NDLR: Avant de lire cette chronique, sachez que GG Allin a été condamné à plusieurs reprises, y compris pour viol, et que les textes de ses chansons font l'apologie de tels actes (entre autres atrocités). La rédaction de Forces Parallèles ne soutient en aucune mesure de telles pratiques et tient par la même à vous préciser que ce n'est que par intérêt encyclopédique que l'artiste a donc fait l'objet de cette chronique.

En vrac, IGGY se mutilant avec ses tessons de bouteille, OZZY dévorant une chauve souris, MANSON écrasant des poussins, Daniel Darc période TAXI GIRL s’ouvrant les veines, Lux Interior des CRAMPS avec une chaussette comme seul habit, les groupuscules black metal à la GORGOROTH crucifiant des jeunes femmes, les BUTTHOLE SURFERS réalisant des opérations médicales, David yow de JESUS LIZARD urinant sur lui-mème, sans parler de Sid Vicious se bastonnant avec des cow-boys, de Genesis P Orridge des THROBBING GRISTTLE se pompant le sang du bras vers la verge (ou l’inverse je ne sais plus), du Nick CAVE époque BIRTHDAY PARTY ou d’Alan VEGA agressant le public, d’ALICE COOPER anéantissant des volatiles. Sur scène, le rock éxtrême est connu pour ses outrages célèbres. On en a même fait un genre, le "shock rock", coincé entre extrémités expérimentales et délires dignes du théâtre de la cruauté d’Artaud.

Mais au-dessus du lot, un personnage plus qu'inquiétant les a tous battus à plate couture : Mr Jesus Christ Allin... Un redneck quasiment déficient cognitif, originaire du New Hampshire, dont la carrière insensée se déroula entre 1977, l’an de grâce du punk rock dont Jesus fut un activiste extrémiste, et 1993, l'année de son suicide en plein boom grunge qu’il a un peu influencé pour son côté crade. Visionnez le film consacré à ses excès,  "hated" de Todd Philipps après un bon cassoulet. Vous aurez un laxatif imparable… Laxatifs qu’il utilisait d’ailleurs à loisir, et vous pouvez aisément imaginer le résultat pour ses shows scatologiques illustrés par son poème en prose "Eat my diarhea", présent dans cette compilation incendiaire. En dehors de son caca qu’il dégustait amoureusement, des mutilations diverses, des bagarres avec le public (des jeunes punkettes venaient par masochisme se faire fracasser par le dingue), des actes sado-masos, des fellations tarabiscotées, des tentatives de viol dans les loges parsemaient ses concerts apocalyptiques, faisant écho aux actionnistes viennois des années 60.

Si vous voulez en connaître plus sur ce personnage "shock punk", lisez l’excellent bouquin de mon pote Pierre Avril, édité au Camion blanc, intitulé "GG Allin, antéchrist de l’extrême". Et la musique dans tout ce fatras ? Du punk rock primaire, mâtiné de garage high energy gravement influencé par les STOOGES, le MC5 avec qui d’ailleurs il collaborera, ou les RAMONES. Des groupes proto-punks qu’il traitera souvent de traîtres vendus au système, de même qu’ALICE COOPER, son idole absolu, dont les prestations, comparées aux siennes, relevaient finalement plus du Muppet Show. Monsieur gros dégueulasse ayant cependant aussi un faible pour l’industriel, la country, le rock stonien, le "spoken word" et aussi le "sleaze rock". La discographie est conséquente et on se contentera dans un webzine généraliste comme Forces Parallèles d’une compilation de haute volée comme ce Rock' n' roll terrorist présentant du révérend de l’outrage number one dans ses attentats sonores. En solo ou avec ses outrageants SCUMFUCS, CEDAR ST SLUTS, THE TEXAS NAZIS et autres ANTI-SEEN.

Les thèmes ? Prenez les morceaux avec ses SCUMFUCS. Notre grand poète parnassien nous déclame ainsi des plaisirs pornos déviants comme l’hymne "I wanna fuck myself" (selon la position, c’est un peu dur…), de l’amour courtois solide ("Fuck Woman I‘ve Never Had", dont les lyrics ont dû être écrits par l’ami Erwin un soir de cuite) du masochisme gravissime ("Abuse Myself, I Wanna Die") avec des paroles qui feraient vomir tous les petits marquis de Sade contemporains, de la zoophilie virale ("Fucking the Dog"), une ode à la pipe ("Blowjobs"). Avec les CEDAR ST SLUTS, "I Wanne Suck Your cunt" est aussi une élégie au cunnulingus que l’ami Aigle blanc devrait faire étudier à ses chers troisièmes segpa en lecture méthodique, "Sluts In the City" un hit sur les "Bitches", où notre galant homme doit prononcer le mot fuck toutes les micro- secondes. En solo, même sorte de littérature romantique ("I’m Gonna Rape You") mais surtout un amour emphatique pour l'humanité poussé à son maximum ("I Hate People"). Certaines chansons frisent le banal, d’autres relèvent carrément du « terrorisme » punk » sonique. Le tout est joué de façon encore plus primitive que ses illustres aînés...
Les vocaux du messie Rabelaisien choronesque, toutes en morgue punk, ont quelque chose de franchement désespéré.

Il y a un coté heavy rock fortement dépravé ("I wanna Piss You"). "Kill the Children, Save the Food" (peut être le meilleur titre d’une chanson depuis l’australopithèque afarensis) oscille entre ce genre et la soierie la plus improbable. "Gimmie" avec un refrain étonnement accrocheur sonne comme du MC5 hardcore.
Sinon, on entend surtout du punk‘n’raw sorti droit des poubelles, bien trash. En témoigne, ce "Fucking the Dog", véritable missile garage punk primaire enregistré dans les toilettes maculées de sang héroïné, de sperme, de morve, de pisse, de diarrhée, et de gerbe du gros dégueulasse. Par moments, et pour reparler de punkitude pure et dure, on n’est pas loin du terrain miné des GERMS ("I Don’t Give a Shit") ou celui encore plus téstostéroné des ANTI NOWHERE LEAGUE ("I Love Nothing"). Le hit (!) "Drink, Fight and Fuck" est directement un manifeste street punk d’une verdeur incontrôlable. Dans tout ce délicieux vomi, on préférera des salves comme le dangereux "Fuck the Dead" ou la très sanglante -c’est le cas de le dire- ballade "Blood For You".

Du rock jusqu’au-boutiste dont on retrouvera certaines traces dans le black metal du début des années 90, chez un malade comme Mike Patton, les afficionados d’un grind-core ultime à la ANAL CUNT et autres gangs typés power violence à la BLACK ARMY JACKET, les cinglés indus de WHITEHOUSE, les ramoneurs (hum !) gays de TURBONEGRO, les chansonnettes enfantines des valeureux DWARVES.
A part çà, je vous souhaite quand même un bon appétit !