Biff Byford, chanteur de SAXON depuis une époque que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître, fait partie de ces vieux roublards (Udo Dirkschneider en est un autre) qui courent après la nouveauté et avec la même frénésie et la même avidité que durant leurs jeunes années. Là où les mastodontes du rock s'accommodent d'un nouvel album studio tous les 10 ans (il est vrai que ce n'est plus dans les ventes d'albums que se trouvent l'argent), Biff fait preuve d'une régularité métronomique au moment de présenter au public le résultat de ses dernières expériences en studio. En cette année 2021, ce bon vieux Biff nous aura proposé deux albums dit "bébés-confinement", le plaisant "Inspirations" de SAXON au printemps, et maintenant ce "Red Brick City" publié sous le nom HEAVY WATER, qui cache une collaboration entre le fringant septuagénaire et son fils Seb, dont les activités artistiques et musicales ont débuté en 2020. Chez les BYFORD, on lave son heavy en famille.

Le père à la basse, le fils à la guitare, les deux au micro et à la production, et un peu d'aide extérieure pour compléter le tout. HEAVY WATER est un album "maison" qui s'inscrit dans plusieurs mouvances musicales, entre hard rock' 70's, rock plus modernes, sonorités grunge et blues. Il y a cette envie ostensible, néanmoins, de proposer une musique crue, assez directe et sans trop de fioritures, axée sur les ambiances, et jouant sur le charme de ses imperfections. Le début de l'album laisse penser que c'est le daron, Biff, qui va prendre en main les affaires, son chant éclipsant celui du rejeton sur le plombé "Solution" qui pose les bases d'un rock lourd, assez sombre, et marqué par de nombreuses répétitions des riffs. Finalement, le partage du chant, se traduisant à certains moments par de belles harmonies vocales apportant une richesse supplémentaire à l'ensemble ("Turn To Black") tournera finalement à l'avantage de Seb, dont le chant rugueux et authentique se fait véritablement marquant, une véritable révélation.

Car ce n'est pas au niveau des compositions que cet album semble le plus abouti. En sous-main, il y a ces influences hard / grunge et ces rythmes plombés, qui finissent par tous se ressembler. Quelques réminiscences des années 70 viennent varier un peu le propos, à l'image de "Follow This Moment" largement inspiré par LED ZEPPELIN (exception faite de cet horripilant saxophone). A côté de cela, les influences blues de "Medicine Man" fonctionnent sans nous transcender, tandis que "Personal Issue N°1", rock léger à la WEEZER, n'est pas spécialement notre cup of tea. Un moment de bravoure est plutôt à aller chercher du côté de "Tree In The Wind", qui sonne comme du U2 dans le texte, tant au niveau des mélodies que de la voix, Seb se faisant sosie vocal de Bono sur certaines envolées ainsi qu'au niveau du phrasé.

L'album est varié et ambitieux. Si Biff joue ici les chaperons du luxe, c'est bien son fils qui semble en tirer les manettes artistiques, pour un résultat qui ne sait pas trop dans quel style musical s'inscrire. Tant mieux, car il y en aura ici tout autant que pour les amateurs d'un heavy / rock aux grosses balloches que pour ceux qui recherchent un poil plus de subtilité. Entre les deux, en tous cas, reste la découverte Seb Byford à qui l'on souhaite un avenir radieux.