En Islande, les couleurs peuvent être magnifiques, embellies qu’elles sont pas la pureté de l’air et les contrastes incroyables. Vous m’avez souvent entendu glorifier la puissance créatrice de l’île de glace avec beaucoup d’emphase et nous voici face à une nouvelle occasion de briller artistiquement. La plupart des groupes de metal sont d’obédience black, viking ou indus. Mais voilà un trio de lascars pour lesquels les couleurs, l’éclate et les substances prohibées ont une certaine importance… Me demandez pas ou on trouve de la beuh à Reykjavik – en dehors de la capitale ça semble complexe -, je ne fume pas, et mon fils ne vient pas assez souvent avec moi en Islande pour avoir la réponse à cette question essentielle. Cependant, le groupe originaire d’Alftanes – un bled paumé entre l’aéroport et la capitale semble avoir trouvé un revendeur quelque part, vous allez voir !

Car ici mesdames et messieurs, c’est le domaine de la fumette, le paradis des pipe à eaux, le royaume des spliffs, et on imagine fort bien notre trio évoluant dans un nuage de Marie-Jeanne permanent, sous les aurores boréales de la pochette. D’ailleurs malgré une discographie déjà conséquente de cinq albums, Oskar - chant et guitare – Alex - basse - et Stefan – Batterie – sont de jeunes minots de même pas trente berges. Ce Monument est donc la cinquième offrande du groupe, qui s’est imposé dans le genre certes dénominé Stoner aujourd’hui, mais qui comme leur ex label Nuclear Blast le surligne n’est rien d’autre que du rock psychédélique. C’est donc sous cette appellation de style que vous allez les retrouver sur FP, alors qu’il s’agit du premier opus chez Napalm records.

La vidéo déjanté de "Crystallized", tourné au black rock de Hjörleifshöfð, puis au lac glaciaire du Jökulsárlón comme nombre de pubs françaises et de multiples films, est un titre très sympa complètement psyché. Les mecs ressemblent et vivent leur musique comme s’ils étaient en 1970, voyez donc ce solo épileptique sur cette basse ondoyante comme si Jimmy et John étaient à la manœuvre. La tressautante "Sharp Teeth" sonne tel un BLACK SABBATH en tout léger et très syncopé, la complexe mélodie est moins facile d’accès mais le titre reste cool, avec encore un fort joli solo de guitare. Enfin, "Can’t Get You Off My Mind" achève cette ronde de singles avec son riff tournoyant, le refrain est très chouette on a de suite envie de chanter avec Oskar, la vidéo est hilarante.

"Whispers" ouvre superbement l’album, dans une ambiance presque aquatique d’un psychédélisme absolu. Le riff dantesque n’empêche pas la voix claire de dominer le titre et l’ensemble a une gueule terrible. "Said & Done" nous rappelle au bon souvenir des speedfreaks de HAWKWIND, avec cette même violence des riffs grésillants. Le refrain est en revanche une nouvelle preuve éclatante du sens mélodique des islandais. La course sous speed de "Forgotten" nous plonge dans une ambiance que ne renierait pas les finnois d’AMORPHIS, la voix claire d’Oskar y sonne superbement. Intro de guitare acoustique puis riff qui cette fois aurait pu sortir de l’escarcelle des furieux de SKYCLAD, "Dark Times" - sur un riff toutefois assez light – impose un chant qui évoque des images de swords and sorcery, ce qui n’est pas si étonnant vu que nous sommes au pays des elfes et des trolls.

Enfin, "Torn In Two", comme son titre le laisse imaginer, se présente comme un bon direct dans la tronche, le riff est plombé et met en orbite la voix d’Oskar. Mais VINTAGE CARAVAN est aussi un groupe qui explore les portions plus éthérées de la musique ainsi, on retourne vers les sixties pop sur "This One’s For You" et c’est bien agréable, assortie d’un solo CLAPTONien, oui oui, ce mec est un excellent gratteux croyez moi ! "Clarity" est un long morceau de huit minutes en forme de mid slow, doux et rêveur, les influences progressives y reviennent jusqu’à la délivrance d’un solo de très belle tenue.

Plusieurs éléments sont à retenir, en premier lieu le talent évident du chanteur Óskar Logi Ágústsson qui possède à la fois une vois claire de tout premier choix et un feeling de guitariste assez énorme, ce qui lui permet de créer des solos complexes et originaux remarquables. Bien sur, nos babas cools hippies vouent u culte immodéré aux dinosaures des seventies, mais ils bénéficient aussi d’un excellent son qui grésille à peine, juste comme pour souligner leur appartenance au monde du psychédélisme. L’album oscille sans cesse entre un bon trois et un quatre, je choisis donc d’arrondir à la supérieure pour le chant magnifique et en anglais de ce nouvel espoir islandais !