Recherche avancée       Liste groupes



      
JAZZ INSTRUMENTAL  |  STUDIO

Commentaires (2)
L' auteur
Acheter Cet Album
 

ALBUMS STUDIO

1964 Christmas Cookin

Jimmy SMITH - Christmas Cookin (1964)
Par LE KINGBEE le 20 Décembre 2021          Consultée 579 fois

Ah ! Noël, période que les enfants attendent tant, arrive enfin. A l’instar du bonhomme en rouge et de ses lutins, chez Forces Parallèles, les chroniqueurs se font parfois aider. Il faut en effet dénicher le disque adéquat agrémenté si possible d’une pochette bien représentative.

Si, comme tous les enfants, j’ai longtemps aimé cette période faste synonyme de gaité, de partage et de cadeaux, avouons que cela a bien changé depuis qu’on m’a appris qu’il s’agissait d’une vaste supercherie organisée par les consortiums de vente. Loin de moi l’idée de crier au complot, mais rappelons-nous simplement la déception engendrée par une naïveté bien naturelle.
Vous l’avez bien compris, votre humble serviteur n’est pas un grand fan de Noël, bien souvent les répertoires demeurent convenus et bien prêchi prêcha. L’industrie du disque anglo-saxonne se frotte les mains : tous les ans, Dieu que fasse, les retombées financières engendrent des rentrées importantes non négligeables. En Amérique, tous les musiciens et chanteurs sortent un jour ou l’autre leur disque de Noël, poussés ou non par leurs maisons de disques.

Chrismas Cookin’ m’est apparu comme une évidence. En premier lieu, il s’agit d’un instrumental, ce qui permet d’éviter d’entendre des textes qui échappent à mon bon entendement. En second lieu, c’est la pochette qui m’a tapé dans l’œil, avec ce beau Père Noël noir dans une Cadillac rouge flambant neuve. Avouons que ça a quand même plus de gueule que de voir Dolly Parton ou Sinatra avec un sourire Ultra Bright posant à côté d’un sapin ou d’un bonhomme de neige. Troisième et dernier argument, la période paraissait propice pour que Jimmy SMITH, brillant organiste ayant traversé les décennies, fasse son entrée sur le site.
Signalons à toute fin utile que notre Jimmy n’a aucun lien avec son presque homonyme Jimmy Smits, acteur latino-américain ayant joué dans les séries "NYPD Blue" et "La Loi de Los Angeles". Profitons de l’occasion pour revenir brièvement sur le parcours de cet organiste reconnu de la scène internationale.

James Oscar Smith naît à Norristown, à un jet de pierre de Philadelphie, en 1925. La date de naissance prête à confusion, sans doute dans un souci de jeunisme, Jimmy prétendait parfois être né trois ans plus tard. Gamin, il se lance dans l’apprentissage de la contrebasse et du piano. A 9 ans, il remporte un prestigieux concours de piano avant de s’orienter vers l’orgue. A sa démobilisation de l’US Navy, il intègre la Royal Hamilton College of Music au Canada, se perfectionne ensuite dans l’école de Leo Ornstein, chez lui, à Philadelphie. En 1951, Jimmy intègre les Sonotones, l’orchestre de Don Gardner. Sur la scène de Philadelphie, il enchaîne au sein de nombreuses petites formations de Jazz, de R&B et de Doo Wop. Il se met définitivement à l’orgue en 1954 avant d’être repéré deux ans plus tard par Alfred Lion, patron du mythique label Blue Note, qui l’embauche aussitôt. Dès son premier disque, l’organiste gagne le surnom d’Incredible. Jimmy Smith reste l’un des meilleurs contributeurs de l’Hammond B3 rattaché au mouvement Hard Bop, en compagnie d’Horace SILVER, Art BLAKEY, Clifford Brown ou Sonny Rollins.

Christmas Cookin’ provient de deux sessions enregistrées le 20 avril et le 29 septembre 64 dans les studios de Rudy Van Gelder, à Englewood Cliff, ville natale d’Emily REMLER et Sarah Vaughan. Ingénieur du son réputé, Van Gelder avait pour habitude de convier les musiciens à de longues répétitions avant de passer à l’étape de l’enregistrement. C’est là que sont mis en boîte quelques-uns des disques de référence du Jazz 60’s : A Love Supreme (John COLTRANE), Point Of Departure (Andrew HILL) ou le On Impulse! de Sonny ROLLINS. La première session (pistes 2-6-8) résulte d’un enregistrement en trio tandis que la seconde bénéficie de l’orchestre de Billy Byers, une troupe comptant près de 20 musiciens. Quand, plus haut, je signalais que Noël est souvent une question de sous, ce disque est édité une première fois par Verve Records sous le titre Christmas 64 en 1964. Deux ans plus tard, il apparaît avec une pochette différente qui a, selon nous, un peu plus de gueule, sous le titre Christmas Cookin’. En 1983, alors que le disque est épuisé ou dans les bacs des soldeurs, Verve le réédite, un procédé destiné à se remplir les poches et satisfaire les amateurs d’Hammond. Si l’entreprise pouvait s’avérer louable, avouons qu’on peut aussi y voir de la cupidité au vu de la discographie pléthorique de l’Incroyable Jimmy Smith. Il y avait sans aucun doute des disques plus marquants à rééditer.

Examinons cette belle pochette. En arrière-plan, un paysage montagneux et enneigé, quelques sapins agrémentent une route, une grosse et rutilante Cadillac décapotable, rouge comme une tomate et un Père Noël tout sourire tenant un mystérieux cadeau emballé à la main tandis que sur les sièges arrière une multitude de paquets semblent nous tendre les bras. Pas de doute, cela donne envie !

"God Rest Ye Merry Gentlemen" ouvre les hostilités. Si les premières mesures font penser au générique de 2001 Odyssée de l’espace qui ne sortira que quatre ans plus tard, ce traditionnel issu du Folklore anglais et jésuite prend rapidement de l’ampleur. Enregistré sous forme de cylindre en 1908 par le Meister Glee Singers, le titre est repris en grande pompe par l’indéboulonnable Bing CROSBY dans version qui donnerait presque la larme à l’œil. Depuis la fameuse version cylindrée, la chanson a été reprise 1200 fois, (des EVERLY BROTHERS à André RIEU en passant par Mariah CAREY et EAGLES OF DEATH METAL). Des interprétations souvent pénibles pour qui n’est pas anglo-saxon. On conseille cependant la version de Loreena McKENNITT pour ses arrangements. Ici, on échappe au moins aux paroles et on se laisse prendre aux lignes de basse jouées avec la main gauche alors que la droite ponctue la chanson d’énergiques soli.
La pilule est plus dure à avaler avec "Jingle Bells", œuvre d’un dénommé James Lord Pierpont. Ce classique archi-rabâché, lui aussi gravé sur cylindre en 1889, aurait connu près de 1500 reprises. Chez nous, Francis Blanche a l’idée de l’adapter sous le titre "Vive le vent". Si le duo Country Lonzo & Oscar en délivra un étonnant pastiche avec "Jangle Bells", il faut avouer que le son des clochettes a de quoi horripiler. Ici, pas de grelots mais une interprétation largement plus subtile que la moyenne. C’est autre chose que la récente version de MIKA. Heureux sont les sourds, comme dirait l’autre !
On reste dans le traditionnel avec "We Three Kings (Of The Orient Are)", composition de John Hopkins, un diacre de Pennsylvanie. La référence aux rois mages guidés par une étoile apportant des offrandes à Jésus passe à la trappe, faute de paroles. Repris principalement par des chorales mais aussi par les BEACH BOYS, Patti SMITH (sans lien avec Jimmy) ou Pink Martini, ce titre connaît surtout de nombreuses versions instrumentales. Jimmy Smith et le Ramsey Lewis Trio en délivrent selon nous les versions les plus swing.
Cette face A s’achève avec la guimauve super larmoyante de Mel Tormé, "The Christmas Song". C’est à croire que tous les Américains capables de chanter ont repris la chanson (de Nat King COLE à Peggy LEE en passant par James BROWN et Diana ROSS). Fort heureusement, l’instrumental permet qu’on échappe au texte et délivre une sonorité à la Count Basie, l’orgue étant renforcé par une imposante section cuivre. Il paraissait difficile d’éviter Irving Berlin, Smith lui reprend "White Christmas", un incontournable chant de Noël. Ce standard fait toujours recette, le Billboard vient de recenser 22 nouvelles versions éditées entre octobre et novembre de cette année. Après un déluge de cuivres, l’orgue reprend ses prérogatives en nous distillant de délicats volutes, pas de quoi sauter au plafond mais on échappe aux paroles cruches et balourdes du Sieur Bing CROSBY.
Enregistré pour la première fois en 1934 par Eddie Cantor lors d’une émission radio célébrant Thanksgiving, "Santas Claus Is Coming To Town" connaît plus de mille versions dont certaines invraisemblables (SLADE, Bootsy COLLINS, The Trammps). Jimmy Smith délivre une version classique et sans parole bénéficiant de délicats nappages d’orgue, dans un style proche de Jimmy McGRIFF, Jack McDuff ou Rhoda Scott.
Publié dès le milieu du 19ème siècle, "Silent Night" est l’adaptation anglophone de "Still Nacht, Heilige Nacht" de souche germanique. Si les cors, trompettes, tubas et bugles tissent une ambiance teintée de sapins et de neige, l’orgue s’écarte résolument du droit chemin pour dévier sur un relief à mi-chemin de l’improvisation. Ce titre chanté dans les tranchées lors de la Première Guerre serait à l’origine d’une trêve tacite entre combattants des deux camps. Une version bien plus goûteuse que le Douce Nuit, Sainte Nuit de la paire ZAZIE/CALOGERO.
En fermeture d’album, Smith reprend "God Rest Ye Merry Gentlemen" en version trio dans le plus pur style des Organ Jazz Trio.

Entièrement instrumentale, cette galette permet d’échapper aux traditionnels chants de Noël et met en exergue le talent de l’un des plus grands artisans de l’orgue Hammond. Qu’il soit accompagné d’un important orchestre ou en formule trio, Jimmy Smith diffuse ici toute sa délicatesse. Son entente avec Quentin Warren, fidèle accompagnateur et adepte de la Stratocaster, et le batteur Bill Hart (ex-Wes MONTGOMERY) reste un modèle du genre en formule Organ Trio. Bien qu’initialement intitulé Christmas 64, ce disque apparaît sous le titre Christmas Cookin avec sa seconde pochette. Le disque a depuis été réédité en vinyle et CD avec deux titres bonus.

PS : Remerciements à Philippe Lespié alias "les pieds dans le plat" pour le prêt de ce disque.

A lire aussi en JAZZ par LE KINGBEE :


IF
If Europe 72 (1997)
Un live emblématique du jazz rock 70's




TRIFLE
First Meeting (1971)
Un unique disque mais que du bon


Marquez et partagez





 
   LE KINGBEE

 
  N/A



- Jimmy Smith (orgue)
- Quentin Warren (guitare 2-6-8)
- Kenny Burrell (guitare 1-3-4-5-7)
- Art Davis (basse 1-3-4-5-7)
- Bill Hart (batterie 2-6-8)
- Grady Tate (batterie 1-3-4-5-7)
- George Devens (percussions 1-3-5-7)
- Jimmy Cleveland (trombone 1-3-4-5-7)
- Chauncey Welsh (trombone 1-3-4-5-7)
- Paul Faulise (trombone 1-3-5-7)
- Tommy Mitchell (trombone 1-3-5-7)
- Bernie Glow (trompette 1-3-4-5-7)
- Danny Stiles (trompette 1-3-4-5-7)
- Ernie Royal (trompette 1-3-4-5-7)
- Joe Wilder (trompette 1-3-5-7)
- Jim Buffington (cor 1-3-5-7)
- Don Corrado (cor 1-3-5-7)
- Earl Chapin (cor 1-3-5-7)
- Morris Secon (cor 1-3-5-7)
- Harvey Phillips (tuba 1-3-4-5-7)
- Joe Newman (bugle 1-3-5-7)
- Margaret Ross (harpe 1-3-4-5-7)


1. God Rest Ye Merry Gentlemen
2. Jingle Bells
3. We Three Kings (of The Orient Are)
4. The Christmas Song
5. White Christmas
6. Santa Claus Is Coming To Town
7. Silent Night
8. God Rest Ye Merry Gentlemen



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod