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Diana ROSS - Silk Electric (1982)
Par DERWIJES le 23 Novembre 2019          Consultée 1451 fois

Why Do Fools Fall In Love, sorti un an auparavant, a donné à Diana ROSS un avant-goût de la liberté de pouvoir produire soi-même ses albums. Et face au succès rencontré, elle décide bien sûr de recommencer l’expérience avec son opus suivant.

D'emblée, deux choses frappent à propos de Silk Electric : sa pochette très flashy, signée Andy WARHOL, excusez du peu, et son titre. Silk Electric, la soie électrique. Le programme y serait-il annoncé ? Nous promettrait-on une musique douce comme la soie mais néanmoins pourvue de pulsations électriques ? L’analyse peut sembler farfelue, mais pourquoi pas, après tout ? Une fois pressé le bouton "Play", on oublie bien vite cette question pour s’en poser une autre : qu’est-ce que c’est que cette production, sacrebleu ?

C’est moche. A F.P, nous parlons souvent des excès commis dans les années 80 en matière de production. Voilà un bel exemple ! Ou triste exemple, c’est selon. En tout cas, nous avons des piles d’instruments mis quasiment au même niveau, avec le chant recalé tout au fond de la classe. Mais pourquoi le chant ? Pourquoi l’avoir rendu si maigrichon, si lointain qu’on dirait que l’album a été enregistré par un producteur de death metal au milieu des forêts Lapones ? Bien sûr, c’est qu’elle essayait de suivre les modes de l’album. Comme elle le dit elle-même, elle s’est beaucoup inspirée de Michael JACKSON et de son Thriller pour cet album. En même temps, elle a le droit puisque c’est un peu grâce à elle que Thriller existe : c’est parce qu’elle a insisté pour que Michael obtienne un rôle dans l’adaptation du Magicien d’Oz dans laquelle ils jouèrent pendant les années 70 que celui-ci put rencontrer Quincy JONES, l’orfèvre de ses chefs-d’œuvre.

Prenons sur nous et tâchons de passer outre cette production tellement putassière qu’on dirait une émission de Laurent Ruquier. Mine de rien, le jeu en vaut la chandelle et, sous cette épaisse couche de maquillage sonore, se cachent quelques chansons valant le détour.
Puisqu'il n’y a plus de producteurs pour choisir à sa place les morceaux à chanter, Diana se fait réellement plaisir en décidant elle-même ce qu’elle veut voir figurer sur l’album. Le résultat des courses donne un patchwork de morceaux qui part dans toutes les directions. C’est désordonné, pour ne pas dire carrément bordélique, mais dans le même temps libérateur. Il y a bien sûr le single bulldozer, celui taillé pour détruire toute concurrence sur son passage, que l’on trouve sur chaque album de Diana ROSS. Ici, il s’appelle "Muscles", et c’est un cadeau de Michael JACKSON. Il devait à la base être co-producteur de l’album, mais des obligations avec Paul McCARTNEY l’en empêchèrent. Soucieux tout de même d’aider son amie, il composa mentalement ce morceau pendant un vol sur le Concorde et en enregistra un brouillon sitôt revenu sur le plancher des vaches. Cet hymne à une certaine idée du corps masculin colle aux standards de l’époque tels que dictés par Jackson lui-même, un mélange hybride entre de la funk, de la soul et de la pop. A l’instar du clip accompagnant le morceau, le tout a pris un coup de vieux depuis sa sortie, quoiqu'il s’écoute encore avec un certain amusement. Comme M.J était le Roi Midas en plus d’être le Roi de la Pop, "Muscles" fut un gros succès, se glissant du top 10 jusqu'aux Grammy Awards.

Le deuxième single choisi par Diana se pose aux antipodes du premier. Avec "So Close", nous passons du coq à l’âne, de la funk au doo-wop. Il faut croire que reprendre le standard 50’s "Why Do Fools Fall In Love" un an auparavant l’a convaincue de réitérer l’expérience, même si le résultat est le même, "sympa mais sans plus". Quitte à changer de registre, allons plutôt à la fin de l’album pour écouter "I Am Me". Du reggae ! Et pas trop nul avec ça ! Bon, il fallait bien que Diana fasse comme tous les autres et s’y mette. Ça aurait pu être pire, au final ça a surtout des airs de "Reggae pour les nuls", ou "Reggae 101".

Le gras de l’album, sa meilleure partie, n’est ni reggae ni funk, mais rock. Souvenez-vous, nous en parlions dans la chronique précédente : ROSS était à l’époque en couple avec Gene SIMMONS et l’influence du Démon se fait de plus en plus ressentir. Son comparse du BISOU Bob KULICK revient tenir la gratte sur quelques morceaux bien pêchus, "Fool For Your Love" et "Anywhere You Run To" (qui est bien la preuve que la musique ne connaît pas de frontières : un morceau hard-rock prévu à la base pour KISS finit chez Diana ROSS). Ça dépote pas mal, même avec la production toujours aussi immonde. Et quitte à surfer sur la vague de la mode, autant y aller carrément et ajouter quelques power-ballads au passage ! Allez-y, essayez donc d’écouter "Love Lies" et "Still In Love" sans avoir l’impression que Pat BENATAR ou Stevie NICKS vont surgir pour un featuring surprise. Bon, je critique, mais ce n’est pas aussi beurk que ça en a l’air comme ça.

Et au milieu de tout ça, vous avez le minuscule "Turn Over". Une expérimentation d’une minute où Diana à la voix passée au vocodeur demande à l’auditeur de changer de face. Ah bah oui, sur vinyle ça passe encore, mais sur CD c’est juste chelou. Non, "cohérence" n’est définitivement pas un adjectif que l’on pourrait appliquer à ce Silk Electric. A l’écouter, je ne peux m’empêcher de penser à la célèbre phrase de Georges HARRISON à propos de All Things Must Pass : "Ce fut comme une diarrhée après une longue constipation". Quelque part, c’est la même chose ici. Après avoir suivi pendant des années, des décennies même, les ordres des autres, Diana se lâche totalement et n’en fait qu’à sa tête. Ça donne un résultat final carrément bordélique, avec cette fameuse production déjà blâmée.
Pourtant, Silk Electric n’est pas un mauvais album. C’est même, allons-y gaiement, un de mes albums préférés de Diana ROSS. On peut sentir le plaisir de la diva à l’enregistrer, et c’est contagieux. Ça rend les morceaux plus vivants et nettement plus fun. Des morceaux comme "I Am Me" qui auraient normalement été de gros bousins deviennent des plaisirs coupables. Au final, si je devais retirer un morceau du lot, ce serait "Muscles", que je trouve le plus contraint et le plus ringard du lot.

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1. Muscles
2. So Close
3. Still In Love
4. Fool For Your Love
5. Turn Me Over
6. Who
7. Love Lies
8. In Your Arms
9. Anywhere You Run To
10. I Am Me



             



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