là. BIG BIG TRAIN a sorti l’année dernière "FOLKLORE", fantastique album. Puis cette année, un "Grimspound" dans la même veine mais déjà moins bon. Et voilà qu’après quelques pauvres petits mois, ils sortent un EP ! Quelle mouche les a piqués ? D’où provient cette curieuse lorgorrhée musicale, et surtout, sachant que Grimspound était un peu trop long, n’allaient-ils pas copieusement se vautrer en étirant le chewing-gum encore un peu plus ? Quand on apprend que le EP est en prime presque acoustique, de désagréables frissons parcourent l’échine du fan de prog échaudé : ça va être chiant ET mou ? Diantre.

Et puis on découvre le EP. Et le charme de "Folklore" revient nous entourer dès les premières notes. Oui, ce disque est assez bare-bones, plutôt porté sur la guitare folk, le piano et la voix, les tempos sont majoritairement lents, mais qu’est-ce que c’est beau ! Le premier titre est une ballade calme qui ferait presque... fin d’album. Gênant ? Non, savoureux. Le violon, star incontestable de Grimspound, est de nouveau bien mis en valeur, les cuivres sont doucereux, bien encadrés. C’est plus atmosphérique, plus folk-rock que réellement progressif... et c’est à la fois très joli et accessible. Et pratiquement tous les inédits, 7 en tout, composant ce EP seront du même acabit : le joyeux, champêtre et bucolique "Haymaking" très proche de la musique traditionnelle, "Skylon" aux choeurs suaves et cordes légères, avec des harmonies un poil compliquées, pas trop, juste ce qu’on faut, et sa guitare ultra saturée qui bourdonne, mais contenue, toute en rage feutrée aux côtés d’un piano électrique poétique et d’un chant magnifique. L’intro de "London Stone" ressemble à un hommage à ELP, en tous cas aux deux décédés E et L dans ce qu’ils faisaient de plus beau en matière d’acoustique, et se fond dans le sublime "Passing Widow", ballade piano-voix dans la grande tradition du songwriting britannique des années 70. "Leaden Stour" est encore une mélodie fantastique, relevée par un trombone cocasse qui introduit une seconde partie proche du... ALAN PARSONS PROJECT du début des années 80, quelle classe ! Même le dernier titre, récap des thèmes, est anecdotique mais si joli que ça passe. Bref, 7 titres, 7 douceurs.

Et le reste ? Ce sont des “remixes étendus” des meilleurs passages de Grimspound et (surtout) "Folklore", un poil plus acoustiques mais toujours épiques, et... ben c’est fabuleux. Les chansons déjà géniales deviennent encore plus parfaites. On passera sans regret le tout dernier titre, anecdotique au possible, pour finir sur ces deux pavés d’une beauté céleste. Et de se dire qu’en fait, cet EP qui nous faisait si peur, c’est un peu l’album prog parfait : si vous avez déjà les deux albums précédents, les inédits sont largement assez beaux pour mériter l’achat. Si vous ne les avez pas encore, vous en avez un best-of relativement satisfaisant. Et si vous ne connaissez pas du tout le rock progressif, vous avez ici assez d’éléments pop et folk pour vous initier tout en douceur. Là, gentlemen, vous avez tapé très très fort. De joli projet très agréable, BIG BIG TRAIN passe ici dans le rang des tous meilleurs groupes de rock progressif britanniques de tous les temps. Boom, like that !