Recherche avancée       Liste groupes



      
GOSPEL SOUL  |  STUDIO

L' auteur
Acheter Cet Album
 

ALBUMS STUDIO

2022 When Do We Get Paid

The STAPLES JR SINGERS - When Do We Get Paid (2022)
Par LE KINGBEE le 27 Mai 2022          Consultée 830 fois

Cette formation originaire d’Aberdeen (Mississippi), ville natale de Bukka White, n’a strictement aucun lien avec son presque homonyme The STAPLE SINGERS, célèbre troupe familiale dirigée par Roebuck 'Pops' Staples.

A la fin des sixties, alors que la Ségrégation est encore en vigueur quoi qu’on en dise, un jeune trio familial prend forme sous le nom de The STAPLES JR. SINGERS, clin d’œil à l’un des ensembles phare du Gospel. La troupe se fait connaître dans le circuit des collèges et des universités avant d’intégrer la Bible Belt, circuit Gospel sévissant principalement dans les anciens états sécessionnistes.
Annie Brown et ses deux frangins Edward et ARC sont souvent accompagnés par leur paternel dans d’harassantes tournées durant lesquelles la formation se produit trois fois par jour, au rythme des routes poussiéreuses et sinueuses du Sud.

En 1975, Joe Orr, un évangéliste itinérant, les présente à Big John, patron du Statue Recording Studio, un modeste studio d’enregistrement basé à Tupelo. Au moment de l’enregistrement, Annie n’est âgée que de 14 ans, ses deux frangins font figure de vieux briscards avec leurs 15 et 16 balais. Ils sont rejoints par Ronnel leur plus jeune frère, un vieillard de 10 ans. Produit par Merton Records, "When Do We Get Paid" sort sous la bannière de Brenda Records, label inconnu dont le disque se vend principalement lors des représentations du groupe.

Si les trois adolescents se produisent toujours sous d’autres entités, la sœur et ses frères ayant pris des chemins de traverse, l’histoire aurait pu en rester là si David Byrne, patron de Luaka Bop, label de réédition, n’avait pas décidé de ressortir cette obscurité des oubliettes.

Dès la fin des sixties, le Gospel allait ouvrir des brèches béantes vers la Soul, le Funk et le Blues Psy, de nombreux ensembles souvent inconnus s’inspirent alors des tendances et des modes du moment, une modulation n’échappant pas à l’art en général. Le Mouvement pour les Droits Civiques allait lui aussi offrir de formidables réminiscences au Gospel. En 1972, les STAPLES SINGERS avaient propulsé "I’ll Take You There" et "Respect Yourself" au sommet des charts, consacrant ce qu’on appelle en parallèle le son Stax. Cette fulgurance allait donner des ailes à d’innombrables petits ensembles dont la notoriété ne dépassait pas les frontières de leur ville ou de leur état.

Luaka Bop réédite à 80% l’album d’origine à l’identique. Seul "How I Got Over" disparaît totalement du contenu, remplacé par "Trouble of the Word" et "Waiting For the Trumpet To Sound", deux titres gravés lors d’une session ultérieure. La troupe propose ici un Gospel plein de ferveur, gorgé de Soul et parsemé d’une légère touche Funk. Si l’accompagnement semble parfois se résumer au minimum syndical avec une guitare et une section rythmique squelettique constituée d’une basse et d’une batterie, la fratrie Brown nous distille un paquet de petites pépites.

Dès "Get On Board", titre d’ouverture, l’influence de Staple Singers demeure évidente. Les trois voix d’Annie, Edward et A.R.C Brown constituent un modèle du genre, leur affiliation rapproche leur sonorité de la Close Harmony. "I Know You’re Going Miss Me" reprend à la fois le concept des prêches religieux avec le jeu des questions/réponses le tout s’emboîtant sur une mélodie accrocheuse d’une simplicité déroutante, à l’instar de certains hit-makers de la Soul sixties. La Country Soul et le Holy Blues sont également des sources d’impulsions, comme en atteste l’excellent "I’m Looking For A Man".

Hormis "Trouble of the World" *, titre de Mahalia Jackson figurant au générique de Imitation of Life (Mirage de la vie), dernier film de Douglas Sirk avec Lana Turner, les douze pistes proviennent des plumes d’Annie et des frangins. Le titre se voit repris par Sinead O’CONNOR en 2020, les bénéfices reversés au mouvement Black Lives Matter. "Waiting For the Trumpet To Sound" rappelle que la frontière entre Gospel, Work Song et chant d’esclaves est souvent très mince.

Autre source d’inspiration, "I’m Going To A City" dont le rythme et la mélodie rappellent certains titres de Ray CHARLES. Si les paroles font clairement référence au Sauveur, "Somebody Save Me" s’inscrit autant dans le domaine de la Soul Gospel que dans celui du Blues. A contrario, "I Feel Good" offre de solides réminiscences dans le registre de James BROWN, l’un des pères spirituels du Funk. Avec ses riffs de guitare noueux, le groupe nous offre une belle plongée a mi-chemin du Gospel et du Memphis Sound, comme en attestent "When Do We Get Paid" et "Send It On Down", titre qui évoque BARBARA & The BROWNS, autre formation de la firme Stax, celle aux doigts qui claquent.
Si, à travers les différentes litanies et logorrhées, les thèmes de l’injustice sociale, de la pauvreté et de la Ségrégation se font ressentir nous faisant parfois frémir, l’album propose aussi deux titres plus festifs : "On My Journey Home", une pièce de choix se tenant en équilibre entre Gospel et Swamp, alors qu’en fermeture "I Got A New Home" dévoile son beau message d’espoir.

Si certains risquent de trouver que cet enregistrement d’une modeste troupe familiale connaît quelques faiblesses techniques, les trois voix transcendent superbement le répertoire par sa ferveur et des mélodies s’emboîtant remarquablement entre Gospel mississippien et une Soul estampillée par les bannières de Hi Records ou de la Stax. Les STAPLES JR. SINGERS rendent ici un brillant hommage à leurs idoles de toujours les STAPLE SINGERS. Saluons comme il se doit cette judicieuse réédition qui permet de réhabiliter une troupe inconnue. Alors qu’Annie, Edwards et ARC avaient pris des routes séparées, chantant dans différents ensembles et chorale, ce disque a également permis de reformer la fratrie, une tournée internationale étant annoncée pour l’été 2022.


*Le titre figure également au générique de Ladykillers, film des Frères Coen avec Tom Hanks, chanté par Rose Stone and the Venice Four.

A lire aussi en SOUL par LE KINGBEE :


Jackie SHANE
Any Other Way (2017)
Chanteur transgenre des sixties et plein de feelin




Wilson PICKETT
The Wicked Pickett (1967)
Parfait prototype de soul mid sixties


Marquez et partagez







 
   LE KINGBEE

 
  N/A



- Annie Brown (chant)
- Edward Brown (chant)
- A.r.c. Brown (chant, guitare)
- Ronnel Brown (basse)
- Carl Walker (batterie)


1. Get On Board
2. I Know You’re Going To Miss Me
3. I’m Looking For A Man
4. I’m Going To A City
5. Somebody Save Me
6. Trouble Of The World
7. Waiting For The Trumpet To Sound
8. I Feel Good
9. When Do We Get Paid
10. On My Journey Home
11. Too Close
12. Send It On Down
13. I Got A New Home



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod