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DELTA HILL COUNTRY BLUES  |  STUDIO

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2023 Black Bayou

Robert FINLEY - Black Bayou (2023)
Par LE KINGBEE le 2 Décembre 2023          Consultée 1014 fois

Robert FINLEY a vu le jour en 1954 à Bernice, village situé à 120 bornes à l’ouest de Shreveport. Il se met très tôt à la guitare instrument qu’il maitrise rapidement. Après s’être essayé aux métiers de garçon de ferme, plombier et électricien, il s’engage à seize ans dans l’armée qui l’expédie en Allemagne où il est enrôlé comme mécanicien dans une base d’hélicoptère. Mais le service de recrutement de l’US Air Force le réoriente dans l’orchestre de sa base, à la recherche d’un guitariste, ce changement de statut lui permet de voyager au gré des concerts donnés dans les nombreuses bases US stationnées en Europe.
A sa démobilisation, l’ancien mécano devient charpentier menuisier, comme son père, et passe son temps libre à jouer de la guitare au sein de Brother Finley and the Gospel Sisters, un petit ensemble local chantant les louanges du Seigneur. Devenu quasiment non-voyant, il doit abandonner son métier et devient musicien de rue. Ce n’est qu’en 2015 que Tim Duffy, patron de la fondation Musik Maker le découvre dans un concert de rue à Helena (Arkansas). Ce dernier le recommande à Bruce Watson, patron de Big Legal Mess qui décide aussitôt de l’enregistrer sous la houlette du guitariste Jimbo Mathus et de Scott Bomar aux consoles. Contre toute attente, Age Don’t Mean A Thing récolte les éloges de la presse spécialisée. Robert Finley ne tarde pas à rattraper le temps perdu. En 2017, il retourne en studio cette fois ci c’est Dan Auerbach, guitariste des BLACK KEYS, qui le prend sous son aile avec à la clef Goin’ Platinium, l’un des meilleurs disques de Soul Blues de l’année. Suite à la pandémie, l’émouvant Sharecropper’s Son, troisième jet de Robert prend un peu de retard à l’allumage mais l’album est porté aux nues par la critique.


A l’heure où ces modestes lignes surgissaient dans les limbes de mon cerveau, Robert Finley était en tournée dans l’Hexagone. Enregistré à Nashville dans l’antre du label Easy Eye Sound, ce nouvel opus surprend d’emblée par son intensité et la puissance émotionnelle du chanteur. Robert Finley s’aventure maintenant en terrain connu, il s’agit en effet de la troisième collaboration avec Dan Auerbach. Le vétéran se retrouve entouré d’une équipe qui lui sied remarquablement : le guitariste Kenny Brown, ancien équipier de Junior KIMBROUGH, R.L. Burnside et l’un des rare dépositaire blanc du Hill Country Blues, le bassiste Eric Deadon (ex Jimmy "Duck" HOLMES, R.L. Boyce, Reverend John Wilkins), Tandis que Patrick Carney et Jeffrey Clemens (G Love & Special Sauce) se succèdent aux baguettes. D’autres belligérants apportent leur science du groove : l’harmoniciste Tim Quine (ex Ray Fuller), le percussionniste Sam Bacco (ex Emmylou Harris, Steve Winwood) membre de l’Orchestre Symphonique de Nashville et l’organiste Ray Jacildo (ex Charles BRADLEY, Marcus KING, Leo WELCH). Mais si tous ces intervenants ont tous collaboré au sein des BLACK KEYS, deux membres de la fratrie Finley cimentent cet assemblage Christy Johnson et LaQuindrelyn McMahon, fille et petite-fille du patriarche).

Si la pochette nous dévoile le chanteur tout sourire avec en en arrière-plan un paysage marécageux, en droite ligne avec le Swamp, le répertoire ne reste pas figé les pieds dans le même sabot et nous invite même dans des incursions dans le Hill Country Blues, le Blues Funk et le Delta Blues, celui-ci constituant la trame d’un album entièrement coécrit par le chanteur et ses équipiers. C’est donc dans une atmosphère sudiste qu’on se retrouve plongé.

Excellente mise en bouche avec "Livin' Out a Suitcase" qui tient autant d’une Deep Soul entre Al GREEN et Joe Tex alors que la guitare de Dan Auerbach ne cesse de nous rappeler que le Mississippi n’est jamais bien loin. Les guitares montent d’un cran sur "Waste Of Time", le chant se fait plus déclamatoire, le chanteur reprochant à la société américaine de laisser de côté les péquenauds du Sud. On ignore avec exactitude si le vieux grigou est sérieux ou s’il nous adresse des plaisanteries de son cru. Si "Miss Kitty" évoque le désir d’un homme pour une certaine Miss Kitty, la corrélation se fait cette fois ci avec la Soul. Retour au Blues avec "Can’t Blame Me For Trying", encore un titre dans lequel il est impossible de savoir si Robert déconne ou nous conte à sa manière une tranche de vie, la sienne.
Le dobro auquel succède une slide fiévreuse risque de faire dresser l’épine dorsale des fans de Delta Blues et de Hill Country Blues avec "Gospel Blues", une démonstration de guitares parfumé d’un filet d’harmo. On se croirait à la croisée des chemins entre Mississippi Fred McDowell, R.L. Burnside et les français de MERCY, un titre dévastateur par son groove d’autant qu’il ne s’éternise pas et une façon de parler de l’église comme peu de conteurs savent le faire. "What Goes Around (Comes Around)", véritable Boogie louisianais pourrait servir de chainon manquant entre John FOGERTY et Tony Joe WHITE, avec en toile de fond l’appel des bayous.


Changement de cap avec "Sneakin’ Around", qui nous renvoie vers la West Coast à travers un zest de Funk qui n’est pas sans rappeler le hit "Tramp" de Lowell FULSON, le tout patronné par un délicat fumet d’harmonica. Là Finley se fait plus caustique nous contant avec espièglerie l’histoire d’une femme infidèle. A contrario "Nobody Wants To Be Lonely" se dévoile comme un Soul Blues nettement plus triste, impression renforcée par le Wurlitzer de Ray Jacildo et la présence des deux choristes. En fait, Finley nous adresse un cri du cœur concernant les personnes placées en maison de retraite par leur famille et laissées pour compte du jour au lendemain. Une chanson pleine d’émotion sur la solitude, une problématique que le chanteur connait bien pour se produire fréquemment dans les foyers pour vétérans de l’armée et les mouroirs pour anciens. Petit moment d’accalmie avec "Lucky Day", une douce ballade à cheval entre Soul NOLA, Otis REDDING et Tab Benoit (autre figure des bayous). Finley et ses accompagnateurs sont capables de nous faire traverser plusieurs décors sur un seul morceau, "You Got It (And I Need It)" nous délivre des fragrances de Soul Blues, alors que l’une des guitares s’oriente vers une destination exotique via un clin d’œil au registre Caraïbéen, alors que la voix rauque de Finley vient contraster avec un falsetto imitant celui d’un fausset.

Tel un feux d’artifice refusant que la nuit reprenne ses droits, Robert Finley clôt son histoire avec "Alligator Bait", un lent et long Hill Boogie Blues de six minutes montant crescendo. Derrière une rythmique minimaliste, la guitare lance ce formidable conteur d’histoires, qu’elles soient vraies, exagérées ou imaginaires, dans un récit foudroyant sur la chasse à l’alligator, l’un des animaux emblématiques des bayous avec le crapaud-buffle et le poisson -chat. Gamin, Robert servait d’appât pour attraper le roi des marais, marchant sur des rondins déposés à la surface du bayou alors que son grand-père veillait l’œil vissé à la ligne de mire de son fusil à être plus rapide que l’animal. Libre à chacun de croire à ces histoires qui tiennent peut-être plus des contes de notre enfance, allez savoir !

Des guitares rugueuses qui semblent mijoter, une slide qui évoque invariablement le Sud, du Delta aux bayous, une voix puissante mais pleine d’émotion et de nuances et un groove bien poisseux sont des atouts de première main. A bientôt 70 ans, Robert Finley croque la vie à pleine dent et nous délivre une vision des bayous comme on n’en n’avait plus entendu depuis des années. Découvert sur le tard, il demeure un incroyable conteur d’histoires, le pendant du regretté Tony Joe White. Certains décèleront peut-être une dose d’humanisme à l’image de son voisin Willie KING.

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   LE KINGBEE

 
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- Robert Finley (chant, guitare)
- Dan Auerbach (guitare, percussions)
- Kenny Brown (guitare)
- Eric Deaton (basse)
- Jeffrey Clemens (batterie 3-4-6-7-9-10-11)
- Patrick Carney (batterie 1-2-5-8)
- Sam Bacco (percussions)
- Ray Jacildo (orgue 1-3-7-8, piano 1-3-7)
- Tim Quine (harmonica 1-2-4-6-8-9)
- Christy Johnson (chœurs 3-7-8)
- Laquindrelyn Mcmahon (choeurs 3-7-8)


1. Livin' Out A Suitcase
2. Sneakin' Around
3. Miss Kitty
4. Waste Of Time
5. Can't Blame Me For Trying
6. Gospel Blues
7. Nobody Wants To Be Lonely
8. What Goes Around (comes Around)
9. Lucky Day
10. You Got It (and I Need It)
11. Alligator Bait



             



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