Recherche avancée       Liste groupes



      
ZYDECO  |  STUDIO

L' auteur
Acheter Cet Album
 

ALBUMS STUDIO

2010 Doin' The Crabwalk

T-LOU - Doin' The Crabwalk (2010)
Par LE KINGBEE le 19 Novembre 2020          Consultée 904 fois

A l’heure où nos édiles politiques et nos média (de beaux paniers de crabes) ne cessent de nous plomber le moral par leur incohérence, leur inefficacité et leur irresponsabilité, pourquoi ne pas s’offrir un petit moment de gaité avec T-LOU ?
Si l’on regarde bien la pochette, on remarque en bas sur la gauche trois crabes qui remontent la plage, probablement pour casser la croute, et ces trois bestioles avec leurs gros yeux paraissent autrement plus sympathiques que ceux du panier cités plus haut. Mais c’est là un autre débat !

De son vrai nom Joseph Louis Eaglin, T-LOU⸋ est originaire de Grand Coteau, une bourgade située à une vingtaine de bornes au nord de Lafayette. Fils de fermiers, il se met à la guitare à quinze ans, intègre le groupe de son collège comme bassiste. Une fois son diplôme en poche, il s’installe quelques temps à Houston avant de s’établir durablement dans la région de Los Angeles, sous le soleil de la Californie, là où une importante communauté créole a immigré de Louisiane.
C’est en assistant à un concert de Clifton CHENIER qu’il décide de se mettre à l’accordéon, une manière de retrouver une partie de ses racines musicales. Ancien élève du King of Zydeco, Joseph devient T-LOU (petit Louis en créole) et monte son propre groupe à l’orée des années 80. En 1985, il enregistre un premier disque pour le label Maison De Soul au sein de T-Lou and his Los Angeles Zydeco Band. La formation participant à de grands festivals écume la Californie. Il faut attendre 1993 pour que le nom de T-Lou réapparaisse dans la presse spécialisée avec la sortie de Super Hot, un second opus édité par le même label et salué par la critique internationale.

Pour T-Lou, si la musique est avant tout un passe-temps, cela ne l’empêche pas de devenir le chef de file du Zydeco en Californie. Il prend le relais sur la Côte Ouest de Queen Ida, première femme accordéoniste à diriger un orchestre Zydeco, d’Al Rapone, leader de Zydeco Express et frangin de la Reine Ida. S'il se produit sur tout le territoire, principalement sur la Cote Ouest, T-Lou ne connaît qu’un succès d’estime en Europe où aucun programmateur n’a jamais pensé à l'inviter.

En 2010, à près de 70 balais, et 17 ans après son second opus, l’accordéoniste surgissait, tel un diable de sa boîte, pour nous balancer une petite bombe avec ce Doin’ The Crabwalk. Si le titre peut surprendre avec cette invitation à danser sur les pas d’un tel animal, il faut prendre la chose au second degré. Après tout, Henry MANCINI avait connu en 1962 un succès inattendu avec "Baby Elephant Walk", un instrumental qui allait agrémenter une scène du film Hatari. Donc, après des éléphants, pourquoi pas des crabes ?

Remarquable autoproduction distribuée en son temps par CD Baby, cette marche de crabes regroupe un beau parterre de musiciens rompus au Jazz et à la Soul : le saxophoniste D.A. Bookman (ex-Marvin GAYE, Edwin STARR, Sheryl CROW, Hank Ballard), le bassiste Lawrence Baulden (ex-Irma THOMAS, Arthur Adams, Smokey Wilson), les guitaristes Zeke Zirngiebel (ex-Warren Zevon, Cutting Edge) le légendaire Jimmy Scott (Ray CHARLES, Little RICHARD, Bobby RUSH, Solomon BURKE) et le producteur batteur Phil Bloch (ex-Terry Evans) dont on peut regretter qu’il ne donne pas un coup de fiddle.
Si T-Lou est un accordéoniste parfois limité, il a la sagesse de ne pas s’aventurer dans des gammes et des passes qu’il ne maîtrise pas. Capable de jouer aussi bien sur un double rang que sur un accordéon à boutons (cajun) T-Lou privilégie avant tout le groove et le rythme. "Crabwalk" lance le disque sur de bons rails avec un mid-tempo alliant two step nonchalant et marche à la sauce New Orleans. La guitare de Zirngiebel et le sax s’offrent quelques rafales tandis que le washboard semble inépuisable. Le tempo s’accentue sur "Work That Body (Make It Funky)" un two step basé sur un riff aussi endiablé que répétitif. "Raise The Roof" s’avère dynamique à souhait, un excellent morceau à destination des amateurs de danse, le washboard et l’accordéon s’entrelacent, chacun de deux instruments refusant de capituler. La cadence s’accélère encore sur "Wobble Wobble", une tuerie de two step, la guitare et le sax venant donner des coups de boutoirs.
Si "Dirty Rice" avec son intro de chœurs un brin cacophonique pouvait orienter vers un titre de Soul, l’accordéon nous plonge dans une ambiance plus rurale pour un titre maîtrisé de bout en bout. A force de pousser trop sur la bride, il arrive un moment où il faut laisser reposer les chevaux avant qu’ils ne s’affalent épuisés. "Zydeco LA LA"» s’apparente dès le début à un titre rural dans lequel T-Lou évoque les traditions, parle de Clifton CHENIER qu’il a vu en concert quand il était jeune, sur un tempo qui tient plus de la berceuse que du two step. Chassez le naturel, il revient au galop au bout de 40 secondes, la formation reprenant ses bonnes habitudes en dynamisant l’allure.
Il faut en fait attendre "That Girl Is Fine" pour souffler enfin avec ce slow chevauchant le New Orléans Sound et une Soul langoureuse rappelant les Isley BROTHERS ou les METERS. "Hitchihiking On The 405" oscille entre valse rapide et two step. "The Monkey Thing" vaut avant tout par son jeu de question réponse, les choristes répondant au chanteur pour renforcer la puissance, un peu à la manière de certains psaumes religieux. Un titre simple qui finit cependant par nous hacher menu. "O Bye Bye" diffuse une ambiance plus nostalgique sur un rythme de valse medium. Grand moment avec "O Grandma", un Zydeco plus rural dans lequel le chanteur évoque une grand-mère qui fait des ourlets de pantalons toujours trop longs. Histoire vécue sans nul doute. Comme le veut la tradition, T-Lou a composé un titre à sa gloire avec « "T-Lou Shuffle", un two step qui permet aux danseurs de ne pas monter trop haut au niveau cardio. Le disque s’achève sur "My Baby’s In Heaven Tonight", un Slow Soul comme on en entonne du coté de la Nouvelle Orleans ou de Sam COOKE.

Certains titres se démarquent de la production traditionnelle louisianaise par leurs paroles. T-LOU est un excellent auteur qui sait s’appuyer sur des textes humoristiques au second degré souvent présent. A-t-il rattrapé l’homme singe qui lui a piqué sa femme ("The Monkey Thing ") ? Le vieux grigou a-t-il réussi à emmener danser la belle qu’il a prise en stop sur la route 405 ? Autant de questions qui demeurent sans réponse, mais vu l’énergie déployée, on n’a peu de doute sur la réussite du bonhomme.

Cette belle autoproduction bien troussée est remarquablement produite. L’orchestre superbement soudé est rompu au groove, au Zydeco et aux dance floors. Enfin, T-Lou envoie le pâté à l’accordéon mais sait laisser reposer la sauce quand le besoin s’en fait sentir. Une invitation à la dance et au partage. Il faut être sourdingue ou cul-de-jatte pour ne pas taper du pied sur "Work That Body", "Raise The Roof" ou "Wobble Wobble", une vraie tuerie. Enfin, même si vous n’êtes pas amateurs de Zydeco, rien n’empêche les dames se s’offrir un madison sur la marche des crabes. Ce groupe rappelle par son énergie les Zydeco Dots et Jeffery BROUSSARD & The CREOLE COWBOYS.

⸋ T-Lou (aka Joseph L Eaglin) n’a aucun lien de parenté avec le guitariste Snooks Eaglin.
⃰ La musique la la désigne des nurseries. Au siècle dernier, les communautés créoles ou cajuns se réunissaient lors de fêtes de village ou de quartier. Ces soirées étaient destinées à échanger, à se restaurer et enfin à danser. Pour être tranquilles, les adultes déposaient les enfants dans des habitations sous la garde de volontaires ou de sœurs ainées. De ces endroits s’apparentant à des nurseries ou des garderies dans lesquelles on chantait des berceuses pour endormir les plus jeunes a dérivé l’expression « Musique La La », terme rattaché à la musique louisianaise. On peut aussi entrevoir un jeu de mot entre la la et LA LA, ce dernier se rapportant à Los Angeles.

A lire aussi en BLUES par LE KINGBEE :


Billy BRANCH
The Blues Keep Following Me Around (1995)
L'un des rois du marine band;




D.k. HARRELL
The Right Man (2023)
Première galette d'un jeune bluesman inspiré


Marquez et partagez





 
   LE KINGBEE

 
  N/A



- T-lou (chant, accordéon)
- Zeke Zirngiebel (guitare 1-2-4-5-6-7-8-9-10-12-13)
- Jimmy Scott (guitare 3-4-5-11, chœurs 2-3-4-5-11)
- Lawrence Baulden (basse 2-3-4-5-6-7-8-9-10-11-13, choeurs 2-3-4-5-11)
- Darryl Coleman (basse 1-12)
- Phil Bloch (batterie, chœurs 1-2-3-4-5-6-8-9-10-11)
- D.a. Bookman (saxophone 1-2-3-4-5-6-7-9-10-11-12-13, tambourin 7)
- Mahershal P. Simonet (washboard)
- Darlene Jones-pack (chœurs 1-2-3-4-5-6-8-9-10-11)
- Terry Evans (chœurs 1-3-6-7 9-13, chant 7)


1. Crabwalk
2. Work That Body (make It Funky)
3. Raise The Roof
4. Wobble Wobble
5. Dirty Rice
6. Zydeco La La
7. That Girl Is Fine
8. Hitchhiking On The 405
9. The Monkey Thing
10. O Bye Bye
11. O Grandma
12. T-lou Shuffle
13. My Baby's In Heaven Tonight



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod