Fraîchement sorti du carton plein que fut "Number One", Chaz JANKEL sait qu'un tournant se prépare dans la musique populaire de ce milieu des années 80. Le son se fait plus dur, le funk plus synthétique, les artifices gonflent, la prod est toujours aux stéroïdes depuis quelques années mais une certaine épuration, difficile à cerner, tend à se généraliser. Aussi, battant le fer tant qu'il est chaud, le voilà qui s'associe à la belle tigresse Brenda JONES, soul woman battante, pour un single clairement taillé pour le public funk de l'époque, revenant au style afro-américain de Chazablanca, mais en conservant le soin maladif de la production caractérisant Looking at You. Le but : faire un carton et donner à sa maison de disques un avant-goût du cinquième album.

Le moins qu'on puisse dire, c'est que dans son genre ce petit single est très infectieux. La voix est assez bien utilisée (un chouïa fausse vers la fin, hélas), la boite à rythmes totalement funk 80's, les synthés sont gros et gourmands, les cocottes de guitare bien présentes, le groove lourd et sourd. La chanson se permet en prime d'être un de ces morceaux hybrides où couplet et refrain ne savent pas exactement qui fait quoi : on commence par le "refrain" un peu simple mais terriblement efficace, grâce donc avant tout à la prod foisonnante, et le "couplet" étend l'espace harmonique avec un savoir-faire proprement épatant. C'est un très bon morceau dans le genre, dansant pour les clubs, sifflable pour les mélodistes, et JANKEL gagne son pari de moderniser son propos tout en restant respectueux de ses travaux précédents.

Las, les années 80, ce sont aussi les années où les contes de fées se sont cassé la gueule. "Occupation" est et restera un single-only, puisque la maison de disques décidera qu'elle n'était "pas intéressée" par un cinquième album du bel Anglais. Je ne commenterai pas cette décision, on va encore dire que je suis vulgaire et adipeux. Mais cela rend d'autant plus frustrante l'absence de vraie face B, puisqu'il ne s'agit que d'un de ces sempiternels "dub mix" qui allongent la sauce, permettant de mieux découvrir quelques effets de production mais au final ne se montrant pas à la hauteur de l'original. On aurait préféré une vraie face B, histoire de voir à quoi aurait ressemblé cet hypothétique "Chazanostra" (et hop ! voilà comment on invente une urban legend de toutes pièces !).

Et donc ce single porte bien son descriptif, puisque totalement esseulé. Si vous le croisez au hasard d'une brocante, ne passez pas à côté, c'est un vrai bon titre de funk F.M. très bien fichu. Et si vous n'avez plus de platine, essayez de trouver la compilation bien nommée "My occupation". Quand on appelle son best-of par le titre d'un single-only, croyez-moi, c'est qu'on y tient.