Eh non ! Plus de vingt ans après son dernier opus en date, il est clair que le duo des dingues made in Chicago de STABBING WESTWARD n’a jamais rendu l’âme, mais était plutôt entré en hibernation pendant toutes ces années. Christopher Hall et Walter Flakus, les ex-potes de collèges, ont remis le couvert et souhaitent reprendre leur place parmi les grands de l’industriel. Leur retour aux affaires date de 2016, et voyez donc le temps qu’il leur a fallu pour pondre leur album ! On a toutefois droit à une très belle pochette qui en dit long sur le contenu à suivre : glacé, mortifère et esthétique ? On va bien voir !

Le retour attendu des ricains trouve des réponses évidentes dès "I Am Nothing" qui ouvre l’opus avec rage et puissance, comme un KILLING JOKE dont les refrains comporteraient quelques incidences pop, la voix bien mainstream de Christopher n’y étant pas pour rien. Bien sûr, nous jouxtons le pré carré de Trent REZNOR en cette occasion, mais c’est un bon direct bien raide dans l’estomac pour débuter. On croirait presque entendre MINISTRY sur le riff de "Wasteland", un titre qui va déchirer en concert avec ses vibrations empruntant aussi un peu à NINE INCH NAILS, un peu à RAMSTEIN. Nous sommes à la confluence et c’est excellent. Cette fusion presque improbable rend superbement, rehaussée par un chant magnifié de Christopher Hall qui passe de la douceur à l’agression avec une facilité déconcertante. Pour moi, le titre de cette livraison.

On retrouve les influences synth pop à la DEPECHE MODE sur "Damaged Goods", transcendées par des rythmiques en mode marteau pilon et des sequencers telluriques qui n’envient rien à aucun des monstres du genre, avec un bridge quasi thrash. L’atmosphère est calme, presque attentiste sur "Push", on sent le titre monter en puissance, et éclater sur le refrain pop. Sympa. Tout ceci est encore très MODien. Damned, Martin GORE, sors de ce corps ! "Ghost" semble tout droit sorti d’une session des Anglais de Basildon, les mélodies sont presque drôles de ce point de vue. L’emballement évoque donc les rosbifs de PARADISE LOST, ouais c’est l’évidence ! Et c’est toujours aussi réussi !

Un véritable mur du son s’élève pendant les refrains de "Cold", c’est balèze et donne immédiatement envie de courir ! Puissance n’est pas ici un vain mot. D’ailleurs, "Ctrl Z" déchire tout sur son passage, à coups de sequencers psychiatriques, comme le faisaient il y a quelques temps les grands de la trance. Quelques inflexions bienvenues : la structure de "Crawl", comme son intro le laisse deviner, se veut très pop, même nantie de la puissance des effets sonores propres à STABBING. Puis on change du tout au tout avec "Dead & Gone" qui pioche plutôt dans son ensemble vers un punk pop à la GREEN DAY – ce refrain étonnant mais pas désagréable ! On en termine avec la diaphane "The End", qui s’étire dans l’onirisme, avec un battement de coeur synthétisé de belle allure.

Un joli retour qui mérite de l’attention sinon des fans de musique, du moins des fans du genre, qui trouveront ici de quoi sustenter leur soif de sons alliant puissance et froideur. On ne peut en outre pas dire que les cadors de l’industriel soient très productifs, et la présence en ces lieux de STABBING WESTWARD ne peut qu’aider à propager la bonne nouvelle. En tout cas, pour des semis retraités, les Américains ont su reprendre le mors aux dents avec dynamique et talent, car pas un seul des titres ici présents ne démérite. On ajoute un petit plus pour "Wasteland" et nous voici avec un joli quatre étoles des familles.