Au départ, ce groupe surgi de nulle part avait tout d’une grande farce. Nous sommes en 1975, le phénomène Disco débuté au début des seventies commence à faire des vagues avec l’émergence de Donna SUMMER, Gloria GAYNOR, Barry WHITE, l’éphémère Carl DOUGLAS sans oublier les productions de l’italien Giorgio MORODER. Deux ans plus tard, cette vague atteint son sommet avec le triomphe du film « Saturday Night Fever ».

Revenons à nos moutons. Sous les lettres K C se cachent le nom d’Harry Wayne Casey, K.C. étant l’abréviation phonétique de son nom, un musicien en goguette officiant comme réceptionniste dans un entrepôt du producteur-distributeur Henry Stone, également patron d’une multitude de labels. La rencontre entre K.C. et Richard Finch manutentionnaire dans la même entreprise débouche sur une solide amitié. Ces deux rigolos passionnés de Soul mais aussi de musiques caribéennes commencent à composer des morceaux sans prétention et jouent au sein d’un petit groupe K.C. & The Sunshine Junkanoo Band. En 1973, Stone qui vient de monter le label TK est à la recherche de nouveaux groupes.
Une fois leur journée de labeur terminée, K.C. et Richard aiment traîner au studio TK, situé à deux pas de l’entrepôt. Casey sert occasionnellement de choriste à Betty WRIGHT tandis que son alter ego officie parfois comme technicien pour le couple Gwen et George McRae. Nos deux larrons passent à la vitesse supérieure en enregistrant en 1973 un premier single « Blow Your Whistle » qui intègre le Top 30 Soul à l’automne. Un second single « Sound Your Funky Horn » édité par TK Records sous le nom simplifié de K.C. & The SUNSHINE BAND lance véritablement le groupe qui devient en deux coup de cuillères à pot l’orchestre maison de TK Records.
En 1974, la troupe commet son premier gros carton en servant de backing band à George McRae sur « Rock Me Baby », un disque qui va se vendre à plus d’un million d’exemplaires. Cette bonne et heureuse surprise financière incite Henry Stone à pousser K.C. & The Sunshine Band sur le devant de la scène. Tous les voyants sont au vert, le nombre de discothèques géantes, genre peu en vogue aux USA où on préfère traditionnellement des groupes qui jouent pour de vrai en guise de disques, est en augmentation constante. En 1974, K.C. et sa bande de joyeux drilles sortent leur premier 33 tours « Do It Good », un album qui ne marque les esprits que des amateurs de dance floors.

Si la formation ne prête pas de mine et demeure mixte racialement (80% d’afro-américains pour 20% de blanc becs mais leaders) le groupe recèle en fait de jeunes musiciens rompus au groove, à la Dance Music, à la Soul et à tout un tas de musiques issues des Caraïbes (Bahamas, Cuba, Puerto Rico, Jamaïque, jusqu’à Trinidad et Tobacco). Ces influences s’expliquent logiquement. Basé dans la banlieue de Miami (Floride), le groupe est plus proche de la mer des Caraïbes et du golf du Mexique que du Canada. C’est donc en 1975 que K.C. & The SUNSHINE BAND jette un premier pavé dans la mare avec un disque éponyme de 9 titres.
Parmi ces neuf titres, trois font une entrée fracassante et pleine de culot dans les charts : « Get Down Tonight » en septembre 75, suivi par « That’s The Way (I Like It) » qui décroche la timbale avec un titre de Number One et enfin « Boogie Shoes » ; si ce dernier se révèle plus modeste, il connaît une seconde vie en apparaissant deux ans plus tard dans la bande son du film « Saturday Night Fever ».

Si aujourd’hui K.C. & The Sunshine Band est généralement classé comme groupe Disco, n’oublions pas que cette formation de neuf musiciens est parvenue sans trop le vouloir à faire danser la planète pendant près de trois ans. Mais rattacher le groupe au Disco serait largement réducteur. L’assemblage des instruments avec Jerome Smith, un virtuose de la guitare, le batteur Robert Johnson (ça ne s’invente pas), le percussionniste Fermin Goytisolo et une section cuivre entraînante n’ont pour but que de faire danser l’auditeur. Contrairement à la plupart des formations Disco, K.C. avait plus d’une corde à son arc. A travers ces neuf titres si vous tendez bien l’oreille vous découvrirez un canevas mêlant Soul, Philadelphia Sound, Funk, R&B, Pop, le Junkanoo en provenance des Bahamas, le Soca de Trinidad, La Bomba de Puerto Rico et quelques zestes polyrythmiques des Indiens de Mardi Gras de la Nouvelle Orleans. Mais on peut aussi retrouver un fumet de Hillbilly et de Square Dance dans « Boogie Shoes », Richard Finch ayant longtemps été admirateur de Buck Owens et Patsy Cline.

Entièrement composé par la paire Casey/Finc,h ce disque laisse souvent poindre des paroles hautement suggestives, à la limite de la censure, mais le refrain : «  That's the way, uh-huh uh-huh
I like it, uh-huh, uh-huh » répété quatre fois par couplet a fait danser de nombreux amateurs de Dance Music. Si aujourd’hui K.C., un brin bedonnant, se produit avec de nouvelles danseuses et de nouveaux musiciens flirtant avec le succès passé, n’oublions pas que sous ses airs de bons « déconneurs » cette joyeuse bande extrêmement soudée et cohérente fut une véritable machine de guerre qui a fait danser presque toute la planète durant la seconde moitié des seventies.