Le hot rod en couverture, on a le choix : soit c'est un opus du blondin matou Brian SETZER, soit il s'agit du révérend Billy GIBBONS, venu secouer ses ouailles pour cause que ZZ TOP est en vacances à durée indéterminée. Et le son ne trompera personne, il s'agit de la Les Paul Pearly Gates bourrue du prospecteur et non de la Gretsch G6120 limpide du chat de gouttière. Un troisième album solo donc, loin de ses comparses, Billy doit trouver le temps long... Marié qu'il est, et avec des bagnoles plein ses garages. Pour l'instant sa disco solo s'articule sur des éléments bien personnels à mon guitariste préféré, la chaude voix enrobe des titres souvent pêchus, pas géniaux mais cools, et les grattes sont parfois sublimes, mais pas toujours. Bref, on se lance en compagnie du hot rod les gars ?

Un petit riff assez agressif ouvre l'album, "My Lucky Card" a pour mission de situer les débats pour ce nouvel album. La messe s'annonce moderne, le son est résolument à la pointe, très compressé, rien de bien nouveau mais c'est sympa. Rythme pressé, presque stressé sur "She's On Fire", voilà qui n'est pas fréquent avec le texan plus connu pour les ambiances laid back, les coups de pattes en rythmique sont ceux du guitar hero barbu, pas le moindre doute. Billy continue le sermon avec la trépidante "West Coast Junkie", ou il narre de sa manière unique les aventures de divers branlos de l'autoroute. On attend toujours le solo, l'instant d'exception... Bah pas pour cette fois non plus.

On s'étonnera de la lourdeur du son sur "More-More-More", et on se dit qu'à nouveau, le révérend est à l'avant garde des bluesmen en matière d'effets, après le cyber boogie d'Eliminator en 83, le voilà qui continue cette fois avec un son qui tabasse quatre décennies plus tard. La lenteur consommé de "Spanish Fly" semble calculé de bout en bout, c'est sur ce genre d'ambiance que Billy trouve ses meilleurs moments. En bon Tejano, Billy aime chanter dans la langue de Cervantès, cette fois sur "Hey Baby, Que paso", au rythme festif sympa, et au solo de fort belle allure, il y en a toujours quelques uns de très réussi, l'album vaut d'ailleurs souvent grâce à cela.

Pas de doutes, la crépusculaire "Desert High" est bien entendu le momentum de cet album, et le titre à écouter en priorité. On y entend les rattlesnakes ramper sur le sol, on ressent la morsure du soleil, le manque d'eau, c'est bien simple, on s'y croirait, faites l'expérience vous verrez ! On se croirait presque dans le désert d'Arizona avec Heisenberg en train de faire de la metamphetamine, ça donne. Un slow blues à la "Blue Jean Blues" se propose à nos oreilles, il s'intitule "Vagabond Man". La voix de Willy G, graveleuse à souhait, passe merveilleusement sur ce genre de titres crépusculaires, d'autant que cette fois, Pearly gates sonne divinement, quelle association tout de même !

Le reste oscille entre le boogie rock de "Shuffle, Step & Slide", avec de jolies coups de pattes de notre pasteur. Le rythme dépote bien mais il manque un grand solo pour postuler au rang supérieur. Puis nous sommes trop répétitifs sur "Stackin Bones", c'est un peu facile, on se dit que Billy peut pondre une composition de ce genre toutes les cinq minutes. Ok, "S-G-L-M-B-B-R" présente un solo réminiscent de l'époque Eliminator / Afterburner et la route est toujours présente, au point de la personnifier sur la tressautante "I Was A Highway", à la pointe de l'humour, Billy !

La musique du révérend GIBBONS ne ressemble à aucune autre. On sait en compagnie de qui on se trouve immédiatement et sans le moindre doute, le jeu consistant à trouver dans les titres rock et blues de bon aloi qui compensent ses albums un titre d'exception. A nouveau, l'addition ne bouge pas, je conseille toutefois l'écoute de "Desert High" et pourquoi pas de "Vagabond Man" pour se tirer un petit sourire en constatant que le guitar hero est toujours bien vivant, même si caché derrière ses lunettes, sa toque et sa barbe. Rien de nouveau sous le chaud soleil texan, mais l'instant se laisse apprivoiser sans surprises.