Nancy SINATRA, à la base, on ne veut pas l’aimer. C’est la "fille de…" ultime, celle qui avait toutes les portes grandes ouvertes devant elle quand elle était encore dans le ventre de sa mère. Et puis elle fait très poupée de cire et de son ! Mais bon, en même temps on l’aime bien Nancy. Elle est jolie, et puis elle a une belle voix, même si elle fait très poupée de cire poupée de son. "Something Stupid" en duo avec papa, c’était bien, et puis "You Only Live Twice", quand même… Oh, et puis "These Boots Are Made For Walkin’", bien sûr ! C’est tout de même un super morceau, et le clip fait tellement image d’Epinal des Swinging Sixties, facteur nostalgie garanti !

Le morceau est rentré dans la culture populaire, utilisé notamment dans Full Metal Jacket de Stanley Kubrick, repris par MEGADETH et Ella FITZGERALD accompagnée de Duke ELLINGTON, entre beaucoup d’autres… Et puis c’est tout simplement bien. C’est groovy, les paroles passent toujours bien aujourd’hui et peuvent être lues de plusieurs manières, ça se retient tout seul et ça fait plaisir aux soirées karaokés. Pour l’anecdote, Lee HAZLEWOOD, compositeur de la chanson, voulait à la base chanter la chanson, mais Nancy lui fit remarquer avec justesse que les paroles sonnaient très différentes et pas dans un bon sens si c’est un homme qui les chante, et voilà ! Un hit dans la poche.

S’il y en a qui devaient être contents, c’était les maisons de disques. Du pain béni pour eux : Le nom de famille et le joli minois assurent sa promotion à eux seuls, elle a du succès et traîne avec un moustachu pour les vendre comme les nouveaux SONNY AND CHER. Mais pas de chance pour les grands labels, papa SINATRA a déjà sa propre maison de disque, et il n’y a que lui qui peut traiter sa propre vache à lait (cette phrase est très bizarre et mériterait un #BalanceTonPorc). Ni une, ni deux, dès que "These Boots" commence à cartonner, on met Nancy en studio, on lui fait chanter deux trois compositions de Hazlewood calées entre les succès du moment, et le tour est joué !

Une recette pareille aboutit normalement à un bel étron, mais il faut croire que la fièvre créatrice de l’époque permettait tous les miracles car le résultat final n’est pas si désagréable que cela. On a beaucoup vanté les talents de compositeurs de Lee Hazlewood, AllMusic Guide allant jusqu’à le qualifier de génie. Sans aller jusque-là, le bonhomme sait trousser de bonnes mélodies quand il s’agit de ses chansons, en témoigne "I Move Around", jolie perle pop. Dommage par contre que son talent n’ait pas eu le flair de lui déconseiller des reprises des BEATLES : "Day Tripper" et "Run For Your Life" sont bien, bien faiblardes. "It Ain’t Me Babe" est bien sympa mais n’a pas l’ironie de DYLAN, tandis que "As Tears Go By" ne fait pas grand effet. Le morceau a été repris tellement de fois que des versions bien pires nous ont apprises à apprécier celle-ci.

C’est un disque qui n’a rien à dire et ne s’articule en fait qu’autour du single, ces fameuses bottes. Dans l’ensemble, la plupart des chansons restent quand même faibles. Cet album doit sa postérité à son aspect kitsch et l’instantané qu’il propose de la scène pop de l’époque.