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Ann PEEBLES - This Is Ann Peebles (1969)
Par LE KINGBEE le 23 Janvier 2017          Consultée 2199 fois

«This Is Ann Peebles »*, premier disque de la chanteuse, annonçait sans fanfaronnade l’arrivée d’une jeune et grande interprète. Alors bien évidemment, on a encore le droit à une chanteuse qui a frotté ses fonds de culotte sur les bancs de sa paroisse.
Native de Saint Louis (Missouri), dernier bastion du Sud traditionnel, Ann PEEBLES voit le jour en 1947. Septième enfant d’une famille de onze enfants, elle débute à 9 ans au sein du Peebles Choir, la chorale baptiste dirigée par son paternel. Autant dire que cette troupe compte dans ses rangs un grand nombre de Peebles (père, mère, frangins, frangines, oncles, tantes et cousins). Adolescente, la frêle chanteuse écoute Otis REDDING, Sam COOKE à la radio, découvrant ainsi qu’il existe autre chose que les chants religieux auxquels elle se cantonnait jusqu’alors. Tout juste arrivée à l’âge adulte, Ann prend conscience du succès que connaissent alors ces précurseurs de la Soul.

Lors d’un concert du trompettiste chef d’orchestre Gene « Bowlegs » Miller, elle décide de se lancer et demande à monter sur scène pour interpréter « Steal Away », gros succès de Jimmy Hugues pour Fame Records. Ce n’est pas vraiment le genre de chanson facile, seuls Z.Z. Hill et Etta James ont repris le titre sans trop de succès. Miller n’est pas le premier perdreau venu, il a enregistré bon nombre de singles, a accompagné Otis REDDING et Wilson PICKETT et tourne avec son orchestre depuis des lustres. Impressionné par le chant d’Ann, Miller s’empresse de la recommander à Willie Mitchell, arrangeur et directeur artistique du label Hi Records basé à Memphis. Si Hi Records existe depuis 1958, la maison de disque semble dormir sur ses lauriers. Certes le label a connu de belles réussites (Bill Black Combo, Ace Cannon, « Jumpin » Gene Simmons et Willie Mitchell en personne sont rentrés dans les charts) mais il lui faut se régénérer pour survivre. Mitchell est à la recherche de jeunes talents capables de rajeunir l’image du label et Ann PEEBLES intègre l’écurie Hi dès sa première audition.
Surnommé « Papa Willie » au sein du vieux studio, Mitchell avec l’aide d’Oliver Sain enregistre, arrange et édite le premier single d’Ann PEEBLES qui frise le Top 20 au printemps 69. Mitchell décide aussitôt de lancer sa nouvelle pouliche avec un 33 tours. Il faut battre le fer pendant qu’il est chaud ! « This Is Ann Peebles », associé à la découverte d’Al GREEN, va relancer Hi sur le chemin d’un succès inespéré.

Placée dans une ambiance et des conditions quasi familiales, la jeune chanteuse va cartonner dès son premier disque. Enregistré au Royal Studios avec un Ampex 8 pistes, Mitchell et Ann vont parvenir à créer une sonorité estampillée Memphis Soul de première bourre, une première pour Hi. Le staff de Hi Records a décide d’incorporer trois titres des deux premiers singles : « Give Me Some Credit », une composition du countryman Carl Smith, ouvre l’album sur de bonnes bases. « Solid Foundation », un titre composé par Don Bryant, chanteur, compositeur attitré du label et futur mari d’Ann, laisse entrevoir toute la conviction de la chanteuse. « Walk Away », titre d’Oliver Sain figurant sur le premier single, avait été préalablement gravé par Mitty Collier (future pasteure) pour Chess Records. Ann en délivre une version moins « ampoulée » agrémentée par la basse bien ronde de Leroy Hodges.
Willie Mitchell a concocté pour la chanteuse une track list éclectique conjuguant reprises inusitées et gros hits, mais le choix repose sur des mélodies dans lesquelles la chanteuse peut pleinement s’exprimer. « Crazy About You Baby », un vieux Rockin’ Blues gravé par Sonny Boy Williamson en 1951, avait été repris un an avant par Ike et Tina TURNER pour une version Soul tendance Psyché dans laquelle Tina forçait sa voix. Ann propose ici une version beaucoup plus maîtrisée. La voix limpide comme de l’eau de roche et la présence des Frères Hodges font de ce titre une réussite, rien à voir avec les futures versions d’Elvin Bishop Band ou de l’Anglaise Christine Perfect (ex Chicken Shack et FLEETWOOD MAC) qui massacrera l’œuvre à qui mieux mieux.
Parmi les autres inusités, « My Man » demeure une pièce de choix. Si le morceau est accrédité à la triplette Anderson/Oliver/Anderson, il se rapproche étrangement du « My Man -He’s A Lovin’ Man » popularisé en 1962 par Betty(e) LaVette pour Atlantic. La présente version se révèle plus sage, plus soft et moins érotique que celle de LaVette mais propose encore une fois un délicieux moment de Southern Soul, bien épicé par la section cuivre. La chanteuse apprivoise le tempo et les cœurs sur le slow soul « Won’t You Try Me », œuvre de son découvreur Gene Miller, dans une lignée proche de Barbara LYNN. Ann PEEBLES s’attaque au grand succès de Bettye Swann « Make Me Yours » mettant plus de conviction que la Louisianaise. Si on peut avoir une petite préférence pour la version originale, Ann propose toutefois une bien meilleure interprétation que Mary Wells.
Willie Mitchell a aussi glissé quelques gros succès. Si l’exercice de ce genre de reprise peut s’avérer ardu et délicat, notre jeune chanteuse s’en tire plutôt très bien. « Chain Of Fools » composé par Don Covay reste attaché au répertoire de Lady Soul (Aretha FRANKLIN). On n’a jamais entendu une version plus brillante que l’originale, un morceau marquant de la Soul Music. Et dire qu’au départ, pour répondre aux sollicitations de Jerry Wexler, patron d’Atlantic, Don Covay avait ressorti de ses cartons une vieille compo écrite avec l’une de ses frangines. Le morceau a été repris une soixantaine de fois (attention qui s’y frotte s’y pique) et on ne compte plus les chanteurs qui se sont cassé les dents dessus (voire ridiculisés). Récemment, ce titre phare d’Aretha a fait l’objet d’une multitude de reprises par de jeunes candidats aux émissions genre American Idol, The Voice, X Factor (et autres purges du même genre, ça ne coûte pas bien cher et c’est rentable niveau audiométrie), reprises souvent pitoyables qui prêteraient presque à sourire (jaune). Ann PEEBLES en délivre probablement la version la plus convaincante, même si elle ne vaut pas tout à fait celle de la mère FRANKLIN. La voix est consistante, l’accompagnement des Hodges Brothers et d’Al Jackson irréprochable et plein de saveurs, mais on restera néanmoins attachés au titre original probablement rentré dans l’inconscient collectif.
Autre bonne pioche avec « It’s Your Thing », gros succès des ISLEY Brothers (l’un des plus vieux groupes en terme de longévité) au printemps 69, un titre qui se vendra à plus d’un million d’exemplaires, pas mal pour un single publié sur le label T-Neck, le propre label du groupe. Ce standard a été accommodé à toutes les sauces (Ska, instrumental, Jazz, Blues, Ambient sans oublier les samples souvent indigestes) et encore une fois Ann PEEBLES s’en tire haut la main. Si certains auditeurs se rappeleront certainement la version des Jackson 5, cette mouture a l’avantage de proposer une voix féminine. Reste à voir si vous préférez la ligne de basse de Marvin Isley ou celle de Leroy Hodges. Signalons qu’Aretha FRANKLIN reprendra le morceau au début des eighties dans une veine Disco fortement imbuvable.
Terminons ce rapide survol avec « Rescue Me » et « Respect ». Le premier, gravé pour la première fois en 65 par Fontella Bass, a connu son lot d’hideurs (CHER, Elkie Brooks, Gayle McCormick, Bryan FERRY) et notre chanteuse s’en tire sans trop de dommage malgré un vocal peut-être trop aigu. On conseillera également la version plus bluesy de Roy Buchanan. Rien à voir avec l’adaptation de Sylvie VARTAN sous le titre « De Ma Vie ». Comparons ce qui est comparable ! Dernier gros titre avec « Respect ». Cette compo pleine de ferveur d’Otis REDDING mise en boîte en 65 servira deux ans plus tard de signature à Aretha FRANKLIN. Parmi la kyrielle de versions enregistrées, il vaut mieux ne pas compter le nombre d’artistes qui ont flingué cette pépite. Si le titre reste attaché au répertoire d’Aretha et d’Otis, la native de Saint Louis propose encore une interprétation pleine de détermination, seule manque l’ampleur des cuivres par rapport à la version de FRANKLIN.
Loin de moi l’idée d’enfoncer le couteau dans la plaie, mais chez nous, deux super killers ne rateront pas le morceau (trop gros pour eux) : HALLYDAY avec « Du Respect » en 66 (il était rapide le bougre) et Chimène Badi dans la compilation « Chanter Pour Celles », une bonne œuvre au profit du Samu Social mais une reprise affligeante.

Avec son beau timbre de voix, juvénile, rafraîchissant mais gorgé de sincérité et de conviction, Ann PEEBLES, associée à l’un des meilleurs orchestres et à un arrangeur de talent, proposait avec ce premier jet un disque annonciateur de futures petites pépites.

*Ce disque a été réédité en CD en 1999 avec 6 titres bonus sous une autre pochette. En 2012, le label japonais Solid Records publiait en CD le disque d’origine avec sa véritable pochette. Depuis, le label Fat Possum, bien connu des amateurs de Delta Blues, a racheté le catalogue Hi Records.

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- Howard Grimes (batterie)
- Al Jackson (batterie)
- Leroy Hodges (basse)
- Teenie Hodges (guitare)
- Ann Peebles (chant)
- Charles Hodges (orgue)
- Wayne Jackson (saxophone)
- Andrew Love (saxophone)


1. Give Me Some Credit.
2. Crazy Aboit You Baby.
3. Make Me Yours.
4. My Man.
5. Solid Foundation.
6. Chains Of Fools.
7. It's Your Thing.
8. Walk Away.
9. Rescue Me.
10. Won't You Try Me.
11. Steal Away.
12. Respect.



             



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