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2021 Théo Charaf

Théo CHARAF - Théo Charaf (2021)
Par LE KINGBEE le 11 Décembre 2020          Consultée 1587 fois

En premier lieu, si nous pouvons nous réjouir du premier opus de Théo CHARAF, il convient également de saluer Wita Records, un nouveau label monté par Emmanuel Mercier, Eric Duperray (deux membres d’AUTOMATIC CITY) et Marina Daviaud. Par les temps qui courent, alors que de nombreux musiciens vont se retrouver sur le carreau faute de pouvoir exercer leur métier et de s’adonner à leur passion, une telle initiative s’avère des plus louable.

On sait peu de choses de Théo Charaf, et c’est bien normal puisqu'il s’agit ici de son premier disque. Mais la difficulté de sortir un premier album ne s’arrête pas là, effectivement la pandémie liée au Covid ont jusqu'à présent empêcher le guitariste de défendre son œuvre sur scène. Théo s’est établi à Lyon où il a été barman pendant huit ans. Certains amateurs de musique l’ont probablement fréquenté sans le savoir, Theo leur a servi des pintes de bière dans les salles de concerts où il bossait. En 2019, le barman a franchi le pas, entre le comptoir et la scène la distance est parfois très courte, Theo a ainsi donné son premier concert en solo il y a un an. Après avoir joué dans des groupes de Punk Rock locaux, Théo a pris divers chemins de traverse, s’est intéressé au Rock pour bifurquer par le Folk Blues. Un parcours pas si étonnant et qui s’inscrit dans la lignée de ses influences revendiquées.

La pochette de ce premier album éponyme ne renseigne guère sur son contenu. Cette ligne de chemin de fer pourrait éventuellement nous orienter vers le phénomène Hobo, registre lié aux travailleurs itinérants souvent sans domicile fixe parcourant le territoire dans des trains de marchandises, pour aller à la rencontre non pas du Diable, mais de petits boulots leur permettant de gagner leur croûte. Si le mouvement Hobo s’oriente principalement sur le continent américain, ce mode de vie a connu quelques condisciples connus : les guitaristes Utah Phillips, Woodie GUTHRIE, Pete SEEGER, Seasick STEVE, les écrivains Jack London, Jack Kerouac, John Steinbeck, le boxeur Jack Dempsey ou l’acteur Robert MITCHUM. Mais ce visuel avec ces rails et ces pins pourrait tout aussi bien nous emmener vers un paysage landais, savoyard ou alpin. Libre à chacun d’avoir sa propre idée ?

Enregistré à l’Electrophonic Recordings, le studio d’Hervé Bessenay, lieu bien connu des amateurs de Rockabilly (les Capitols, Rockhouse Trio, les Swindlers et les Noisy Boys) le disque nous propose dix pistes dont six compositions. Bon guitariste, Théo se révèle être un auteur intéressant faisant fi des étiquettes et des modes souvent superficielles. S’il faudra probablement plusieurs écoutes pour bien s’immerger dans cet univers minimaliste mais brut de décoffrage, on est de suite dans le bain avec "Vampire". La voix à mi chemin entre celle de Dylan et d’un zombi revenu d’entre les morts parvient à capter l’auditeur. S’appuyant sur un jeu en fingerpicking "Forward" s’annonce beaucoup plus doux. La guitare permet de tisser un patchwork bien moelleux. "Going Down" nous entraîne sur une route plus cahoteuse, la mélodie draine derrière elle un sentiment de mélancolie pas très éloignée d’une ambiance à la Jeffrey Lee Pierce (ex Gun Club). "In Vain" évoque certaines pièces acoustiques de John HIATT. S’il hausse parfois son timbre, les compositions dévoilent tout de même une certaine délicatesse comme en atteste" Wander Boy". Si "See The Man" peine à démarrer, on se laisse happer par les arpèges de guitare et un chant à cheval entre DYLAN et PETTY. Mais derrière toutes ces compositions, un dénominateur commun se dégage ; tous ces titres impulsent malgré les textes une ambiance pleine de quiétude et de sérénité.

Le lyonnais reprend "Oh Sister", titre figurant dans l’album Desire de Bob DYLAN. Cette fois, Théo n’est plus seul, il bénéficie de la participation de Léna Bessenay, cette dernière endossant le rôle joué par Emmylou HARRIS. C’est une petite pépite que nous assène le duo, Théo n’essaie pas de copier le barde Dylan mais nous délivre une version plus paisible entre oraison et ballade Folk. Si les poils de vos bras se dressent à l’écoute de ce morceau, ne vous étonnez pas : "Oh, sister, when I come to lie in your arms - You should not treat me like a stranger - Our Father would not like the way that you act …". Il s’attaque à "Waiting Around To Die" titre lugubre de Townes Van Zandt. Seul juste accompagné de sa guitare, le chanteur instaure une atmosphère sévère presque monastique. Si Van Zandt n’a connu qu’un succès limité avec cette chanson, Charaf s’en sort haut la main. Peut être la meilleure reprise avec celle du trio The Be Good Tanyas
Mais c’est avec deux standards enregistrés en 1931 par Skip JAMES que Théo nous scotche carrément. Avec un chant qu’on croirait sorti tout droit d’outre tombe, "Devil Got My Woman" restitue une intensité rare. L'intro à la resonator sur "Hard Time Killing Floor" impulse un climat totalement crépusculaire, le chant volontaire et le fingerpicking à trois doigts est une petite merveille. L’une des meilleures versions avec celles de Chris Thomas King (figurant dans le film "Oh Brother" des frères Coen), de Spencer Bohren ou celle plus récente du duo féminin Larkin Poe.

Si le one man band est à la mode depuis quelques temps, principalement pour des raisons financières, Théo Charaf ne s’occupe pas des tendances et du mouv, il nous renvoie vers un Folk Blues issu des forties. Le chant est puissant, parfois grondant, l’accent crédible et le jeu de guitare est simple et dépouillé. Mais la principale force de ce recueil assez austère, presque ascétique réside paradoxalement dans la diffusion d’un élan gorgé de sérénité et de quiétude. Par moment, on pourra déceler ici ou là quelques zestes d’Austin LUCAS et de Chuck RAGAN, quelques passages fugaces rappelant Neil YOUNG et DYLAN. Theo Charaf marche sur les traces de son confrère alsacien Thomas Schoefer. Si le caractère minimaliste risque de heurter certains auditeurs il n’en reflète pas moins une beauté stylisée.

Ce disque doit paraître mi janvier en version vinyle, numérique et digitale. Cette chronique provient d’un CD promotionnel.

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   LE KINGBEE

 
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- Théo Charaf (chant, guitare)
- Léna Bessenay (chant 6)


1. Vampire
2. Forward
3. Going Down
4. In Vain
5. Devil Got My Woman
6. Oh Sister
7. Wander Boy
8. See The Man
9. Waiting Around To Die
10. Hard Time Killing Floor



             



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