C'est l'heure du match retour pour Geir JENSSEN et Bobby BIRD. Après le téléphérique de Tromsø en 1995, les voici deux ans plus tard au douzième étage de la Rotonde de Birmingham pour une nouvelle performance en commun. À l'instar de Polar Sequences, l'idée était encore une fois de réaliser une œuvre musicale à partir de sons glanés sur place pendant une semaine, dans les rues et les parcs de la ville, et complétés de boucles, d'effets électroniques et de rythmes, en vue cette fois-ci d'un unique concert le 4 octobre 1997.

Si la froide et industrielle Birmingham, avec ses quartiers ouvriers et ses friches, laisse imaginer au départ un live sombre et rugueux, nos deux compères ont toutefois opté pour une autre voie. L'innocente promenade se transforme peu à peu en une déambulation onirique qui, contrairement au disque précédent, révèle des climats relativement sereins et doux, en particulier "Cannon Hill", "Gas Street Basin" et "Augusta Rd". Derrière les murs de briques rouges, la brume dévoile des jardins cachés, baignés dans la lumière rassurante d'un soleil hivernal. Au bord du vieux canal, le "Narrowboat" nous mène vers des contrées lointaines.
À l'inverse, la capitale des Midlands retrouve sa grisaille habituelle avec "The Rotunda", paralysée par la pluie. On s'attendrait presque à voir apparaître Beth GIBBONS derrière les vitres. Entre temps, on s'en retourne dans les hautes herbes, exaspérant au passage les "Daddylonglegs" (1) en chasse, dont les bruissements insectoïdes renforcent encore l'étrangeté de l'aventure. Après ces intermèdes rêveurs, la cadence du monde urbain se remet soudainement en marche, avec une arrivée au futuriste "Midpoint" qui conclut l'exercice de manière plus animée.

Les morceaux d'ambient dominent encore l'album, mais cela n'empêche guère quelques incursions vers le trip-hop ("The Rotunda") et l'electro ("Midpoint"). L'utilisation des field recordings se fait plus diluée au profit des rythmes qui gagnent en présence. Pour Geir JENSSEN, il s'agit d'un disque de transition et si Polar Sequences préparait Substrata, on sent déjà que Birmingham Frequencies est pour lui l'occasion d'expérimenter autre chose. D'une certaine façon, il anticipe ici la sortie de Cirque. Quant à Bobby BIRD, souvent plus en retrait, il impose tout de même sa patte par endroits, notamment sur la rythmée "Midpoint", dans un registre proche du fantastique Freefloater en 1995.

À côté de Polar Sequences néanmoins, que l'on peut sans hésiter considérer comme l'une des œuvres d'ambient majeures de sa décennie, Birmingham Frequencies apparaît comme une sortie plutôt négligeable, tant dans la discographie de The HIGHER INTELLIGENCE AGENCY que dans celle de BIOSPHERE. En cause notamment des enchaînements parfois abrupts et quelques ambiances un peu tièdes ("Gas Street Bassin", "Narrowboat"), d'où peut-être une immersion moins évidente. Pas de quoi s'en détourner pour autant, car l'album compte dans le même temps des moments d'une très grande quiétude, particulièrement les excellentes "Cannon Hill" et "Augusta Road" qui laisseront les meilleures impressions aux amateurs du genre.
À noter enfin qu'il s'agit du dernier véritable skeud de HIA avant longtemps, puisqu'il faudra désormais attendre vingt ans pour revoir son nom dans les bacs (2). Pour son camarade en revanche, beaucoup de belles choses sont encore à venir.

Note : 3/5

(1) Le titre fait référence aux 'daddy long legs", plus connus chez nous sous le nom de 'faucheux' !
(2) Avec la sortie en 2020 de l'E.P Discatron et de la compilation Preform.