Quelques allées et venues étalées sur des années, entre la Provence et la Vendée, ont finalement permis à l'artiste PLVS RIEN de s'installer dans la Drôme, celle du sud et celle de Valence. Itinérant, il l'est d'abord et depuis longtemps par l'imagination, en tant que grand fan du metal de la couleur la plus 'noire', le black tel qu'on peut qualifier ce style à part entière venu des contrées du Nord, depuis le fin fond des forêts scandinaves, même si Bergen, ville côtière de Norvège en est la capitale.

Toutefois ici, pas ou peu de guitares, en tout cas pas vraies. Les synthétiseurs et programmations ont la part belle, permettent à PLVS RIEN et son black-metal de défendre plutôt une forme ambient de cette musique entièrement instrumentale. Parmi les influences principales de l'intéressé : BASARABIAN HILLS, venu de Moldavie et one-man band également. En bon souci de personnalité, le Drômois préfère aller chercher plus loin, sous d'autres latitudes.

Le final de ce parcours de vie et culture, qui est à la fois aussi tout l'objet de cette première création, c'est l'Egypte antique, celle de la mythologie et des pharaons. Un voyage sombrement planant, où la lumière ne fait que répondre aux incantations, et encore, pour soutenir le pouvoir, le conflit. De quoi connecter habilement les rivages du Nil avec ceux de la mer Baltique, voire de l'Arctique.

Après une courte introduction aux sons oppressants teintés d'Orient ("The Call"), où l'esprit de marche lente se met durablement en place, "Ra's Rebirth" évoque l'arrivée matinale quotidienne du Dieu-Soleil à tête de faucon sur sa barque, au prix de son combat contre le monstrueux Apophis (évocation de la nuit pour les anciens), et recouvrant le monde d'une toile de lumière momentanée (le jour). Une chorale féminine factice et des percussions régulières s'accordent au ton mélodique majeur oriental, de quoi signifier la grandeur. L'avant-dernier mouvement, étrange avec ses bandes inversées, semble signifier le retour prématuré de l'ennemi (chose que le peuple craignait au moment des éclipses solaires).

C'est le plus beau morceau de cet EP Aegyptvs avec le suivant, "The Shining Nile", impressions du fleuve le plus grand du monde (avec son cousin sud-américain que l'on ne connaissait pas encore de ce côté-ci du globe à l'époque). La limpidité instaurée par les sons de cloches, dans laquelle se baignent les voix féminines, en fait un moment plus que plaisant.

La deuxième partie corse le tout avec la chorale jouant sur des strates durant la tempête de sable sur le plateau de Gizeh. Même si un violon oriental se joint dicrètement, "The First Parchment" se fond dans des sons plus graves encore, y compris au niveau des samples, des résonances guitaristiques en fond. Le moment le plus heavy se situe au début de "Tefnut's Betrayal", avec de gros accords gras et un orchestre massif. On reste dans un aspect rituel avant que la couleur atmosphérique ne reprenne ses droits, avec quelques effets d'orage pour souligner le pouvoir de Tefnout, fille de Rê, première des déesses, mère de fertilité. Laissant le pays en proie à la sécheresse, elle s'était enfuie en Haute-Nubie (le Soudan au sud de l'Egypte) avant son retour 'forcé' par les autres dieux.

De bonnes idées sont là même si la seconde partie manque un peu d'unité voire de fortes révélations comme la première. L'univers choisi est déjà si follement riche, qu'on ne peut cependant que souhaiter qu'un jour, le voyage s'étendra sur un album entier !