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2020 À La Ligne - Chansons D'Usine
 

- Membre : Mendelson, Bruit Noir

CLOUP / BOUAZIZ / RUFIE - À La Ligne - Chansons D'usine (2020)
Par JOVIAL le 19 Mars 2021          Consultée 819 fois

L'usine, l'écrivain Joseph PONTHUS y fût pour les sous, seulement pour les sous. Pas pour faire un reportage, encore moins pour préparer la Révolution. Débarqué en Bretagne en 2015, ce natif de Reims fait connaissance au gré de ses missions d'intérim avec un univers dont il n'imaginait guère la réalité, l'usine et ses lignes. D'abord les poissons, puis le tofu, les bulots et enfin l'abattoir. Il découvre un triste monde peuplé d'hommes et de femmes broyés, esclaves modernes au service d'une production qui doit absolument continuer. Les soirs et les week-ends, Joseph ne pense plus qu'à l'usine, son usine. Malgré la fatigue, malgré les douleurs, malgré les mauvais rêves, l'envie d'écrire s'impose cependant à lui, jour à jour, presque logiquement. Deux heures rognées chaque soir sur le repos, le couple, le repas et la balade du chien.

À la ligne paraît ainsi en janvier 2019, roman brut mais fascinant, long enchaînement de phrases sans ponctuation qui, inlassablement, comme à l'usine, reviennent à la ligne. C'est également courant 2019 que la Station Service (1) laisse carte blanche à Michel CLOUP pour la mise en musique d'un livre de son choix, qui se porte alors sur les Feuillets d'usine. Toujours accompagné du batteur Julien RUFIÉ, le Toulousain reçoit également l'aide de Christophe MIOSSEC pour l'adaptation du bouquin, s'effaçant par la suite au profit du camarade Pascal BOUAZIZ (MENDELSON, BRUIT NOIR) au chant et à la guitare. Après une semaine de résidence, la grande première a lieu à la Carène de Brest le 7 mars 2020 (2).

L'évidence aurait voulu qu'À la ligne soit une œuvre de musique industrielle, quoi de plus normal lorsqu'on parle de chaînes automatiques et d'ouvriers brisés. Michel CLOUP est néanmoins resté fidèle au rock noisy de ses dernières productions. Le choix peut étonner, mais respecte parfaitement l'humeur d'un texte original déjà très marquant, lui laissant toute son humanité, sans caricaturer ni surenchérir inutilement. Le chant notamment, perfectible certes, retranscrit souvent bien cette idée d'un homme hébété, perdu au cœur d'un monde dominé par la fatigue et l'absurde, qu'un album trop indus aurait peut-être relégué au second plan. Le propos ne porte pas tant sur l'usine en elle-même, plutôt sur l'être, « mercenaire » de la production, et ses émotions.

Sans pour autant avoir égoutté du tofu pendant neuf heures ni poussé des cadavres de bovins, quiconque aura ne serait-ce qu'une journée travaillé à la chaîne retrouvera ainsi beaucoup de choses à l'écoute de ce disque. La souffrance moral et physique déjà, cette torpeur affreuse qui ne s'estompe jamais, dont le trio tire des morceaux saisissants ("Les Néons", "Le Week-End"). D'une ironie acide, "C'est Fantastique" ouvre aussi l'album en sublimant douleurs et fatigue, exercice d'hymne inversé par la suite repris sur "À la chaîne" et "Travailleurs de l'usine". Il y a aussi les songes, rêves d'une Terre sans usine ou visions sanguinolentes, et le diptyque "La Nuit" et "Cauchemars" d'une justesse vertigineuse. Il y a le travail évidemment, éreintant, dégueulasse, ces odeurs de merde et de poissons crevés, ces giclures de sang et ces animaux mis en pièces ("Tofu", "Les Bulots", "À l'abattoir"). Il y a l'émouvant "Pok Pok", le chien, qui lui ne sait rien. Il y enfin les collègues, ces gueules cassées taiseuses, qui parfois poussent la chansonnette en se demandant "où est le bonheur ?", et conviés sur "La Pause". L'écrivain lui-même nous lit quelques lignes aux deux dernières pistes, dans un final amer mais ô combien fort – d'autant plus aujourd'hui depuis la disparition de l'auteur, récemment emporté par le cancer.

Certains titres sont clairement en-dessous, particulièrement "À l'abattoir 1" et "À l'abattoir 2", moins convaincants, mais dans l'ensemble À la ligne est une adaptation touchante, à (re)vivre d'une traite comme une semaine d'usine accélérée. Un bel album, et un bel et dernier hommage aussi à Joseph PONTHUS.

Note réelle : 3,5/5

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- Michel Cloup (voix/guitare/...)
- Pascal Bouaziz (voix/guitare)
- Julien Rufié (batterie/claviers/...)
- Guests :
- Joseph Ponthus (voix)
- Sébastien (voix)
- Patrice (voix)
- Patrice L (voix)
- Brendan Simon (voix)
- Michel Donias (voix)
- Nicolas Penkerc'h (voix)
- Morgan Lv (voix)


1. C'est Fantastique
2. À La Chaine
3. Les Néons
4. Travailleurs De L'usine
5. Le Tofu
6. Le Week-end
7. Les Bulots
8. À L'abattoir
9. Penser À Autre Chose
10. À L'abattoir 2
11. Pok Pok
12. À L'abattoir
13. La Pause
14. La Nuit
15. Cauchemars
16. A La Ligne
17. Il Y A



             



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