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REMIX / B.O. FILM  |  B.O FILM/SERIE

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B.O FILMS/SERIES

1988 Screen Themes

John SCOTT - Screen Themes (1988)
Par BAKER le 9 Juillet 2018          Consultée 797 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Parfois, des disques ou compilations partent d'une idée si bonne et si généreuse qu'on en vient à se demander si et comment ça a pu exister. Nous sommes en 1988, une plutôt belle année pour le cinéma (rappelons qu'en l'espace de deux mois, le spectateur français a eu droit à Piège de Cristal, Mort à l'Arrivée, Roger Rabbit, Rambo III, L'ours, Goodmorning Vietnam, Le Grand Bleu, Hellraiser II). Varese Sarabande, maître incontestable des sorties phonographiques de l'époque, a une idée de génie (ça ne leur arrivait pas tous les jours) : compiler les meilleures B.O. de films de l'année, mais attention, quand je dis les meilleures, ce n'est pas "les 10 premiers du box office", mais bel et bien les partitions les plus musicalement réussies. L'idée de génie, c'est d'avoir engagé un chef-d'orchestre, en l'occurrence le bourrin John Scott, pour réenregistrer quelques parties : par le truchement des copyrights, ça permet d'obtenir des musiques pour lesquelles la maison de disques n'avait au départ pas les droits. Une moitié de partoches piquées à la concurrence, l'autre moitié extraite des vrais disques (notamment lorsqu'il s'agit de musiques dépassant le simple cadre du symphonique), et nous voilà en présence d'un bijou 48 carats qui ne possède qu'un défaut.

Bijou ? Oui, car pour s'en rendre bien compte, il suffit de voir quelles sont les pistes les moins réussies, ou les plus banales. C'est simple : "Coming to America", un joli et court exercice de pompier signé Nile RODGERS ; "Shoot to Kill" un peu banal mais très efficace dans le genre, et composé par... John Scott (pourquoi se gêner ? d'autant que le film est un thriller ô combien sous-estimé), et "Betrayed", un très bon film de Costa-Gavras où Bill CONTI livre un thème mignon mais un peu trop VANGELISien pour être honnête. C'est le bas du panier, mais c'est déjà très sympathique. Et le haut alors ?

Ca se scinde en deux : les grosses machines et les titres moins connus. Au rayon des compositeurs classiques, on ouvre la marche avec le thème de "Beetlejuice" très proche de l'original (une sacrée performance en soi) : Danny ELFMAN est déjà consacré star. Avec "Die Hard", Michael KAMEN se permet un petit précis de thriller avec toute la vivacité qui le caractérise. Pour James HORNER, c'est compliqué : le titre de "Cocoon II" est une pompe absolue, quasi note pour note, de ce qu'il a déjà fait pour "Miracle on 8th Street" l'année précédente. Mais alors à la note près, hein. Mais que c'est bien foutu ! Du jazz big band à la COUNT BASIE avec un sens de l'écriture et du groove hallucinants. Si je vous disais que j'en ai loupé un arrêt de bus, happé par le swing ?

John BARRY fait encore preuve d'un beau sens de la mélodie avec le méconnu "Masquerade" (un thriller semi-érotique avec Rob Lowe), Jerry GOLDSMITH et Craig SAFAN, dans deux catégories différentes (poids lourd et poids plume), livrent de beaux exercices de home studio avec synthétiseurs froids et scintillants, avantage évidemment à l'homme au catogan d'ivoire. Le meilleur pour la fin : une "suite" de "Roger Rabbit". Un énorme film, un énorme score, un chef d'oeuvre d'Alan SILVESTRI ici compilé dans un réenregistrement plein de peps et de joie. En jazz, orchestral sinistre ou mickeymousing, l'orchestre de John Scott virevolte, un vrai plaisir. D'autant quand on sait que jusqu'à cette année 2018, le disque original était devenu subitement introuvable, on ne sait par quel miracle.

Jusque là, c'est du lourd. Du lourd et donc du bon, car varié et soigné. Mais c'est dans le léger que ce disque va aller droit au coeur. Le cinéma anglo-saxon ne se résume pas à pan pan boum boum, et cinq titres, soit le tiers de l'album en version CD, vont vous bouleverser par leur approche humaniste. Oeuvre pour piano solo du très select compositeur contemporain Paul CHIHARA, "Crossing Delancey" - mettant en scène une Amy Irving à la beauté transcendentale - est à la fois simple, épurée et majestueuse. Pas encore superstar, et plus porté sur la musique concrète et les expérimentations de son ami David Cronenberg, Howard SHORE porte sur ses épaules le thème de "Big", confondant d'une naïveté Spielbergesque que les auteurs de Stranger Things tueraient père et mère pour ne serait-ce qu'approcher. Un très grand thème.

Taquin, Dave GRUSIN sort le zydeco pour "Milagro", un adorable petit film altermondialiste signé Robert Redford. Accordéon et violon butinent d'accord en accord pour apporter une réelle plénitude. Oeuvre unique d'un compositeur qui n'aura hélas jamais percé par la suite (pas comme on l'aurait souhaité en tous cas), "Madame Sousatzka" est une petite merveille, sensible, à fleur de peau. Gérald GOURIET aurait pu devenir un grand. Enfin, traitant d'un sujet sensible et toutes ondes Martenot dehors, Elmer BERNSTEIN livre avec "Da" (le second film sur l'enfance de 1988, avec Paperhouse, criminellement passé sous silence) un extraordinaire moment de recueillement et de partage.

Au final, ce qui frappe le plus dans ce patchwork hétéroclite, c'est la solidité de l'ensemble. Pas un titre qui ne rentre pas dans la caboche, même les délires organistiques de Craig SAFAN ou les violons sibyllins de KAMEN. Les styles sont très variés, la présence de quelques versions originales aère la production, et l'album est un délice à s'enfiler d'une traite.
Alors pourquoi a-t-il un défaut ? Parce que Screen Themes est resté seul dans sa catégorie. Il n'y a pas eu de Screen Themes II, et si le monde tournait correctement on devrait en être à Screen Themes XXX. Varese a bien sorti quelques rares compilations de ci de là : des 25 30 et 40 anniversary collections (franchement bonnes), une très cheap et bizarre "Video hit collection 93" compilant les génériques de fin des meilleures locations de 1993 (dont le meilleur morceau date de... 1986 !), mais rien de si particulier, de si respectueux de cet art qu'est la musique de film.
Une petite compilation peu connue mais indispensable aux amoureux du genre.

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- John Scott (chef d'orchestre)
- The Royal Philharmonic Orchestra (orchestre)
- Cynthia Millar (ondes martenot)
- Jake Emblow (accordéon)
- Mitch Dalton (guitare)
- Guy Barher (trompette)
- Chris Laurence (contrebasse)
- Duncan Lamont (saxophone)
- Harold Fisher (batterie)
- Dave Hartley (piano)


- * : Enregistrements Originaux
1. Danny Elfman - Beetlejuice (main Theme)
2. Howard Shore - Big (goodbye)
3. John Scott - Shoot To Kill (end Title)
4. Paul Chihara - Crossing Delancey (portrait Of Izzy
5. James Horner - Cocoon The Return (basketball Swing
6. Nile Rodgers - Coming To America (the King's Motor
7. Gerald Gouriet - Madame Sousatzka (the River) *
8. Jerry Goldsmith - Criminal Law (the Garden Pavilli
9. Craig Safan - A Nightmare On Elm Street 4 (corpus
10. Bill Conti - Betrayed (the Way) *
11. John Barry - Masquerade (end Title)
12. Elmer Bernstein - Da (theme) *
13. Michael Kamen - Die Hard (terrorists)
14. Dave Grusin - Milagro Beanfield War (end Title)
15. Alan Silvestri - Who Framed Roger Rabbit Suite



             



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