Native de Croydon, fief de Katie MELUA et CAPTAIN SENSIBLE basé au Sud de Londres, Désirée Annette Weeks voit le jour en 1968. Enfant elle s’intéresse au Reggae au Jazz et au Calypso par l’entremise de ses parents originaires de la Barbade et de Guyane. Au tout début des nineties, elle chante sous le pseudo de DES’REE, contraction habile de son prénom, enregistre une première démo expédiée à Sony. La maquette est envoyée dans les bureaux de Sony 550 qui décide de la prendre sous contrat. Edité sans promotion durant l’été 91, "Feel So High" ne connait aucun succès. Sony décide de lui donner une seconde chance et réédite le single sous une autre forme en janvier 92. Contre toute attente, le single atteint la 13ème place des charts anglais. Dans la foulée, Sony décide de lui faire enregistrer Adventures, un premier album qui recueille les éloges de la presse anglaise et se classe à la 30ème des ventes d’albums.

Conscient de peut-être détenir une perle rare, Sony va lui concocter un parcours sur mesure. DES’REE se produit en première partie de SYMPLY RED, collabore avec Terrence TRENT D’ARBY et se produit en fin d’année au Vatican. Si Janet JACKSON avec "Janet" et Whitney HOUSTON avec la B.O. de "The Bodygard" caracolent en tête des ventes au même titre que BOYZ II MEN chez les hommes, DES’REE va proposer une excellente alternative avec "I Ain’t Movin’", son second disque se vendant à plus de deux millions et demi d’exemplaires, un disque remarquablement promu et porté par le single "You Gotta Be".

Alors que la Nu Soul, le New Jack Swing et différentes variantes de Hip Hop sont à leur apogée, Des’Ree arrive au bon moment avec une Soul British aussi fraîche qu’entrainante. Le clip vidéo de "You Gotta Be" instaurant un climat de quiétude va trancher par sa simplicité avec de nombreuses productions américaines dans lesquelles la démesure semble être de rigueur.

Dès le titre d’ouverture "Herald The Day" avec son intro pluvieuse, la chanteuse nous met dans un bain de fraicheur, un décor épuré ou les arrangements et l’orchestration vont de paire avec subtilité et délicatesse. Une bonne mise en bouche sur la tolérance et l’injustice. La chanteuse est secondée ici par une solide équipe d’accompagnateurs qui ne sont pas venus là pour toucher leur cacheton, mais qui bien au contraire s’impliquent totalement pour mettre DES’REE au diapason. On retrouve notamment le multi instrumentiste Ashley Ingram (ex IMAGINATION), le saxophoniste vétéran Vernon Jeffrey Smith (ex Daryl Hall, Billy OCEAN, Paula ABDUL) et la bassiste Tracy Wormworth (STING, B-52’s, Joan OSBORNE), le batteur Rocky Bryant (Cyndi LAUPER, Peter FRAMPTON) ou le guitariste Prince Sampson (Pasadenas). Avec son délicat nappage de piano et des percussions exotiques, "Crazy Maze" interroge sur les folies de notre quotidien et sur des vraies priorités qui devraient s’imposer d’elles-mêmes. Si le titre demeure à ranger sur l’étagère de la Soul, on retrouve ici des réminiscences avec Kate BUSH et la première strophe pourrait valoir de maxime : "Money don't make my world go'round".
Changement de cap avec "Little Child", une mixture de Folk, de Soca, de Spouge et de Calypso, un titre dont les paroles désenchantées sur les conditions de vie rendues pénibles par l’homme appellent à l’espoir. Un titre pouvant s’inscrire dans un album de Tracy CHAPMAN. Impression similaire avec "In My Dreams", chanson sur nos rêves envolés et la mort. Si "Strong Enough" s’annonce de prime abord plus dansant avec une flopée de cordes et violonades, le texte souvent noir et pessimiste s’achève comme souvent chez elle comme un message d’espoir.

Second morceau phare du disque "Trip On Love" nous parle d’amour, d’amour filial et de voyage, trois remèdes aux maux de notre planète. La programmation drums parvient à maintenir une tension tout au long du morceau. De l’amour, il en est encore question dans "I Ain’t Movin", un mélange de Soul Folk dans lequel la conclusion peut sembler rassurante : "Love never ends". Si derrière "Living In The City" se glisse encore une fois un sentiment d’inquiétude lié à notre façon de vivre, la ligne mélodique et les percussions de Thomas Dianni se révèlent lassantes. Le maillon faible du disque ! Reposant principalement sur le piano d’Ashley Ingram, "Love Is Here" pourrait s’inscrire comme une ordonnance médicale dans laquelle l’amour et la musique sont des remèdes efficaces. Mais comment ne pas terminer par "You Gotta Be", titre chaleureux et toujours intemporel qui aura longtemps envahi les ondes radios, rappelez-vous : "Listen as your day unfolds - Challenge what the future holds - Try and keep your head up to the sky … … You gotta be cool, you gotta be calm, you gotta stay together". Une chanson dont les paroles entre poésie métaphorique et romantisme utopique semblent couler de source, surtout à une époque incertaine où certains de nos dirigeants marchent à côté de leurs pompes.

Si on peut reprocher une production trop lisse et une utilisation de programmes sonnant parfois trop synthétiques, Des’ Ree nous offrait en 1994 un opus léger se démarquant des productions pleines d’esbroufe. Le timbre s’avère parfois reposant et même bienveillant malgré des paroles pas toujours réjouissantes. Les influences caraïbéennes de la Barbade, ile où la chanteuse a passé une partie de son enfance, s’emboitent remarquablement dans cette Soul so British. Sorti en mai, "I Ain’t Movin’" fit également un carton aux USA où l’album sera édité par Epic, une mesure protectionniste comme en rafFole l’Oncle Sam. Un disque qui a l’image de sa pochette peut contribuer à influer un soupçon de sérénité. A ranger entre les albums Folk de Tracy CHAPMAN, la Soul de Beverley Knight et la Pop de Tori AMOS, Kate BUSH ou Cyndi LAUPER.