Après un premier album et des prestations scéniques qui ont défrayé la chronique, BLACK WIDOW décide de lever le pied sur son image sataniste afin de conquérir une plus large audience. De fait, ce second disque ne possède pas le côté sulfureux que les paroles donnaient à son prédécesseur. Autre évolution, Bob Bond (basse) et Clive Box (batterie) se voient remplacés par Geoff Griffith (basse) et Romeo Challenger (batterie) qui participent tous les deux à la composition et sont crédités sur trois titres chacun.

Si le décorum et l’image du groupe changent radicalement, ces modifications n’ont pas beaucoup d’impact sur la musique et BLACK WIDOW pratique toujours ce Rock qui oscille entre Rock progressif et Rock 70’ (ce qui n’est guère étonnant au regard du fait que nous sommes en 1971). Style qui tranche fortement avec l’image sombre et inquiétante qui reste collée au groupe dans l’esprit du public. Il suffit d’écouter les harmonies vocales de "When My Mind Was Young" pour se convaincre que BLACK WIDOW n’a pas grand-chose à voir avec l’image de groupe dangereux qui lui colle à la peau.

Le Rock pratiqué est en effet assez propre, et très lumineux. On perçoit ça-et-là des connexions avec DEEP PURPLE et JETHRO TULL, comme cela est particulièrement sensible sur "Poser". Avec ces derniers, le groupe a en commun, une utilisation de la flûte et une certaine grandiloquence dans la construction de plusieurs titres. La proximité avec le pourpre profond est bien plus sensible. Notamment du fait de la couleur des guitares, du chant et de l’apport de touches Blues. Mais il serait inapproprié de parler de clones, car l’album contient des titres plus difficilement identifiables comme l’étrange "Mary Clark", un morceau au tempo apaisé et à la musique sobre qui est très axé sur les vocaux et qui peut évoquer certains des délires d’ALICE COOPER du milieu des années 70. Notamment dans sa partie finale dans laquelle les dialogues évoquent la folie.

Il en va de même avec le plus dynamique "Wait Until Tomorrow" dans lequel l’usage d’un saxophone propulse le groupe dans une autre dimension. Le groupe n’hésite pas à se lancer dans ce qui pourrait apparaître comme de longues digressions très en vogue à cette époque. C’est notamment le cas avec de longues parties de guitare et de claviers que l’on peut trouver dans "Tears & Wine" ou bien dans "Legend Of Creation".
Celles-ci sont suffisamment bien intégrées dans les morceaux pour ne pas les déséquilibrer. Et de fait, l’ensemble est assez bien construit et s’écoute avec plaisir. Et ce même si les transitions sont parfois un peu hasardeuses. C’est particulièrement le cas avec le très court "An Afterthought" dont on est en droit de se demander quel but recherchait le groupe en le plaçant entre "Wait Until Tomorrow" et "Legend of Creation".

Le point fort de BLACK WIDOW à cette époque réside dans la qualité de son interprétation et la douceur des mélodies. La basse et les claviers sont très présents et très efficaces. Par contre, on pourrait considérer que les chants (Kip Trevor et Geoff Griffith) manquent parfois d’un peu de personnalité. C’est probablement ce qui manque à cet album pour que celui-ci accède au statut de disque réellement marquant.