Recherche avancée       Liste groupes



      
DEEP SOUL  |  COMPILATION

L' auteur
Acheter Cet Album
 


COMPILATIONS

2006 The Goldwax Years

Spencer WIGGINS - The Goldwax Years (2006)
Par LE KINGBEE le 23 Avril 2020          Consultée 844 fois

Un proverbe chinois nous dit : « Patience ! Avec le temps, l’herbe devient du lait ». Et de la patience, il en a fallu un lot pour que les amateurs de Deep Soul puissent enfin découvrir ces titres de Spencer WIGGINS quasiment quarante ans après leur parution en singles. Certes, le label nippon Vivid Sound avait publié « Soul City USA » en 1977, album désormais uniquement trouvable sur des sites d’enchères ou d’occasion. Le même label a réédité le vinyle en format CD, mais celui-ci est encore plus dur à dénicher. Peu importe, si vous vous êtes armé de patience, douze titres du vinyle sont présents ici parmi les 22 plages de cette compilation.

Qui peut savoir le succès qu’aurait pu rencontrer Spencer WIGGINS s’il avait eu la chance de signer sur un autre label ? Il ne s’agit pas ici de remettre en cause les productions de l’excellent Quinton CLAUNCH mais de mettre en avant le manque de moyens dont fut victime le label Goldwax jusqu’à sa faillite. Ancien guitariste, CLAUNCH monte avec des amis le label Hi Records en 1957 et décide de revendre ses parts au bout de deux ans. Propriétaire d’une petite quincaillerie, la musique a toujours été sa passion. En 64, il s’associe avec Rudolph « Doc » Russell, un pharmacien de Memphis, pour monter Goldwax Records. Parmi la soixantaine de singles édités par la petite maison de disques, seuls OV WRIGHT et James CARR réussissent à rentrer péniblement dans les classements consacrés à la musique noire.

En 1942, Spencer WIGGINS vient agrandir une famille qui comptera sept enfants. A huit ans avec Percy, son cadet d’un an, Maxine et Mary, deux de ses sœurs, il accompagne sa mère et intègre la chorale de la New Friendship Baptist Church de Memphis. Le quartier où vit sa famille fourmille d’artistes : Bobby BLAND, Ray CHARLES, James CARR, Maurice WHITE, Homer BANKS. Nat Williams, professeur d’histoire dans l’école de Spencer et également programmateur sur la WDIA, incite le gamin à persévérer. Spencer débute au sein de la New Rival Gospel Singers, une troupe de Gospel comprenant cinq membres de sa famille. Pendant cinq ans, Spencer se fait les dents en se produisant aussi bien dans les églises baptistes qu'au sein des congrégations pentecôtistes. Au collège, les deux frangins montent un groupe de R&B, The Four Stars, en compagnie de David PORTER. Le petit combo comprend parfois Andrew LOVE, Booker T. Jones. Les cachets des concerts sont reversés à la Booker T Washington School, école fondée par le paternel de Booker T Jones, futur organiste emblématique de la Stax. En 1957, on retrouve les deux frères au sein du Parker Aires Gospel Singers, un ensemble dans lequel figurent le pianiste Napoleon BROWN et Cleophus ROBINSON, frère de Brother Joe MAY.
A la fin des fifties, les deux frangins intègrent la Southern Wonder Juniors, une troupe de Gospel locale. En 1961, une fois son Bac en poche, Spencer stoppe ses études, bien décidé de tenter sa chance dans la chanson, tandis que Percy⃰ s’installe à Nashville afin d’étudier à l’Université d’Etat du Tennessee. Pendant une dizaine d’années, Spencer WIGGINS se produit au Flamingo Room, devenant l’un des chanteurs attitrés du club, épaulé selon les concerts par Isaac HAYES, le batteur Howard GRIMES, le trompettisteetchef d’orchestre Gene « Bowlegs » Miller, le sax Andrew Love et le guitariste Charlie Friday, pour ne citer que les principaux. Quand il ne chante pas la nuit, Spencer accumule tout un tas de petits boulots le jour afin de joindre les deux bouts. C’est ainsi qu’il est livreur de meubles pendant trois ans, Spencer n’enregistrant que neuf 45-tours entre 1965 et 1969 pour le label de Quinton CLAUNCH.
A la faillite de Goldwax, WIGGINS tente une brève expérience chez Rick HALL à Muscle Shoals. Le chanteur grave alors de superbes microsillons mais ces disques tombent malheureusement à une période où le R&B et la Soul passent au second plan chez Fame. Spencer WIGGINS n’insiste pas outre mesure et, en 1973, il quitte le Sud pour s’établir en Floride où il devient chauffeur de camion citerne, un emploi plus sûr que celui de second couteau dans la Deep Soul. Spencer se retire des studios mais continue à chanter les louanges du Seigneur dans des paroisses de Floride.

Le label anglais ACE nous propose ici 22 titres du natif de Memphis. Ces faces incluent les singles Goldwax dont les deux morceaux publiés sous la bannière de Bandstand USA, filiale de Goldwax, quatre titres du L.P Vivid Sound et trois alternates inédites à ce jour dont deux font doublons avec deux faces Goldwax.
Les compositions bénéficient de l’apport d’une belle brochette d’auteurs : George JACKSON, Isaac HAYES, Quinton CLAUNCH, Dave HALL, Jimmy WEBB, Dan PENN ou Spooner OLDHAM. Aux arrangements, on retrouve bien souvent la patte de « Bowlegs » MILLER et de Quinton CLAUNCH ainsi que des meilleurs accompagnateurs de Memphis et de Florence (Muscle Shoals). Le chant rivalise pleinement avec celui de James CARR ou d’O.V. WRIGHT, autres chanteurs du label.
Avec son intro d’orgue crépusculaire, « Once In A While (Is Better Than Never At All) » peut faire figure de synthèse de la poisse du chanteur. La puissance du chant, non pas élevé en plein air, mais sur les bancs d’une église, attire irrémédiablement l’oreille. Cette entame est suivie par nombre d’autres perles : « The Power Of A Woman » avec ses chœurs célestes et cette énorme basse sur le point de faire s’écrouler la voute de Notre Dame (Non, ça a déjà été tenté) en est le plus bel exemple. Il récidive avec « That’s How Much I Love You », un titre au chant cosmique gorgé de trémolos assassins et d'une rythmique capable de faire fondre le soleil.
Le ton monte d’un cran avec « He’s Too Old ». Le vocal y offre des poussées d’adrénaline pas si éloignées que cela de James BROWN. Même sentiment en plus rapide avec « Soul City USA ». Seul le regretté bluesman suédois Sven ZETTERBERG osera reprendre cette pépite. « Anything You Do Is All Right » nous offre un beau jeu de guitare sous le nappage d’un orgue angélique, alors que la trompette finit en trombe comme ses consœurs de Jericho. On a parfois l’impression d’entendre Big John HAMILTON sur « I’ll Be True To You », titre dont les colorations rappelent celles du label Sound Stage 7. « Lover’s Crime » prend une accentuation à la REDDING, le chant monte direct au ciel tandis que la guitare finit par nous achever. « Uptight Good Woman » pourrait résumer à lui seul le manque de pot dont souffrit Spencer WIGGINS durant sa carrière. Ce titre aurait dû monter dans les charts si Atlantic n’avait pas édité le titre de Wilson PICKETT cinq mois plus tôt avec une promo d’envergure. Au jeu des paris, nous plaçons quelques billets sur la présente version ainsi que celle de Laura LEE, qui nous semblent moins rageuses que celle de Wilson le Pervers.
Contrairement au cochon, n’allez pas croire que tout est bon ici. «  Who’s Been Warming My Oven » est inférieure à celle de l’ancien CUPONS Sir Walter RALEIGH. « My Love Is Real » risque d’occasionner quelques petites carries.

Terminons ce modeste panorama avec « I Never Loved A Woman (The Way I Love You) », le clou du disque avec Duane ALLMAN à la guitare. Popularisé par Aretha FRANKLIN, le titre a fait l’objet de nombreuses reprises pleines d’embuches, tant il est difficile de pouvoir rivaliser avec les versions de LADY SOUL et de Wiggins, qui nous offre ici une vraie tuerie.

Le label anglais remet les pendules à l’heure avec cette brillante compilation, avec quelques années de retard il est vrai. Mais la patience est parfois récompensée et il arrive que de petits miracles se produisent dans l’industrie du disque. Spencer WIGGINS, en retraite depuis 2001, avait enregistré un disque de Gospel sur le label Tavette, malheureusement non distribué en dehors de la Floride, mais c’est bel et bien cette publication qui allait le remettre en scelle. Devenu diacre, Spencer allait enchaîner avec trois nouveaux CD de Gospel. En 2018, le chanteur participait pour la troisième fois au Porretta Soul Festival accompagné de son frère. La line-up proposée est incomplète et demeure suggestive.

⃰Percy Wiggins n’a enregistré que cinq singles : 2 pour RCA, 2 chez ATCO et 1 pour Abet. En 1989, il sortait des oubliettes en gravant un single en compagnie de Ben CAULEY. Depuis 2011, Percy est ressorti du bois en intégrant les BO-KEYS, le groupe de Scott BOMAR.

A lire aussi en SOUL par LE KINGBEE :


Irma THOMAS
Wish Someone Would Care (1964)
Un must de la soul sixties sous forme de ballades




Don BRYANT
Precious Soul (1969)
Bon chanteur de deep soul avant de devenir pasteur


Marquez et partagez





 
   LE KINGBEE

 
  N/A



- Spencer Wiggins (chant)
- Gene 'bowlegs' Miller (trompette)
- Wayne Jackson (trompette)
- Ben Cauley (trompette)
- Jack Hale (trombone)
- Joe Arnold (saxophone)
- Andrew Love (saxophone)
- Jimmy Johnson (guitare)
- Duane Allman (guitare 12)
- David Hood (basse)
- Roger Hawkins (batterie)
- Spooner Oldham (piano, orgue)


1. Once In A While (is Better Than Never At All)
2. Old Friend (you Asked If I Missed Her)
3. The Kind Of Woman That's Got No Heart
4. Lonely Man
5. He's Too Old
6. I'm A Poor Man's Son
7. What Do You Think About My Baby
8. Anything You Do Is All Right
9. I'll Be True To You
10. Take Me Just As I Am
11. That's How Much I Love You
12. I Never Loved A Woman (the Way I Love You)
13. Who's Been Warming My Oven
14. Walking Out On You
15. Soul City Usa
16. Sweet Sixteen
17. Uptight Good Woman
18. Lover's Crime
19. My Love Is Real
20. The Power Of A Woman
21. I'm A Poor Man's Son
22. That's How Much I Love You



             



1999 - 2025 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod