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2023 Back To Baton Rouge

LIL' JIMMY REED - Back To Baton Rouge (2023)
Par LE KINGBEE le 30 Juin 2023          Consultée 723 fois

Décédé en 1976, Jimmy REED a suscité plus d’une vocation, certains petits malins allant même s’affubler d’un patronyme approchant. En 1967, Jimmie Reed Jr. enregistrait pour Mercury son unique single dans une veine Soul Funk. Quatre ans plus tard, son presque homonyme Jimmy Reeves Jr. enregistrait l’album Born To Love Me (chronique figurant sur le site).

De son vrai nom Leon Atkins, Lil Jimmy REED pousse son premier cri en 1938, le jour de notre Fête Nationale. Natif d’Hardwood, bourgade à 50 bornes de Baton Rouge, Leon débute par l’harmonica puis se lance dans l’apprentissage de la guitare dès six ans via une cigar box fabriquée par un voisin. Alors que sa famille s’installe à Baton Rouge, l’apprenti guitariste se lance dans le domaine de la coiffure, métier qu’il abandonne pour rejoindre l’armée à 34 ans où il officie pendant près de vingt ans.
Ce n’est qu’une fois démobilisé que le guitariste se lance dans une carrière professionnelle. En 1996, il enregistre School’s Out édité par le micro label Vent. Notre guitariste récidive en 2015 avec Blues In Paradise tout en se produisant fréquemment dans le circuit Blues du Grand Sud. Mais, bien avant cela, durant la fin des fifties, notre Leon remplaçant au pied levé Jimmy Reed trop bourré pour se produire sur scène avait pris le pseudonyme de Little Jimmy Reed, sobriquet des plus curieux quand on voit ce grand échalas sur scène.

Si le guitariste s’est produit dans un passé récent en Angleterre, en Chine, au Japon et en Israël, la pandémie liée au Covid a mis un frein à ces prolifiques tournées, Jimmy retournant en Alabama. A presque 85 ans, le Louisianais nous revient en forme avec ce 3ème opus, un disque qui rend hommage à la fois à Jimmy Reed et au Swamp. S’il s’est longtemps produit en compagnie du pianiste anglais Bob Hall, Jimmy est secondé par une nouvelle équipe de Cincinnati avec le jeune pianiste Ben Levin (vu au festival de La Roquebrou), son paternel Aron Levin (ex-membre des Heaters), du bassiste Walter Cash Jr., tandis que le vétéran Ricky Nye, grand spécialiste du Boogie Woogie et ancien membre du Paris Blues Band, et Shorty Star (ancienne batteure de Johnny Burgin) se succèdent aux baguettes. Enregistré dans l’antre de la WVXU, une radio publique de Cincinnati bénéficiant d’un studio flambant neuf, Back To Baton Rouge nous entraîne à travers un voyage à l’ancienne, Lil Jimmy Reed navigant entre le répertoire de Jimmy REED et le Swamp Blues pratiqué entre Baton Rouge et les studios du label Excello à Crowley.

Il ne faut pas 36 écoutes pour que les influences majeures du guitariste nous sautent aux yeux ou aux oreilles. S'il nous offre cinq compos dont deux co-écritures avec les Levin, les ombres de Slim HARPO, Lazy LESTER, Silas HOGAN ou Lonesome SUNDOWN semblent planer ici, nous offrant un décor alléchant et parfaitement compatible avec les trois reprises de Jimmy REED dont le style se rapproche du Blues des Marais par sa rythmique minimaliste.

Au chapitre des originaux, "They Call Me Lil’ Jimmy" constitue une bonne tranche de vie, entre autobiographie et souvenir mélancolique. Le jeu de guitare plein de sobriété va à l’essentiel, évoquant par moment celui de Lonesome SUNDOWN. Avec son expérience, le vieux grigou n’oublie pas de rendre hommage à la ville qui l’accueille avec "Cincinnati’s The Place To Be", un excellent Swamp en mode mineur. Si le timbre s’avère chevrotant, l’émotion est de rigueur sur "Back To Baton Rouge" qui donne son nom à l’album. Si le jeu de guitare reste souvent d’une grande sobriété, porté par une rythmique squelettique, cela n’empêche pas Lil’ Jimmy de flirter avec les nuances, comme en atteste "Engine Light", une compo bien groovy à ranger entre Silas HOGAN, Jimmy REED (le vrai) et Muddy WATERS. Création des Levin père & fils, "Wish You Wouldn’t" invoque l’univers d’Henry Gray avec son jeu de piano et une rythmique gardienne du temple.

Deux reprises agrémentent l’opus. Sous forme d’un R&B Nola, le groupe reprend "In The Wee Wee Hours" *, un inusité de Joe Liggins datant de 1960, figurant en face B d’un single édité par Honeydripper Records. Le piano et la guitare y impulsent une ambiance plus dansante rappelant les heures de gloire du R&B louisianais du début des Sixties. En guise de clôture, il reprend sous une forme plus nostalgique "Mailbox Blues" **, une compo de Slim HARPO gravée en 1967 à Memphis en compagnie des frères Hodges. Le jeu de guitare sans fioriture et sans chichi va encore une fois à l’essentiel, tandis que Miss Shorty Star aux baguettes et Walter Cash se dévoilent comme les gardiens du temple, une fine équipe de métronomes.

Enfin, avec un tel blaze, il paraissait impossible que notre Louisianais ne se permette pas un clin d’œil à l’instigateur involontaire de son sobriquet. Premier hommage avec "Down In Virginia" pour une version respectueuse avec harmonica porté et un jeu de guitare aligné sur celui d’Eddie TAYLOR. Seule l’incorporation d’un piano discret change la donne par rapport à l’original. Le titre sera repris par Magic SLIM et Boz SCAGGS. Lil’ Jimmy remet au goût du jour "I’m The Man Down There", l’un des derniers singles Vee Jay enregistré par le bluesman alors victime de graves crises d’épilepsie et d’une addiction à l’alcool. Cette version permet de découvrir la science rythmique du grand Jimmy REED. Ce titre sera repris par Ronnie Wood dans un Tribute Live débouchant sur une interprétation nettement plus dynamique? mais hélas moins authentique.
Dernière cover avec "A String To Your Heart", une ballade encore plus obscure enregistrée en décembre 57 et à ma connaissance jamais reprise jusqu’à ce jour. Si les paroles peuvent aujourd’hui faire sourire avec cette ficelle attachée au cœur de la bienaimée, le texte retranscrit parfaitement les rapports de couples de l’époque. Le choix de ces trois reprises méconnues s’avère judicieux et permet d’éviter les rabâchages sempiternels.

Edité par Nola Blue Records, label de Sallie Bengtson, cet opus permet de retrouver un grand échalas de bientôt 85 ans au sommet de son art. Produit sans la moindre once d’esbroufe, ce digipack présenté sous la forme d’une double pochette et d’un sympathique livret intérieur de 12 pages nous renvoie vers un décor Down Home Blues, à cheval entre l’Excello Sound et le son du créateur du hit "Big Boss Man". Un disque qui ne prête pas de mine, un jeu de guitare simple mais terriblement plus sincère et authentique que les productions Blues contemporaines. La combinaison entre ce guitariste vétéran et le jeune pianiste Ben Levin se révèle particulièrement croustillante. Souhaitons qu’on puisse revoir ce guitariste inoxydable en Europe.


*Titre homonyme à celui de Buddy Guy et Junior Wells.
**Titre homonyme à celui d’Erwan Brown.

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   LE KINGBEE

 
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- Lil’ Jimmy Reed (chant, guitare, harmonica)
- Aron Levin (guitare)
- Ben Levin (piano)
- Walter Cash Jr. (basse)
- Ricky Nye (batterie 1-2-3-5-6-7-8-9)
- Shorty Star (batterie 4-10)


1. Down In Virginia
2. They Call Me Lil’ Jimmy
3. Wish You Wouldn’t
4. Cincinnati’s The Place To Be
5. Back To Baton Rouge
6. In The Wee Wee Hours
7. Engine Light
8. I’m The Man Down There
9. A String To Your Heart
10. Mailbox Blues



             



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