Le sampling est une pratique relativement courante chez les artistes d'ambient, notamment avec l'emploi de field recordings ou d'extraits d'œuvres musicales et cinématographiques. Geir Jenssen en était particulièrement adepte au début de sa carrière. Sur Substrata par exemple, les samples sont utilisés de manière très subtile, renforçant le caractère irréel des ambiances sans vouloir pour autant trop influencer l'auditeur. Au contraire, l'idée est bien de le laisser projeter sa propre image mentale et rêver à un ailleurs qu'il reste le seul à connaître. Néanmoins, le sampling peut parfois n'être qu'un cache-misère voire, dans d'autres cas, venir ruiner un morceau. C'est particulièrement le cas sur The Fires of Ork 2, seconde et ultime collaboration entre Geir Jenssen et Pete Namlook sortie en l'an 2000. Il s'agit même du parfait exemple de la mauvaise utilisation du sampling, gâchant un album qui sans cela aurait sans doute pu être bien meilleur.

Il y a tout d'abord le sample de voix inutile, celui de "In Heaven", qui arrive comme un cheveu sur la soupe et n'apporte absolument rien à l'ensemble, au demeurant plutôt agréable. Vient ensuite, avec "When The Night Was Black", le cas du sample qui tente tant bien que mal de dissimuler la pauvreté d'un tableau vraiment vide. Un même échantillon de voix répété du début à la fin, comme s'il s'agissait de nous expliquer ce que notre esprit peine à imaginer. Qui sait ? À force de nous rabâcher qu'il s'agit d'une forêt, et puis qu'il fait nuit, et qu'il fait noir, on finira peut-être par y croire. Troisième type de sample, cette espèce de grincement insupportable qui ponctue ''Nouvelles Machines'' toutes les cinq secondes pour le plus grand plaisir de vos nerfs. Quand enfin, après huit minutes, on accueille sa disparition avec joie et soulagement, c'est pour mieux le voir revenir quelques secondes plus tard, gâchant jusqu'au bout la dernière piste de l'album. Piste, tout "When The Night Was Black", entièrement sabotée par un sampling grossier et regrettable.

Le reste du disque se porte-il mieux sans ? Oui et non. Un peu hors-sujet, "Sky Lounge" nous embarque pour un long moment dowtempo rapidement répétitif et assez mièvre, bien loin des ambiences profondes du premier essai. Certes, sept ans ont passé et l'ambient techno n'est plus vraiment à l'ordre du jour. Pete et Geir l'ont parfaitement compris et essayent vraisemblablement de profiter du succès de Substrata, avec lequel "In Heaven" déjà citée et "A Way To Focus The Mind" partagent certaines sonorités. Deux bons morceaux d'ambient ici, qui relèvent un peu le niveau d'un album assez décevant.

Limité au départ à mille exemplaires, The Fires of Ork 2 ne bénéficiera pas d'une réédition sur Apollo Records comme ce fut le cas pour le précédent. Au contraire, il faudra attendre 2007 pour le voir ressortir chez Ambient World, autre label créé par Namlook. Le plus intéressant est encore de se procurer The Fires of Ork, édité en 2018 par Biophon Records et qui rassemble les deux disques. Quant aux aventures communes de Geir Jenssen et Pete Namlook, elles s'arrêtent ici sur une note, il faut bien se l'avouer, un peu terne.