Revival, revival, quand tu nous tiens ! Mais peut-on vraiment encore employer ce terme quelque peu péjoratif lorsque celui-ci ne semble plus devoir ou vouloir se finir ? C'est ce qui se passe assurément avec le courant post-punk. La sphère dans laquelle il évolue est si ténue qu'il n'est plus sans doute question maintenant de cynique vache à lait financière mais, assurément, plus de passion. Depuis plus de quatre décennies, à travers une urgence mélodique bien sentie, il irrigue souvent pour le meilleur et parfois pour le pire les veines des mélancoliques adeptes d'envolées directes. Go To Ground, le deuxième album de ce projet de Boston, aurait donc pu aussi bien sortir en 1985 qu'en 2023 tant il semble comme hors-du-temps, à la fois si typé et si moderne.

Si THE TRUE FAITH pratiquait à ses débuts une pop synthétique très proche de celle de NEW ORDER (d'où son nom sans doute), il a vite abandonné les puissants claviers et les boîtes à rythmes mécaniques pour une approche tout en guitare sombrement lyrique. Les Américains ne sont pas là pour rire, ne tergiversent pas et ils nous le font vite savoir. En effet, en moins de quarante minutes et neuf titres, ils vont à l'essentiel: les émotions. C'est sans fioriture mais particulièrement efficace. Le projet regarde naturellement par-delà l'Atlantique tant ses ambiances exhalent l'Angleterre des années 80, mais il ne baigne pas pour autant et heureusement dans un bain de formol passéiste.

Si vous désirez des balises, car il en faut toujours un peu quand même, Go To Ground rappelle entre autres le meilleur des CHAMELEONS (la superbe fin de "Before Now"). C'est un album offensif, incisif, qui vous laisse à peine respirer. Sans temps mort, il vous jette en pleine figure ses petites perles post-punk. Écoutez moi plutôt les excellents "Stuck" et "A Cry For Help" et essayez donc de ne pas succomber à cette rythmique sèche, à ces guitares tantôt agressives, tantôt limpides et, surtout, à cette voix. Travis Benson chante comme si sa vie en dépendait. Le plus souvent dans une tonalité grave, il la module aisément et naissent alors ces fameux frissons. Dans son approche vocale, Benson me rappelle Mark BURGESS, le leader des CHAMELEONS et c'est forcément un compliment. J'y retrouve ces mêmes force et sincérité, les mêmes tripes mises en avant à chaque seconde.

Il y a donc bien une passion communicative autour de toutes ces ambiances, même lorsque parfois celles-ci se permettent de lever le pied. La limite entre un goth lumineux (surtout encore une fois dans le chant) et une cold wave grise est parfois mince. Elle s'apparente le plus souvent à l'image du très beau "Feet Held to the Fire" à un trompe l’œil où ses premiers instants cérémonieux tout en claviers tristes sont arrêtés net par une guitare tranchante. THE TRUE FAITH a indéniablement le petit plus pour développer sous un aspect rêche et dépouillé de belles mélodies. A l'écoute de l'excellent "Down to the Knees", il sera ainsi difficile de ne pas suivre les ondulations tout en rondeur de la basse. Le quintet alterne sans difficulté apparente âpre flamboyance, comme le martèle l'efficace "Minimal Change", et effluves à la limite de la pop froide ("Suffer") pour notre plus grand plaisir.

N'y allons pas par quatre chemins ! Go To Ground est une excellente surprise post-punk. THE TRUE FAITH par essence n'a pas malheureusement une renommée mondiale mais les Américains méritent pleinement d'être écoutés et soutenus.