La jeune artiste parisienne ALICE ET MOI a dépassé la trentaine désormais et vient donner un successeur à son premier album Drama (2021), nommé Photographie, qu'elle réalise une nouvelle fois en compagnie du producteur 'bad boy de la pop' Dani Terreur et édite sous l'Oeil Dans la Paume, son propre label distribué par Sony Music.

Le son ne diffère nullement de celui de 2021, notre demoiselle chanteuse tient à son univers electro-pop minimaliste, faite de voix douce, susurrée pour des paroles entre grande adolescence et femme adulte en fleur, entourée de programmations auxquelles s'adjoint un peu de vraie guitare, voire basse. La pochette elle-même contient cette empreinte personnelle de dispositif à photo instantanée dressé au milieu de nulle part, d'où sort la fille réputée ancienne timide, crevant l'objectif et assumant parfaitement son sex-appeal gagné avec les années.

Le premier extrait, paru à l'hiver dernier, est "Ça Me Va", avec son clip langoureux apocalyptique. Sur des paroles très sensuelles, pleines de volonté de rapprochement intime mais avec des pointes de catastrophisme, ALICE ET MOI, tel un ange de l'ombre, débarque dans un appartement-soirée à Paris qui s'annonçait 'chaude' avec plein de couples s'embrassant passionnément (d'abord gays-lesbiens, ensuite diversifiés), jusqu'au final précipité avec tout qui s'est vidé et le visage de la chanteuse aux infos du jour à la télé. Single efficace avec guitare clean en écho qui plane et une rythmique ternaire en vogue mais pas si courante qu'on pourrait le croire pour ce disque.

Par rapport à Drama qui favorisait les tempos lents et les accointances avec le hip-hop ou le reggaeton, Photographie préfère les moments plus enlevés, proches de la nu-disco, comme "J'Aime Pas Sortir", son refrain fainéant et sa légèreté délicate où l'on retrouve momentanément la 'shy girl'/fille timide qui voudrait se contenter de sa bulle, comme aussi "L'Incendie" où ALICE ET MOI se montre à nouveau pleine de confiance, d'envies.

Des titres chaloupés et funky tels "Carabine", témoignage d'une fonceuse, ou au contraire "Devant Toi", fait d'incertitudes sur son succès de séduction auprès de 'lui', "Photographies" sur un ancien manque de confiance maladif et introspectif, font tout à fait honneur à l'artiste qui entonnait "Le Pire de Nous Deux" voilà une paire d'années. Avec "La Vie en Bleu", ALICE ET MOI nous propose un texte sexy et sensuel, fait encore 'd'histoire de langue' (pas celle qu'on parle) sur fond de pop dreamy suave, avec de belles nappes. Une forme de petite poésie intime et tâtonnante.

Au rayon amour/bonheur, on remarque dans ces déclamations de plus en plus de références gourmandes, mêlées de lexique culinaire, de quoi rendre les chansons plus sucrées et goûteuses, comme sur "Caramel", faite d'une très belle ambiance feutrée, ainsi que "La Dolce Vita", ses glaces et autres clichés à l'italienne.

Tout cela pour finir, au gré de l'humeur changeante, sur une rupture et même bien au-delà, en parlant de celui dont elle s'est éloignée pour mieux revivre, sur "Je M'en Vais", ballade marquée par des synthés emphatiques et un crescendo inattendu. Aussi, comme la guitare bossa en intro de dolce vita, on apprécie, quoique trop tardivement, l'incursion d'instruments acoustiques (piano puis guitare) pour une coda instrumentale inédite. Peut-être une piste à renforcer pour le prochain album, que l'on espère tout autant réussi.

Note réelle : 3,5