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1989 Read My Lips

Lou Ann BARTON - Read My Lips (1989)
Par LE KINGBEE le 22 Décembre 2019          Consultée 1285 fois

Ne vous fiez pas à cette pochette en brin kitsch, rappelant bon nombre de productions eighties bourrées d’esbroufe, Lou Ann BARTON mérite une attention soutenue.
Chanteuse discrète, Lou Ann demeure, à l’instar de Lucinda WILLIAMS, l’une des plus belle voix blanche de la Louisiane et du Texas. En octobre 89 en visite à Austin, votre humble serviteur eut la chance d’assister à un concert de Stevie Ray VAUGHAN. Si l’homme au chapeau, grand artisan du second Blues Revival, était un remarquable styliste dans le domaine du Blues Rock, l’entrée en scène d’une élégante chanteuse toute de noir vêtue avait mis le guitariste sous l’éteignoir. Malgré son grand chapeau, son jeu de scène, son fulgurant jeu de guitare et son charisme Stevie Ray s’était fait bouffé ce soir-là, tel l’agneau, la laine sur le paletot dès l’entrée en scène de la chanteuse. C’est du moins le souvenir que j’en garde trente ans après les faits.

Lou Ann Barton est native de Fort Worth où elle voit le jour en 1954. Elle s’installe à Austin, 300 bornes plus au sud, dès le milieu des années 70. Excellente choriste, elle intègre l’orchestre de W.C. Clark dans lequel joue SRV, avant d’enchaîner au sein de Double Trouble du même SRV. Au début des années 80, on la retrouve au sein du Roomful of Blues, période Earl Hooker. Son chant puissant et plein de feeling lui permet d’attirer l’attention de Jerry Wexler, ancien grand manitou de la firme Atlantic. En 1982, elle enregistre sous son nom son premier disque sous la houlette de Glenn Frey et de Wexler pour l’écurie Asylum. Mais à cette époque, la firme devenue une sorte d’extension d’Elektra Records n’a plus les moyens de ses ambitions, le label essayant de capitaliser sur les succès de Warren Zevon, Jackson BROWNE, des EAGLES ou de Linda Ronstadt.

Faute de promotion, « Old Enough » ne connaîtra aucun succès auprès du public malgré les avis favorables de la presse spécialisée. Une fois son contrat rompu, Lou Ann enregistrera un disque pour Spindletop, un micro label d’Austin qui se trompe en transformant la chanteuse de Blues en pop star, d’où un échec retentissant.
Les publics texan et louisianais resteront cependant fidèles à la chanteuse qui se produit occasionnellement avec Ray Campi, Omar Dykes et ses Howlers, Marcia Ball, les FABULOUS THUNDERBIRDS ou avec Jimmie VAUGHAN quand ce dernier décide de voguer vers une carrière solo. Mais cette superbe chanteuse n’a jamais atteint la notoriété qui aurait dû être sienne pour plusieurs raisons : la recherche de la gloire et des sunlights ne faisaient pas partie de ses priorités, ni la recherche de gains énormes. Ajoutez-y la faute à pas-de-bol et probablement un caractère intègre mais têtu et vous pourrez imaginer pourquoi la Texane ne s’est pas placée tout en haut du vedettariat malgré un timbre de voix exceptionnel et un physique à damner un Saint.

C’est donc en 1989 que Lou Ann Barton commet son premier gros méfait. Elle se produit depuis des lustres dans le club de Cliff Antone qui décide de l’enregistrer. On l’envoie à l’Arlyn Studios, le studio d’enregistrements reposant sur les fondations de l’ancien Opera House d’Austin, là où Ray Charles, Neil Young ou Willie Nelson posèrent leurs guêtres. Bien plus tard, Bonnie Raitt, Gregory Porter, GOV’T MULE ou Lucinda Williams viendront y poser leurs instruments et micros. Afin de pouvoir disposer d’une plus grande charge de manœuvre artistique, Lou Ann produit elle-même son disque associée à Paul Ray, ancien membre des Cobras et ingénieur du son connu pour avoir collaboré avec Les POINTER SISTERS, James COTTON, Alice COOPER, MEN AT WORK ou le guitariste Leo Kottke.

Antone et Ray décident de placer la chanteuse dans les meilleures condition en confiant l’accompagnement à deux musiciens qu’elle connaît bien l’une des sections rythmiques attitrées de l’Antone’s, le bassiste Jon Blondell (ex Zuzu Bollin, Willie Nelson) et l’immense George Rains, batteur pour Boz SCAGGS, Michael BLOOMFIELD, Sir Douglas Quintet, Mother Earth ou Yusef Lateef pour ne citer que les principaux. Afin d’agrémenter cette section, véritable gardienne du temple métronomique, Antone lui adjoint des musiciens habitués de la scène d’Austin et également des invités et des amis triés sur le volet, c’est qu’on se bouscule au portillon pour seconder la belle chanteuse.

Si on ne retrouve que des reprises, le choix des titres s’avère judicieux entre grands classiques revisités et inusités remis au grand jour pour un répertoire éclectique et rafraîchissant. D’emblée la guitare incisive de Vaughan place sur diapason la voix puissante et sensuelle sur « Sugar Coated Love », grand hit de l’harmoniciste Lazy LESTER, l’une des dernière légende vivante du Swamp. Le titre connaîtra également un bon carton via l’interprétation de Barbara LYNN. Lou Ann rend un brillant hommage à Barbara Lynn avec « You’ll Lose A Good Thing », une tuerie que la guitariste gaucher fit monter en haut des charts R&B en 1962. Barton se montre à son aise aussi bien sur les titres extra lents que sur les pièces aux tempos vitaminés. « Shake A Hand », une compo pleine de mélo du trompettiste Joe Morris, a inspiré tout un tas de chanteuses et chanteurs de Faye Adam à Ruth Brown et Lavern Baker en passant ELVIS, Sir Paul McCartney ou la super guimauve de Pat Boone. Ici Lou Ann parvient à en extraire les plus belles teintes sans tomber dans les pièges de l’excès larmoyant.

Le rythme s’intensifie sur plusieurs faces, « Sexy Ways », titre fifties des Midnighters d’Hank Ballard repris entre autre par Ronnie HAWKINS et le Killer, se révèle comme un excellent mid tempo bien ajusté avec l’apport cuivré du sax de Joe Sublett, membre de l’Antone’s House Band. Lou Ann se dévoile comme une vraie Rockabilly Woman sur « Mean Mean Man », titre de Wanda Jackson ; le timbre de la texane sonne moins « petite fille » que celui de la vétérane et qui peut parfois agacer. Pour l’anecdote Wanda a annoncé sa retraite en début d’année après soixante ans de carrière. Elle reprend « You Can Have My Husband »⸋, titre de Dorothy LaBostrie célèbre auteure de « Tutti Frutti », dans une veine Rockin’ Blues de bonne tenue.

La chanteuse prend son envol sur d’excellentes pièces de Swamp Blues et n’hésite pas à varier les tonalités. Elle transforme en Bayou Blues le « Good Lover » de Jimmy Reed, Kim Wilson se transformant en Whispering Smith. Le chant prend de l’ampleur sur « Shake Your Hips », peut-être l’une des meilleures interprétations féminines avec celle de Joan OSBORNE de ce grand classique de Slim HARPO. Second emprunt à Harpo avec l’indolent « Te Ni Nee Ni Nu », la guitare place le chant de Barton sur les bons rails tandis que le rythme finit par ensorceler l’auditeur.

La chanteuse nous rappelle que la Nouvelle Orleans et Austin se situent géographiquement sur la même ligne et que les deux villes diffusent une sonorité pouvant comporter des similitudes, la preuve avec « Can’t Believe You Want To Leave », enregistré par Little RICHARD, un morceau qui permet de faire souffler les chevaux. Excellente ballade avec « It’s Raining », compo d’Allen Toussaint, figure emblématique de la Crescent City gravée pour la première fois par Irma THOMAS.

Le disque s’achève en apothéose avec « Rocket In My Pocket », une sauvagerie mise en boîte en 58 par Jimmy LOGSDON sous le pseudo de Jimmy Lloyd. Si la guitare de Derek O’Brien touche sa cible à chaque note, ce sont bien les paroles qui font mouche ici sur un rythme effréné. Ne nous trompons pas, quand le brave Jimmy Lloyd chantait « I Got A Rocket In My Pocket »⃰, il faisait clairement allusion à sa quéquette, ce qui devient quelque peu ambigu en venant de la bouche d’Ann Lou Barton. Laissons-nous bercer par ce tempo efficace et ce texte porteur : « I got a rocket in my pocket and a roll in my walk – So baby don’t fuss me with North Forty talk … ».

Cet excellent disque regroupant ballades, Rockabilly, Swamp et Texas Blues se démarquait joyeusement de la production souvent ampoulée de cette fin eighties. Lou Ann Barton témoigne ici d’une puissance vocale efficace et sincère et n’hésite jamais à laisser le premier rôle à ses nombreux sidemen. Le disque sera réédité en France par New Rose avec une pochette totalement différente plus que quelconque. Il existe également plusieurs versions CD avec trois titres bonus.

⸋ Ce titre existe sous l’intitulé « Don’t Mess With My Man », chanté par Irma Thomas (son premier single pour Ron Records) et par … Lou Ann Barton alors chanteuse dans le groupe de Stevie Ray Vaughan.
⃰ Ce titre fait également allusion à l’expression argotique « avoir la gaule ».

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   LE KINGBEE

 
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- Lou Ann Barton (chant)
- Jon Blondell (basse)
- Tommy Shannon (basse 10)
- George Rains (batterie)
- Derek O'brien (guitare)
- Denny Freeman (guitare 2-3-4-6-7-9-10-11-12)
- Jimmie Vaughan (guitare 1-5-8)
- David Grissom (guitare 7)
- Joe Sublett (saxophone 3-9)
- Mark Kazanoff (saxophone 4-9)
- David 'fathead' Newman (saxophone 2-11)
- Rocky Morales (saxophone 4)
- Mel Brown (piano 2-3-4-9)
- Reese Wynans (piano 6-11 orgue 2-7-11)
- Mike Kindred (piano 10)
- Kim Wilson (harmonica 5-7, chœurs 3)
- Diana Ray (chœurs 3)
- Paul Ray (chœurs 3)
- Fran Christina (chœurs 3)


1. Sugar Coated Love
2. You'll Lose A Good Thing
3. Sexy Ways
4. Shake A Hand
5. Good Lover
6. Mean Mean Man
7. Shake Your Hips
8. Te Ni Nee Ni Nu
9. Can't Believe You Want To Leave
10. You Can Have My Husband
11. It's Raining
12. Rocket In My Pocket



             



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